In Maire de France – juin 2014 :
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Le long chemin de la mise en œuvre des nouveaux rythmes scolaires a rebondi sur un nouveau décret, qui permet aux communes d’expérimenter de nouvelles organisations. Explications.
En guise « d’assouplissements » promis par le Premier ministre, ce sont donc des « expérimentations » qui ont été proposées aux maires pour mieux adapter la mise en place des nouveaux rythmes scolaires dans leurs écoles municipales à la rentrée prochaine. Un décret du 7 mai 2014 encadre ces expérimentations. Il ne remplace pas celui de janvier 2013 mais il «le complète», s’est efforcé de répéter le ministre Benoît Hamon, faisant le tour des médias pour le service après-vente de ce texte (1).
De quoi s’agit-il ? De la possibilité de regrouper sur une seule après-midi les temps d’activités périscolaires (TAP, les trois heures dites Peillon) à la charge facultative des communes. Ce que le ministre a justifié pour « permettre des économies d’échelle » entre des écoles rurales au sein d’une intercommunalité, « l’une organisant ses activités périscolaires un lundi après-midi, l’autre le mardi, avec les mêmes animateurs ».
L’autre option est de réduire le nombre d’heures d’école par semaine, de les récupérer sur les vacances scolaires et, plus précisément, « sur celles de l’été, afin de ne pas déséquilibrer l’alternance entre périodes travaillées et congés durant l’année scolaire », précise la circulaire qui commente ce décret (2).
Le cœur de la réforme – cinq matinées (« afin de permettre les apprentissages fondamentaux dans les meilleures conditions ») et pas plus de 24 heures hebdomadaires d’enseignement – ne bouge pas, malgré une entorse à la journée qui pourra atteindre 6 heures quand elle devait être inférieure à 5 h 30, ce qui a valu au ministre des critiques de la Fédération des conseils de parents d’élèves.
Qui est concerné ?
A priori, toutes les écoles d’une commune ou d’une intercommunalité, même celles, largement majoritaires, qui ont déjà finalisé leur projet d’organisation (94 % d’entre elles selon le ministère), mais qui auraient souhaité le modifier en vertu de ce décret. Pour les 6 % de communes somme toute visées par ce décret car jugées « en difficulté » par le ministère, soit l’expérimentation a pu répondre à leur problème, soit elles n’ont pas davantage trouvé de consensus. Dans ce cas, c’est bien le DASEN qui tranchera l’organisation de la semaine scolaire pour la rentrée prochaine, comme le prévoit le décret de 2013.
Le problème c’est que les maires devaient tout boucler avant le 6 juin, non sans avoir recueilli entretemps l’accord du ou d’une majorité de conseils d’école…, à moins que d’ici à la parution du magazine, un report ait été accordé, les rebondissements dans ce dossier nous ayant habitué à ne rien présager. D’autant que, pour l’AMF, ce calendrier comme ces assouplissements ne suffisent pas face aux difficultés rencontrées par les maires.
Durcissant le ton, elle a demandé par communiqué le 22 mai que « la plus grande liberté » soit laissée aux communes « pour les organiser selon des modalités qu’elles définissent localement, en fonction des réalités du terrain », ainsi qu’un délai supplémentaire.
Un financement prolongé mais…
Les perspectives financières ne sont pas plus satisfaisantes pour les maires. C’était l’un des points essentiels de la rencontre entre Jacques Pélissard, président de l’AMF, et André Laignel, son premier vice-président délégué, avec le ministre le 30 avril dernier, suivie d’une autre avec le Premier ministre.
« Lorsque le décret de 2013 sur la mise en œuvre de la réforme est sorti, nous étions dans une situation de gel des dotations. Or, aujourd’hui, nous sommes dans une situation d’amputation de nos dotations », a expliqué Jacques Pélissard à Maire Info. Il est donc, selon lui, « d’autant plus important que ce fonds soit pérennisé ». Pour trancher et sans doute désamorcer le regain de protestations au lendemain des élections municipales, le gouvernement a annoncé que le fonds d’amorçage sera « poursuivi » pour la rentrée scolaire suivante, de 2015-2016. Cela offre un peu plus de visibilité aux maires, mais cela reste une vision encore trouble car, selon Benoît Hamon, le montant de ce fonds sera calibré « pour répondre plus particulièrement aux besoins des communes les plus en difficulté ».
Rien ne dit donc qu’il continuera à servir toutes les communes, tandis qu’aucune précision n’était encore apportée sur les critères définissant ces « difficultés ».
Pour l’AMF, le compte n’y est toujours pas. Dans son communiqué du 22 mai suite à la réunion du bureau de l’AMF, elle dénonce « l’insuffisance » des aides financières de l’État « alors que le coût annuel de la réforme a été estimé à environ un milliard d’euros par l’AMF et par la mission d’information sur les rythmes scolaires du Sénat ».
Dans son projet de rapport final, la mission sénatoriale demandait d’ailleurs la création d’une « dotation de compensation de la réforme des rythmes scolaires ». Ce rapport ayant été rejeté suite au vote défavorable des sénateurs UMP et de l’abstention des sénateurs communistes, il n’a donc pas été publié et ne peut faire office de proposition formelle. Il s’ajoute en revanche aux constats que le financement de la réforme est – outre les difficultés de locaux et de recrutement – le problème majeur des maires, ce que confirment les très nombreuses réponses à la consultation lancée par l’AMF en mai auprès de ses adhérents ayant une école.
Au terme de six mois de travaux, la mission du Sénat n’a pas réussi à mieux cerner le coût de cette réforme, ses travaux corroborent toutefois « l’hypothèse d’un surcoût médian de l’ordre de 168 euros par enfant et par an ». Ils témoignent également, s’il en était encore besoin, de la complexité des dossiers pour obtenir les aides de la CNAF, face auxquelles certains maires capitulent. L’AMF insiste elle pour que soient levées les rigidités faisant obstacle aux projets d’organisation des maires tant pour les maternelles qu’au regard de la liste des personnels reconnus comme qualifiés par Jeunesse et sports et la Cnaf et pour que soient « clarifiées les règles d’acceptation par les Dasen des projets d’activités périscolaires regroupées sur une après-midi ».
Car, sur ce point, les voix sont multiples et, pour l’heure, les musiques encore discordantes.
Emmanuelle STROESSE
Réponse des maires fortement recommandée !
Mi-mai, la CNAF et l’AMF ont lancé une enquête auprès des 24 000 communes concernées par la réforme des rythmes scolaires. Cette enquête doit donner les « bases objectives » à la CNAF pour évaluer l’impact financier de son accompagnement à la mise en œuvre des activités périscolaires. Au lancement de la réforme, la CNAF a prévu de consacrer 250 millions d’euros par an pour accompagner les communes. Pour son directeur général, Daniel Lenoir, « l’objectif est de rester dans cette enveloppe », sachant que l’hypothèse de calcul portait sur le fait que « 80 % des enfants d’une classe d’âge fréquenteraient les trois heures en accueil de loisirs sans hébergement ».
Le résultat de l’enquête doit cerner plus finement les financements et, au regard des estimations, les conditions qu’elle continuera – ou pas – d’assurer aux communes (taux d’encadrement). Décision en juillet. Une date proche de la rentrée pour nombre de communes qui n’attendront sans doute pas ces arbitrages pour s’organiser, mais qui influencera sans conteste sur le coût qu’elles auront à supporter.