Les conséquences humaines et économiques liées au décrochage scolaire interpellent tant les acteurs scolaires et politiques que les chercheurs. Aussi, le Laboratoire sur l’accrochage scolaire et les alliances éducatives (Lasalé) et la HEP Vaud convient les intervenants de l’école et de la formation professionnelle ainsi que les chercheurs à présenter leurs réflexions lors du 3e colloque international du LASALÉ qui se tiendra à la HEP du 6 au 8 juillet 2015.
Malgré l’abondance de travaux, l’identification du phénomène du décrochage scolaire demeure une question vive et une définition univoque du concept de décrochage scolaire semble impossible, tant la complexité du phénomène est grande et sa variété importante. Si l’approche situationniste du décrochage visant à la comptabilisation du nombre de jeunes sortis prématurément et sans qualification du système éducatif renvoie à des indicateurs variables selon les régions, les chercheurs s’accordent par contre sur le caractère processuel et multidimensionnel de ce phénomène (Bernard, 2001).
La nécessité d’une approche écologique et systémique
En effet, tant les facteurs personnels et familiaux que sociaux et scolaires jouent un rôle important dans le processus de décrochage. Ce sont toutefois les facteurs scolaires qui figurent parmi les meilleurs prédicteurs et qui demeurent un levier d’action important pour les professionnels de l’école (Blaya, 2010; Fortin, Marcotte, Diallo, Potvin, & Royer, 2012; Janosz, 2000). De fait, les chercheurs relèvent la nécessité d’une approche écologique et systémique du décrochage scolaire traduite par la mise en œuvre d’une approche différentielle qui réponde le plus adéquatement possible à la diversité des besoins des élèves décrochés ou à risque de décrochage (Fortin & Lessard, 2013; Janosz, 2000; Potvin, 2012).
Des réponses structurelles et pédagogiques sous forme de dispositifs d’accrochage alternatifs
En réponse à la relative inadéquation des structures scolaires démontrée par de nombreux travaux d’envergure internationale (Blaya, 2010), des dispositifs d’accrochage alternatifs à l’école régulière sont proposés par les instances politiques, les administrations en charge de la formation scolaire ou professionnelle et les équipes éducatives dans le but de favoriser la réussite des élèves en situation ou à risque de décrochage. L’évaluation de ces dispositifs donnant lieu à des résultats divers alliant l’efficacité à l’inefficacité, il s’avère essentiel de connaître plus précisément les forces et les faiblesses des dispositifs et leur impact sur la réussite éducative des élèves.
Prescriptions nationales, offres au niveau régional ou de l’établissement ou encore environnements d’apprentissage-enseignement ou éducatifs au sein de la classe, le terme polysémique de dispositif recouvre différents niveaux écosystémiques. Ces dispositifs d’accrochage peuvent ainsi prendre des formes diverses selon les orientations/contexte politiques, les acteurs ciblés et l’espace dans lequel ils s’inscrivent, passant par exemple, du soutien individuel à celui adressé à un groupe d’élèves, d’une prestation offerte en classe ou hors classe à celle proposée à l’extérieur de l’établissement dans des structures connexes au système scolaire ou de formation (Bruno, Méard & Walter, 2013; Tièche Christinat & Gilles, 2013).
Dans ce contexte, la dimension de continuité éducative impliquant des liens entre les différentes sphères dans lesquelles évolue l’élève demeure centrale. Elle nécessite d’une part la prise en considération de différentes sphères (i.e. philosophiques, curriculaires, développementales, organisationnelles, administratives) et d’autre part sollicite les temporalités entre expériences antérieures, actuelles et futures. Les transitions y sont centrales, impliquant des processus de changement, de reconstruction, de ruptures ou de crises parfois, tout en respectant un principe de cohérence des actions à mener.
Une cohérence accrue par les alliances éducatives
L’idée de continuité éducative implique des acteurs mobilisés dans des alliances éducatives à même de répondre aux défis du décrochage scolaire, à l’image du proverbe africain « il faut tout un village pour élever un enfant ». Ces alliances éducatives sont fonction des lieux et des ressources personnelles de chaque professionnel, aussi bien que d’une organisation régionale et d’une volonté politique concertées (Lessard, Poirier, & Fortin, 2012; Perron & Veillette, 2012; Avery, 2012). Représentations partagées et mutualisées autour d’un projet commun, initiatives prises à différents niveaux, logiques affinitaires ou encore logiques professionnelles sont autant de dimensions qui caractérisent les alliances éducatives et qui entrent en jeu dans les actions convergentes et concertées des différents partenaires investis dans des dispositifs structurels ou pédagogiques alternatifs en vue de faire évoluer la situation et de favoriser la continuité éducative (Gilles, Potvin & Tièche Christinat, 2012).
Quatre questions pour prolonger la réflexion
Les dispositifs d’accrochage alternatifs et les alliances éducatives seront au cœur même de ce colloque. Les communications auront pour mission de prolonger la réflexion autour des questions suivantes.
1. Quels sont les facteurs qui favorisent les continuités éducatives, pédagogiques et didactiques au sein d’établissement proposant des dispositifs alternatifs favorisant l’accrochage scolaire?
1a. Les dispositifs alternatifs internes aux établissements scolaires ou de formation: mesures individuelles, groupes de besoins ponctuels, classe, …
1b. Les dispositifs alternatifs externes aux établissements scolaires ou de formation: programmes particuliers, écoles spécialisées,…
2. En quoi et comment les alliances éducatives établies soutiennent-elles la continuité du parcours de formation des élèves décrocheurs ou à risque de décrocher?
2a. Les alliances éducatives entre professionnels, élève/jeune et famille à l’interne au sein des dispositifs
2b. Les alliances éducatives entre différents services (protection de la jeunesse, justice, santé,…)
2c. Les alliances éducatives avec des communautés éducatives non formelles (bibliothèque, écoles liées à des communautés étrangères, …)
3. Quelles évaluations des dispositifs d’accrochage scolaire rendent compte des forces et faiblesses de ces derniers?
3a. Evaluation au niveau de l’activité des professionnels
3b. Evaluation des dispositifs alternatifs
3c. Précautions méthodologiques
4. Des dispositifs alternatifs d’accrochage: échanges autour des différentes pratiques de terrain par les professionnels collaborant au sein de dispositifs d’accrochage.