PRomotion des Initiatives Sociales en Milieux Educatifs

In Le Blog de Bernard Desclaux :

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L’article 32 B nouveau du Projet de loi d’orientation et de programmation pour la refondation de l’école de la République est ainsi formule :

« À titre expérimental, pour une durée maximale de trois ans, dans des académies et des conditions déterminées par le ministre chargé de l’éducation nationale, la procédure d’orientation prévue à l’article L.  331-8 du code de l’éducation peut être modifiée afin qu’après avoir fait l’objet d’une proposition du conseil de classe et au terme d’une concertation approfondie avec l’équipe éducative, la décision d’orientation revienne aux responsables légaux de l’élève ou à celui-ci lorsqu’il est majeur. Cette expérimentation fait l’objet d’un rapport d’évaluation transmis aux commissions compétentes en matière d’éducation de l’Assemblée nationale et du Sénat. »

J’ai déjà écrit sur ce sujet dans un post précédent (Expérimentation des procédures d’orientation en troisième). Ce post est suivi de plusieurs commentaires qu’il est utile de relire également. Je vais donc poursuivre l’examen de cette proposition tout en reprenant les arguments déjà avancés, et en présenter de nouveaux.

Critiques de ce projet d’expérimentation 

Je ne reprends pas ici les arguments des opposants. Vous en trouverez un formulé de manière « vive » en commentaire de mon article Pourquoi faut-il supprimer les procédures d’orientation

De mon côté, j’ai fait des critiques sur les risques de cette expérimentation qui ne me semblait pas assez générale. Donner la responsabilité finale de l’orientation aux parents sans modifier tout le processus des procédures au cours du collège me semble une erreur fondamentale. La notion même de procédure repose sur l’idée de l’existence d’un désaccord entre les acteurs. Cette nouvelle répartition de la responsabilité dans la décision sera, ou pourra, être ressenti sur le mode de la revanche pour les uns, et pour les autres du désaveu. Ce n’est pas ainsi que la confiance entre les acteurs peut être construite. 

Cela dit, il y a un point positif à ne pas négliger : l’expérimentation évoquée jusqu’à présent par la ministre de la réussite éducative, Mme Pau-Langevain, est désormais du domaine de la loi (si le projet de loi est votée tel quel par l’Assemblée). Cette idée ne dépend plus seulement de la volonté d’un des deux ministres de l’éducation nationale. 

Une évaluation de quoi ?

Et cela m’amène au nouvel argument que je voudrais préciser ici. S’il y a un rapport d’évaluation de prévu dans la loi, sur quoi portera l’évaluation ? Rien n’est indiqué dans l’article de loi. Pour le moment on ne peut que s’appuyer sur les paroles de la ministre que j’ai rappelé dans le post.

Une évaluation d’une mesure porte, entre autre sur l’atteinte des objectifs assignés à l’objet de l’évaluation. Donc quels sont les objectifs présentés ? 

Il s’agit de la lutte contre le décrochage : le lieu du décrochage scolaire étant identifié au lycée professionnel et la cause étant l’orientation subie. Qu’en est-il de ces deux affirmations ?

Le lycée professionnel comme espace de décrochage

Dans le cadre de discussion pour le projet de refondation, le ministère avait publié un texte : Lutter contre le décrochage scolaire : Eléments de comparaison internationale. Pas vraiment de chiffres précis.

Les déchiffreurs, des spécialistes des statistiques ont publié un article au titre évocateur : Décrocheurs : accrochez-vous ! Pour savoir combien il y a de « décrocheurs sans diplôme », il faut vraiment s’accrocher !

L’IFE a proposé un dossier : Le décrochage scolaire, une question complexe. Le décrochage scolaire est un problème social car il est un facteur important de chômage.

Sur une infographie  d’après des sources de l’OCDE, Direct matin   indique que 32% des décrochages se font au niveau de la seconde. Cela peut donc en effet montrer les dégâts de l’orientation de fin de troisième. Mais si on cumule les sorties avant ce niveau, et donc au cours du collège, on arrive à un chiffre équivalent au précédent : 33% ! Autrement dit, incriminer seulement les procédures de fin de troisième est un peu rapide. C’est sans doute l’ensemble du fonctionnement du collège et des procédures qu’il faut mettre en cause dans ce processus de production du décrochage.

Orientation subie et affectation subie

Pour cet après troisième, l’effet procédures d’orientation est sans doute pertinent, mais pas suffisant pour tenter de comprendre la production du décrochage. L’orientation subie est une chose, mais l’affectation subie est aussi dévastatrice pour la motivation scolaire. Le choix des formations professionnelles par l’élève ou ses parents n’est pas un objet de décision du conseil de classe. Mais, les demandes doivent être hiérarchisées, et plusieurs facteurs sont à prendre en compte : le dossier scolaire (les notes), les motivations de l’élève, ses intérêts ou ce qu’il en connaît, et la répartition géographique et quantitative des formations envisagées. L’application qui gère l’affectation prend en compte pour l’essentiel les notes et la hiérarchisation des demandes (une formation dans un établissement). D’où pas mal de déconvenue pour les élèves.

Mais, même si les élèves se trouvent dans un lycée éloigné, dans une formation non désirée, les probabilités de décrochages varient surtout selon le fonctionnement des établissements et en particulier de la vie scolaire. Une étude dans l’académie de Versailles l’avait montré il y a quelques années. A situation identique pour les élèves, c’est le fait d’avoir une vie scolaire qui signale aux parents immédiatement l’absence de l’élève, qui ne « le lâche pas », qui réduit la tendance à l’absentéisme puis le décrochage. 

L’évaluation de cette expérimentation sera donc sans doute bien difficile à interpréter.

Il y aurait bien d’autres raisons à supprimer les procédures d’orientation

Pour moi, la raison essentielle qui nécessite la suppression des procédures d’orientation, ne tient pas à la lutte contre le décrochage scolaire, ou à la liberté parentale.

 La raison est essentiellement dans la recherche d’une réelle modification du fonctionnement de notre système scolaire.

La réduction de la fonction sélective est nécessaire pour envisager un changement pédagogique au collège permettant d’atteindre réellement l’objectif de l’acquisition par tous d’un socle commun, et cela quel que soit sa définition ou son contenu.

Cela suppose alors une réorganisation de la deuxième partie de notre secondaire, qui devra, non pas assumer la fonction sélective, mais permettre la différenciation des choix de formation.

Bernard Desclaux

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