CLASSE : Ce mot fait partie du vocabulaire de l’école et incarne le fait collectif. Il s’agit d’enfants qui ont le même âge, et, dans de très nombreuses cultures, des garçons ou des filles séparément. L’idée d’une école mixte est relativement récente. Elle germe au XIXe siècle et se réalise dans le second XXe siècle. Comme le mot l’indique, il y a une classification des personnes que vise l’enseignement. Curieusement, en français, la classe se limite à l’enseignement de l’école et est absente de l’enseignement universitaire.
«À l’évidence, la classe fonctionne comme un milieu de vie inséré dans un certain contexte social dont il reprend implicitement les représentations, les règles et les normes…
Rien d’étonnant donc si les interactions qui prennent place dans le déroulement quotidien de la classe apparaissent fortement marquées par le sexe de l’élève ». M. Duru-Bellat, 2004.
Au Moyen âge régnait une étrange confusion, car plusieurs maîtres officiaient en même temps devant des élèves très différents par l’âge et le niveau, donc réunis de façon aussi arbitraire que provisoire. La rupture avec ces usages a été prononcée sur la base d’une réalité nouvelle: la classe. Au début du XVIe siècle, il s’agit d’une division qu’on appelle et lectio », puis le mot « classe» apparaît effectivement.
P.Ariès, 1960, dans L’enfant et la vie familiale sous l’Ancien Régime a décrit les traits majeurs de cette évolution. La classe repose sur un programme de connaissances, chaque classe est conduite par un maître qui exerce seul dans son local, et elle est censée correspondre à un âge spécial des écoliers. Ce système pédagogique s’impose d’abord aux XVIe et XVIIe siècles dans les collèges et l’internat, puis au XVIIIe et XIXe siècles dans les écoles élémentaires, à partir des frères des écoles chrétiennes.
C’est alors qu’il se formalise dans un « mode» d’enseignement dit « simultané» où les élèves, réunis dans un groupe homogène, reçoivent en même temps la leçon (alors que dans le mode « individuel » ils viennent tour à tour auprès du maître). La structure de la classe s’est incarnée dans des formes très diverses, dont l’une est apparue en France et en Angleterre au début du XIXe siècle avec renseignement « mutuel », Les écoles mutuelles sont un épisode oublié de la France de la Restauration, due à F.Guizot, ministre de l’Instruction publique, qui les créa en 1816 pour les supprimer en 1833, en dépit de l’efficacité de leur pédagogie, A. Querrien, 2005.
Il s’agit d’un type d’enseignement qui promeut certains écoliers « moniteurs », après les avoir sélectionnés et formés, de telle sorte qu’ils assument la plupart des tâches d’instruction et de discipline. Ainsi un seul maître pouvait se faire aider par une quinzaine de moniteurs, susceptibles d’accueillir entre cent cinquante et deux cents enfants. L’enseignement mutuel n’a pas vécu longtemps, sauf dans quelques écoles. La classe traditionnelle reposait sur l’imitation et la répétition. À l’inverse, la modernité va privilégier la compréhension, et par conséquent elle va substituer, à une didactique de la mémoire, une didactique de l’intelligence et de l’intuition, F.Jacquet-Francillon, 1995, 1999. On voit par là, une évolution récente du système, à l’échelle de l’histoire de l’éducation, la classe à plusieurs niveaux ayant longtemps été la norme. La classe participe aussi de la production par l’école d’une culture scolaire par la socialisation qu’elle propose. La classe est un lieu de communication en même temps qu’une réalité groupale, G.Avanzini, 1975. Ne faudrait-il pas mettre la classe au centre du système ? Comme l’a montré A. Barrère, 2002, les enseignants interprètent l’école à partir de la classe, c’est à partir de là qu’ils vivent les réformes du ministère de l’Éducation nationale. La gestion du groupe-classe permettant d’« enseigner sa matière» est donc un problème central pour l’identité de l’enseignant au travail.
La classe est un espace social qui a fait l’objet de travaux en psychosociologie de l’éducation, par l’étude notamment des interactions maître-élèves et des situations de communication dans la classe, M. Postic, 1971, J. Vial, 1974, etc.
Un certain nombre de travaux en sociologie de l’éducation valident l’hypothèse d’un » effet maître », un « effet classe», un « effet établissement» et un « effet circonscription» dans la réussite scolaire des élèves (Sciences Humaines n° 136, mars 2003). Ces effets de contextes sont potentiellement liés à des effets de territoires.
La taille des classes a une influence majeure sur les conditions d’enseignement et par là sur la réussite scolaire dans les écoles, collèges et lycées. D’après une étude de T. Piketty, économiste, en 2006, et portant sur les écoles primaires, la réduction de la taille des classes a un impact sur les résultats scolaires, quelle qu’en soit l’ampleur, et ce d’autant plus que les élèves concernés sont issus de milieux défavorisés. La politique des ZEP réduirait donc les inégalités scolaires. Si l’on raisonne à budget constant, une réduction de la taille des classes dans les établissements défavorisés aurait un effet sensible sur les résultats, tandis qu’une légère augmentation des effectifs dans les autres écoles ne les pénaliserait pas. Mais le succès des CP dédoublés par exemple, dépend aussi d’un changement de pratiques pédagogiques (travail individualisé).
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