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« Pour Mathieu Hanotin, vice-président du conseil général de Seine-St-Denis, les lois de décentralisation changent la nature de l’intervention du conseil général dans le collège, le plongeant dans le quotidien de l’établissement, créant des liens et des idées. Mais « la décentralisation fait peur aux acteurs, parce qu’elle fait craindre les inégalités ». S’avouant « d’origine jacobine », M. Hanotin reconnaît avoir lui-même évolué en mesurant les avantages de la proximité, permettant plus de réactivité, pour peu que la volonté soit partagée par tous les acteurs, et non la conséquence de désengagements successifs de l’action publique. « Les organisations ne sont pas bonnes ou mauvaises par nature : sans politique et pacte de confiance, ça ne peut pas marcher ».
Il cite en exemple le dispositif ACTE, « accueil des collégiens temporairement exclus », qui a permis de travailler la difficile question des milliers d’exclus en cherchant une réponse territoriale, avec un partenariat fort entre l’Education nationale et de nombreux acteurs, chacun ayant son expertise pour encadrer les jeunes exclus. « Nous avons constaté des réussites supérieures à 90%, avec des résultats variables selon les communes, surtout quand les collaborations entre acteurs étaient fragiles. Plus on arrive à travailler sur le retour en classe, plus on est efficace dans la lutte contre le décrochage. Evidemment, nous demandons que l’Education Nationale mette davantage de ressources pour y contribuer ».
Dans un autre domaine, le programme « culture – arts au collège » permet de mettre à disposition des collèges des heures d’intervenants spécialisés ou de financer la participation de tous aux voyages organisés dans l’établissement, en partenariat avec des entreprises, mais tout en assurant la garantie du service public.
« Le rôle éducatif des collectivités locales doit être inscrit dans la loi pour stabiliser les politiques et éviter d’être mis à genoux en abandonnant certains pans des politiques publiques ».
Patrick Braouezec, député et président de Plaine St Denis, reprend la balle au bond : « si l’argent public est rare, je préférerais qu’on taxe les entreprises pour assurer les moyens de service public. Parler de l’école et du territoire, c’est d’abord parler du territoire national », provoque-t-il, évoquant la longue liste des abandons de l’état, tant sur les moyens que sur les contenus de formation des élèves et des enseignants. « Aujourd’hui, les inégalités se creusent, et les déterminismes sociaux augmentent. Les valeurs prônées par l’école n’ont jamais été aussi loin des valeurs prônées par les médias »… Pour refonder un projet national, le député demande un débat de société « qui concerne tous les français ». Même dans les commune populaires, les habitants mettent en avant la question de l’éducation. « Les parents attendent beaucoup de l’école. Plus les difficultés sociales sont grandes, plus le partenariat éducation nationale-territoires doit être fort pour améliorer le climat scolaire et faire baisser la violence ». Sortant définitivement de la langue de bois, il demande d’oser différencier les moyens, être moins rigides sur les affectations dans les zones difficiles pour développer des projets pédagogiques dans lesquels les enseignants s’investissent… « Moyens différenciés ne signifie pas programmes spécifiques : mêmes exigences, partout sur le territoire…
Concluant la table-ronde, Philippe Joutard invite à mettre en œuvre ce à quoi il appelle depuis dix ans : des structures associant école et collège. « Pour éviter les ruptures qui font que des élèves qui ne s’en tirent pas mal au CM2 s’effondrent en 6e »… Sous la tutelle de quelle collectivité ? « assurément le département ». Avant de conclure par une ode à la modernité : « Le fossé s’agrandit de plus en plus entre les élèves et le monde scolaire, qui ne s’adapte pas aux nouvelles technologiques et à la révolution numérique ».