« Pour changer l’école, les lois ne suffisent pas, il faut agir sur les habitudes. » Vincent Peillon :
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EXTRAIT
"Vous mettez beaucoup en avant, Monsieur le ministre, la question des rythmes scolaires…
V.P. : La semaine de quatre jours, instituée sous Xavier Darcos en 2008, a été une très mauvaise décision. Quelle violence à l’égard des enfants ! Il ne reste plus annuellement que 144 jours de classe, alors que la moyenne européenne est de 180 jours. Cela signifie 144 jours trop chargés contre 221 jours sans école ! Nous devons changer cela. Mais il y a d’autres priorités. Par exemple, la formation des enseignants. Depuis 2008, les jeunes qui ont réussi leurs concours sont projetés face aux élèves sans qu’on leur ait jamais appris leur métier — y compris apprendre à un enfant de 6 ans à se saisir de la lecture. Comment s’étonner alors qu’on produise de l’échec scolaire ? Il faut vraiment accomplir une révolution copernicienne, commencer par le commencement. Cette mobilisation générale autour du primaire, notre priorité absolue, prendra du temps. D’autres chantiers majeurs — évaluation des élèves, éducation prioritaire, usages du numérique — avanceront en parallèle.
J.-P.T. : Je partage cet état d’esprit. Mais, si on veut poser le problème dans toute son ampleur, il faut se demander : cet échec, comment le traite-t-on ? Deux conceptions politiques s’opposent : la première, c’est celle du Socle commun de connaissances et de compétences, créé en 2005 par la loi Fillon. Elle consiste à dire : ces enfants en grande difficulté de compréhension de l’écrit se retrouvent démunis sur le marché du travail — quatre fois plus de chômeurs chez les non-diplômés —, on ne peut pas se satisfaire de cette situation. On essaie donc de limiter les dégâts, de transmettre à ces jeunes un minimum culturel, on forme chez eux des « compétences » qui leur permettront de faire face aux situations de la vie professionnelle et familiale… Cette notion de « socle commun » n’a donc de sens que parce que des enfants sortent du primaire en grande difficulté ! Comment s’en satisfaire, alors que les études montrent que tous les enfants, à partir du moment où ils ont acquis le langage, disposent des moyens intellectuels nécessaires pour entrer dans la culture écrite, et s’engager dans un processus qui débouche sur un bac général, que seuls réussissent aujourd’hui 35 % des jeunes"