Les classes sont-elles chargées ou pas ? Pour la Depp, direction des études du ministère de l’éducation nationale, un enseignant est face à 22 élèves en 2014. Un nombre qui ne manquera pas de surprendre les enseignants qui , très majoritairement , font face à davantage. Comment la Depp compte-elle ? Quel usage fait-elle de ces chiffres ? Surtout, comment ailleurs compare-t-on les effectifs ? Car il y a aussi tout ce que l’étude de la Depp ne dit pas et que le Café pédagogique rappelle…
« L’effectif moyen des groupes d’élèves auquel fait face un enseignant du second degré varie en fonction du niveau et du secteur d’enseignement. Par exemple, un enseignant de collège ou de lycée d’enseignement général et technologique est face à 24 élèves en moyenne, tandis qu’un enseignant de lycée professionnel est face à 16 élèves en moyenne. Cet effectif moyen varie aussi en fonction de la taille et de la composition sociale de l’établissement », écrit la Depp.
Public et Privé
Pour la Depp, » pour évaluer les conditions d’enseignement dans le second degré, l’examen de la taille moyenne des divisions n’est pas suffisant car certains enseignements comme les langues vivantes, l’éducation physique et sportive (EPS) ou l’accompagnement personnalisé ne sont pas effectués en classe entière mais en groupe… Ainsi, à la rentrée, 2014, un tiers des heures dispensées dans le second degré sont effectuées en groupes », ce qui autorise la Depp à calculer autrement le nombre d’élèves par enseignant. Et de comparer les secteurs.
Ainsi, selon la Depp, on compte 7% d’heures de cours dans des très petits groupes (moins de 11 élèves) en moyenne dans le secondaire, mais 3% au collège et 4% au lycée. Autrement dit ce sont les cours de disciplines professionnelles et des CPGE (8%) qui donnent de l’existence à ces groupes. Mais ce que met surtout en évidence la Note de la Depp c’est que le privé gère mieux ses effectifs : le nombre d’élèves par enseignant est plus élevé dans le privé. Et la Note nous en donne la raison sans le dire : le nombre est plus élevé dans les établissements scolarisant des élèves de milieu social favorisé.
Comment ça évolue ?
Mais que veulent dire vraiment ces chiffres ? Comment compare-t-on le nombre d’élèves par classe entre les pays ? Deux pistes nous sont offertes. D’abord par la Depp elle-même qui livre dans le RERS 2015 un calcul du nombre moyen d’élèves par classe (et non un E/S). On voit ainsi qu’au premier degré on est passé de 22.6 élèves en 2008 à 23 en 2014 dans l’élémentaire. Dans le secondaire , on comptait 22.3 élèves en 2007 au collège, on est passé à 24.2 en 2014. Au lycée général et technologique, l’évolution est de 27 à 28. On assiste donc bien à un alourdissement significatif du nombre d’élèves par classe. Ce que chaque professeur a déjà constaté sans l’aide de la Depp… et qui pèse sur la Refondation…
Comment c’est ailleurs ?
Mais il faut regarder les statistiques européennes, celles d’Eurydice, pour donner du sens à ces données. Ce que nous apprend Eurydice, c’est d’abord que dans deux pays européens sur trois, à la différence de la France, il y a un nombre réglementaire maximum d’élèves par classe. Celle-ci est fixée à 25 élèves au primaire en Espagne, 29 en Allemagne, 26 en Italie. Au collège on passe à 30 en Esapgen et Allemagne, 27 en Italie. Au lycée 35 élèves maximum en Espagne (c’ets le record), 30 en Italie, 19 en Allemagne.
Puisque la Depp nous donne le ratio E/S en France, comparons le avec ceux des autres pays en 2009 (dernière année disponible). Aux 20 élèves en France au primaire, s’opposent les 13 élèves en Espagne, 17 en Allemagne, 11 en Italie. En fait un seul pays européen a un rapport E/S supérieur à la France au primaire c’est la Turquie. Ajoutons qu’ailleurs le rapport diminue alors qu’en France il augmente.
Au collège, seuls le Luxembourg et le Royaume Uni dépassent les 15 élèves en France. L’Espagne et l’Italie sont à 10, l’Allemagne à 15. Au lycée, les 10 élèves en moyenne en France sont cette fois plutôt bien placés face aux 12 élèves en Italie et Royaume UNi et aux 14 en Allemagne.
Plutôt que comparer le rapport E/S à l’enseignement privé, où la gestion des classes est facilitée par l’origine sociale des élèves, ce qui sous entend que la gestion du public devrait rejoindre ce « modèle », la Depp pourrait comparer à la situation dans les autres pays pour donner du sens à ces chiffres bruts si éloignés de la perception des enseignants. On découvrirait alors qu’en réalité les classes en France à l’école et au collège sont plus chargées qu’ailleurs. Tout simplement.
François Jarraud
Lire la suite : http://www.cafepedagogique.net/lexpresso/Pages/2015/11/03112015Article635821335830599852.aspx