In Les Echos.fr – le 07 mai 2014 :
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Que vous inspirent les écarts de rémunération entre enseignants ?
On ne peut plus parler génériquement des enseignants, tant les différences entre eux sont sensibles, notamment entre professeurs des écoles et certifiés, alors même qu’ils sont sur la même grille salariale. Il y a plus de 5.000 euros d’écart entre les salaires brut moyens des premiers et ceux des seconds. C’est le mythe de l’unification, qu’on avait vantée à l’époque où les professeurs des écoles ont rejoint la grille des certifiés. Et pourtant, les enseignants du premier degré ont la même durée de formation que leurs collègues du second degré. La différence de rémunération devrait être atténuée.
Faut-il, comme le dit la Cour des comptes, mieux payer les professeurs en répartissant différemment la masse salariale ?
La réforme n’est pas facile à faire, en raison des corporatismes. Le salaire des enseignants relève d’une politique plus large. Or la France n’a pas choisi de revaloriser le salaire des enseignants. Quand on vante les 60.000 postes ou la réforme des rythmes scolaires, cela a un coût qui fait qu’ensuite, il n’y a plus de marge pour augmenter les enseignants.
Un choix fait à tort ?
Je le pense, oui. Surtout quand on ajoute à cela le gel du point d’indice des fonctionnaires. Quand on veut faire passer des réformes, on a besoin des enseignants. La profession doit aussi être revalorisée financièrement pour une meilleure motivation des enseignants. Et pour attirer les gens les plus compétents. Regardez les derniers résultats des concours d’enseignants, ils ne font pas le plein…
Fallait-il renoncer aux 60.000 postes ?
La question n’est pas : les 60.000 postes ou rien. Certains de ces postes sont nécessaires, ils sont liés à la hausse démographique. Mais, sur les 60.000, tous ne sont pas indispensables et tous ne vont pas servir à améliorer la qualité de l’école. Par exemple, les postes d’enseignants supplémentaires dans les écoles (le « plus de maîtres que de classes »). Ils peuvent être bien utilisés, mais il n’est pas certain qu’ils le soient partout. Je ne suis donc pas sûr que la stratégie choisie – sur les 60.000 postes ou sur la réforme des rythmes scolaires – soit la bonne. Au regard du coût de la réforme des rythmes et de ce qu’elle va apporter, il aurait été préférable d’imaginer, par exemple, un treizième mois pour les enseignants du premier degré. La réforme ne changera pas grand-chose, surtout avec les assouplissements du décret Hamon et la possibilité de libérer une après-midi pour les activités périscolaires. Mieux vaudrait s’intéresser aux méthodes d’apprentissage de la lecture et donner plus de temps aux élèves les plus faibles. C’est illusoire de croire que la réforme des rythmes pourra changer les choses d’un coup de baguette magique.
Faut-il d’autres rééquilibrages ?
La gestion des carrières devrait être plus souple. Le déroulement de la carrière laisse peu de place à d’autres facteurs que l’ancienneté. Les établissements ont très peu de liberté, ils ne peuvent pas donner de primes aux enseignants. Sans avoir des primes au mérite – qui ne fonctionneraient pas -, il faudrait par exemple récompenser davantage les enseignants chevronnés qui s’impliquent dans la formation des stagiaires.