PRomotion des Initiatives Sociales en Milieux Educatifs

 Journée d’étude PRISME 12 février : Intervention Jean-Louis AUDUC

Je remercie PRISME de m’avoir invité à cette table ronde pour pouvoir partager quelques idées avec vous. Pour se faire, je vais partir d’un certain nombre de mots souvent employés à propos du PEDT et essayer de réfléchir aux questions qu’ils posent :

Co-construction : C’est évidemment extrêmement important de faire avec et non pas pour . Mais, il faut également réfléchir au cahier des charges soumis aux différents acteurs. Est-ce que par exemple, l’impérieuse nécessité de temps pour que les familles, notamment les plus éloignées de son fonctionnement, puissent s’approprier l’école, a été pris en compte dans l’organisation ? Pourquoi pas dans le mois, un travail trois mercredis matins sur quatre et un samedi sur quatre pour permettre aux familles de rencontrer enseignants, animateurs, associations, etc… ?

Enfants : Le mot piège par excellence. La construction de la personne , de son identité passe par différentes phases qui sont à la fois continuité et ruptures. Aussi voire plus grave que l’indifférenciation des sexes, est l’indifférenciation des âges ! C’est une grave erreur de traiter l’enfant de 3 ans comme celui de 11 ans, comme celui de 11 ans et celui de 15/16 ans . ils n’ont pas les mêmes rythmes ; ils n’ont pas le même rapport à leurs identités. Les traiter de manière indifférenciés, c’est favoriser les difficultés d’apprentissage, notamment chez les garçons. Il faudrait comme dans les pays nordiques, avoir un rite social collectif de sortie de l’enfance vers 10/11 ans et cesser d’employer le mot d’enfant ( d’infans : irresponsable ) à partir de ce moment. Notre message est contradictoire . Nous prônons des villes « éducatives » et nous laissons la police et la justice être les seules structures porteuses de rites avec le fait qu’à compter de son 13e anniversaire, tout jeune sait qu’il est pénalement responsable, c’est-à-dire qu’on lui reconnaît une part de responsabilité aussi importante que ses parents !!! Cet abandon de la part des communes comme de l’école, des rites de progression vers l’âge adulte est l’antithèse d’un rôle éducatif.

Incitation/obligation : Là encore, deux mots importants. Peut-on construire une véritable égalité, pousser le plus loin possible le potentiel de chaque jeune, en oubliant la question de l’aliénation, des habitus sociaux…. Inciter, c’est ne pas penser qu’il peut y avoir des obstacles culturels, sociaux qui vont intervenir. Il ne suffit pas de rendre gratuit un musée pour que toute la population s’y précipite…. Réfléchissons aussi à ce qui est arrivé ces dernières années. La loi de 1975 sur le handicap était incitative. Celle de 2005 rendait l’accueil des handicapés obligatoire dans l’école. Au-delà des difficultés, on a vu les changements de comportement. Si l’obligation des activités péri-scolaires n’est pas décidée par la commune et les conseils d’écoles, on verra que ce sont les familles les plus éloignées de l’école qui en seront absentes. L’obligation pose inévitablement la question de la gratuité. Comment l’Etat et ses représentants doivent-il s réagir quand une collectivité territoriale décide de rendre payantes les activités périscolaires dans le cadre de la refonte des rythmes scolaires ?

Egalité : Donner le libre choix à des jeunes ou à leurs familles, concernant les activités proposées, notamment dans le cadre de la refonte des rythmes scolaires peut ne pas être du tout égalitaire . Compte tenu des habitus sociaux, si je propose le choix entre un atelier hip-hop et un atelier autour des collections du musée local, je recrée de la discrimination et des inégalités sociales et culturelles et je ne place pas tous les jeunes concernés dans une situation d’élargissement de leur horizon culturel. Comment réguler cela ? Ne faut-il pas se poser la question d’un parcours obligatoire de différentes activités tout au long de la scolarité de l’école élémentaire pour permettre à chacun de pouvoir développer au maximum ses potentialités en s’initiant à tous les possibles ?

Valorisation : Il faut éviter, notamment comme l’ont montré les études concernant les familles du quart monde, de considérer ses activités comme peu importantes. Car, ses familles ne prennent souvent au sérieux que si est évalué. Pourquoi ne pas mettre en place un passeport accompagnant les activités péri-scolaires menées durant la scolarité à l’école élémentaire qui serait tamponné lors de la réussite de ces activités et pourrait donner lieu à des diplômes, certificats remis par la commune.

Education inclusive : Un certain nombre d’activités artistiques ( musique, arts plastiques, théâtrales), sportives , notamment la natation ou l’équitation sont une excellente occasion de valoriser les compétences de jeunes en situation de handicap mental lourd. Pensons au travail réalisé avec ces jeunes au travers d’orchestres, de représentations théâtrales par Howard Buten ou dans le cadre d’activités circassiennes par Annie Fratellini. Pensons à bien inscrire cette dimension inclusive dans les cahiers des charges proposés aux différentes associations dans le cadre des PEDT.

Valeurs : Ne faut-il pas un cadre national des valeurs à promouvoir dans de telles activités afin d’éviter un grand écart potentiel entre les valeurs prônées par l’école ( même si elles ne sont pas toujours mises en pratiques) et celles mises en avant par certaines associations intervenantes concernant la laïcité, l’égalité hommes-femmes, le respect de l’autre, le refus du racisme,…. Il suffit d’être sur certains terrains de sport le samedi ou le dimanche lors de matches impliquant des jeunes pour saisir ce problème…

Territoire : Qu’est ce qu’un territoire ? Une commune, un agrégat de communes, un quartier de grande ville ou un espace plus large ? Il faut y réfléchir, ne serait-ce que pour combattre, ce qu’on voit surgir ici ou là, en terme de « préférence communale » pour l’accès à certains équipements culturels excluant des jeunes des quartiers limitrophes appartenant à une autre commune.

Gouvernance : Le problème de la gouvernance de projets cohérents impliquant différents partenaires est une question centrale. Quel « chef d’orchestre » pour mettre en musique des postures professionnelles diverses au service des jeunes ? Pourquoi ne pas réfléchir à un conseil territorial composé des différents partenaires associés et élisant son président ? Des communes pratiquent ainsi et par exemple, ont élu comme pilote légitimé aussi bien par la commune que par les différents services déconcentrés de l’Etat , une personnalité indépendante active dans l’éducation populaire.

Evaluation : Tout PEDT doit prévoir , dès sa mise en œuvre ses procédures d’évaluation à la fois sur le court terme ( un an) que sur le moyen terme ( plusieurs années) . La réflexion sur les indicateurs pertinents doit être partie prenante de la discussion sur le PEDT . Pensons, par exemple, pour des indicateurs à moyen terme : Absentéisme en classe de 6eme et de 5eme, fréquentation des médiathèques municipales et des CDI, diminution des écarts de résultats scolaires garçons-filles dans le domaine de la lecture qui sont parmi les plus élevés de l’OCDE……….

Print Friendly
Categories: Expressions prismées

Répondre