In Slate – le 7 mai 2013 :
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Auteurs de l’étude A New International Database on Education Quality: 1965-2010, les chercheurs Nadir Altinok, Claude Diebolt et Jean-Luc Demeulemeester ont récolté des données sur la qualité des systèmes éducatifs de plus de 100 pays entre 1965 et 2010. Les données en question ont servi à la création d’un indice qui peut désormais mesurer les capacités scolaires par groupes: zone rurale ou urbaine, fille ou garçon, à l’échelle régionale ou nationale…
Grâce à cette base, il est donc possible de comparer entre elles les performances d’enseignement d’un plus large panel de pays. Le but final est annoncé dès l’introduction: à terme, il s’agit d’«analyser la solidité du lien entre la qualité de l’enseignement et la performance économique d’un pays».
Parmi les données compilées pour cette recherche:
- les compétences des élèves du primaire et du secondaire en mathématiques, sciences et lecture à plusieurs moments.
- les résultats de plusieurs études sur le niveau scolaire à travers le monde: les différents travaux de Robert J. Barro et Jong-Wha Lee, celle de Eric A. Hanushek et Dennis D. Kimko, et celle de Nadir Altinok et Hatidje Murseli.
- plusieurs évaluations: International Student Achievement Tests (ISATs) et National Assessment of Educational Progress (NAEP).
Voici quels sont les résultats de la France entre 1964 et 2010 par rapport aux autres pays de sa catégorie (pays occidentaux d’Amérique et d’Europe):
- un niveau moyen en primaire au-dessus de la moyenne.
- un niveau moyen en secondaire au-dessus de la moyenne.
- un score global en baisse de 5% depuis 1980.
- la différence de niveau entre filles et garçons en primaire est sensible en faveur des filles, mais avec un écart inférieur à la moyenne.
- la différence de niveau entre filles et garçons en secondaire est flagrante en faveur des filles, avec un écart largement supérieur à la moyenne.
- la différence de niveau entre milieux rural et urbain en primaire s’exerce en faveur des élèves de milieu rural, ce qui n’est pas la tendance de la catégorie
- la différence de niveau entre milieux rural et urbain en secondaire est radicale, les élèves du milieu urbain réussissant nettement mieux que les élèves du milieu rural, avec un écart bien au-dessus de la moyenne de la catégorie.
Sur la période 1980-2010, la croissance n’a dépassé qu’à cinq reprises le chiffre symbolique de 3% et le chômage a explosé. Faut-il y voir une explication ou une conséquence de la baisse du score éducatif de la France?
Faute de preuves tangibles, certains économiste ont longtemps considéré qu’il n’y avait pas de lien entre éducation et croissance. C’est par exemple le cas de Bill Easterly dans The Elusive Quest for Growth.
Robin Grier, professeur d’économie à l’université d’Oklahoma, explique elle sur son blog que l’absence de lien relevait en fait d’un problème de méthodologie et d’un manque de données. Si l’on voulait comparer les systèmes éducatifs d’un grand nombre de pays aux profils variés, on ne disposait que de quelques indicateurs, et huit ans de scolarité en Guinée-Bissau ne valent pas huit ans de scolarité en Suisse…
Nadir Altinok, Claude Diebolt et Jean-Luc Demeulemeester estiment eux que la qualité de l’enseignement d’un pays influence l’économie à deux niveaux: micro, avec le salaire moyen du futur travailleur, et par conséquent, macro, avec le développement économique du pays. Mais on peut supposer aussi que l’influence s’exerce dans l’autre sens.
On peut d’ailleurs d’ores et déjà constater que les pays considérés par cette étude comme les plus dynamiques en matière de qualité d’éducation sont également ceux qui maintiennent une croissance élevée, à l’instar de Singapour.