PRomotion des Initiatives Sociales en Milieux Educatifs

Instaurés en 1975, les enseignements de langues et cultures d’origine (ELCO) sont critiqués depuis les années 1990 et soupçonnés d’être des foyers de « communautarisme », sur la foi d’accusations réitérées mais jusqu’à présent faiblement étayées

C’est sous un angle polémique que les enseignements des langues et cultures d’origine (ELCO) sont de retour dans l’actualité. Premier acte : Le Journal du dimanche du 1er mars fait état d’un « rapport confidentiel » remis au premier ministre au second semestre 2013 et issu du Haut Conseil à l’intégration (HCI), une instance pourtant dissoute depuis le 24 décembre 2012. Sa « conclusion » : il faut « reprendre en main » ces enseignements dont certains cours s’apparenteraient à des « catéchismes islamiques ». Dans le contexte de l’« après-Charlie », la formule pèse. Deuxième acte : un parlementaire, Bruno Le Maire (UMP), pose une question au gouvernement sur le même thème, désormais hissé au niveau politique.
Les ELCO sont dispensés, quelques heures par semaine, dans les établissements scolaires aux élèves dont l’un des deux parents au moins est né dans le pays d’origine. L’enseignant, placé sous l’autorité de l’inspecteur d’académie, est un ressortissant du pays d’origine, choisi et rémunéré par son ambassade. Selon les chiffres du ministère de l’éducation, les ELCO étaient suivis par 92 461 élèves en 2012 – 2013, dont 86 947 dans le primaire et 5 514 dans le secondaire. Dans le primaire, les plus gros effectifs sont dans les cours de langue arabe (59 772) et turque (16 916), également les plus fréquentés dans le second degré. C’est en 1975 que la France instaure les ELCO, l’objectif étant de faciliter la réinsertion des familles dans la perspective d’un retour au pays. Les premiers accords sont conclus avec l’Italie et l’Espagne en 1973, le Portugal en 1977, la Yougoslavie en 1978. Suivent ceux signés avec l’Algérie en 1981, le Maroc en 1983 et la Tunisie en 1987, précisant que ces enseignements « doivent être assurés dans le respect des principes généraux de l’éducation nationale française ». Dès 1989, pourtant, le soupçon de prosélytisme religieux, « réel ou supposé », comme le dit un article du Monde, apparaît, visant l’enseignement de l’arabe. Ce soupçon, alors relayé par le syndicalisme enseignant majoritaire, ne sera jamais présenté comme portant sur une réalité massive. Un rapport de l’inspection générale de l’éducation nationale de 2006 critique plutôt la faiblesse pédagogique des cours observés, soulignant que « contrairement aux craintes souvent entendues », ils « ne font pas de place aux contenus religieux ». Tout au plus, les inspecteurs admettent-ils des « maladresses » de certains maîtres. Dans leurs conclusions, ils proposent de « fondre progressivement ces enseignements dans le dispositif des langues vivantes dans le premier degré, en renforçant la coopération avec les pays partenaires (…) et de le supprimer dans le second degré en les faisant assurer par des professeurs français issus des concours ». En revanche, le HCI, dès son premier rapport annuel en 1991, préconise la suppression des ELCO au nom du refus du « communautarisme ». Néanmoins, l’une de ses phrases les plus dures à ce sujet date d’un rapport de 2010, nullement confidentiel : « Certains interlocuteurs craignent même que certains ELCO deviennent des catéchismes islamiques. » La même formule resurgit aujourd’hui, dans un contexte où d’autres voix ne manqueront pas de signaler que bannir la langue arabe des établissements scolaires revient à booster son enseignement dans les mosquées et par les associations, par définition moins laïques et moins contrôlées que l’éducation nationale.

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