PRomotion des Initiatives Sociales en Milieux Educatifs

In Association des Maires de France :

Accéder au site source de notre article.


Le bureau de l’AMF, réuni le 12 décembre 2012, a fait des premières observations et propositions sur les éléments actuellement connus de l’avant-projet de loi de décentralisation, à partir du document de travail transmis le 10 décembre 2012 par le cabinet de la ministre de la Décentralisation, qui aborde les objectifs et les conditions d’un approfondissement de la décentralisation et de la réforme de l’action publique. L’AMF prendra officiellement position quand le projet de loi arrêté par le gouvernement lui sera transmis.
Ce texte confie de nouvelles compétences aux régions et aux intercommunalités et consolide le fait métropolitain.
En revanche, il laisse peu de place aux communes et aux villes, petites ou moyennes, au risque d’accentuer la fracture territoriale subie par l’espace rural et périurbain.

A – Refondation du dialogue entre l’Etat et les collectivités territoriales

1 – Le Haut conseil des territoires

Pour l’AMF, le Haut conseil des territoires, compétent pour examiner tous projets de loi concernant les collectivités, doit pouvoir être saisi par les représentants des collectivités et pas seulement par le Premier ministre.
Le Haut conseil des territoires doit en outre avoir pour mission d’examiner les politiques, nationales ou européennes, ayant un impact sur les collectivités.
Il appartient à l’AMF de désigner, dans le respect scrupuleux des équilibres démographiques, géographiques et politiques, les représentants des communes et des intercommunalités siégeant en formation plénière (à défaut, les désignations devraient alors se faire dans le cadre d’un scrutin). Le nombre de sièges attribué au bloc communal doit être suffisant pour assurer cette représentation pluraliste. Pour les formations restreintes, l’AMF demande de la souplesse afin que les désignations puissent être effectuées en fonction des sujets à l’ordre du jour (et pas nécessairement au sein de la formation plénière).
L’AMF n’est pas opposée à ce que le Comité des finances locales soit une formation spécialisée du Haut conseil des territoires, à la condition que le rôle, l’autonomie et les prérogatives du CFL soient préservés.

2 – La conférence territoriale de l’action publique (CTAP)

Dès l’instant où elle constitue une instance de dialogue entre l’Etat et les collectivités territoriales (déclinaisons territoriales des stratégies nationales des politiques publiques), la CTAP doit être coprésidée par l’Etat (préfet de région) et un représentant des collectivités territoriales, selon le principe d’une présidence tournante par niveau de collectivité. En revanche, lorsqu’elle n’a pour objet que la coordination des politiques et des compétences entre collectivités territoriales, sa présidence doit être confiée à un représentant des collectivités locales (selon le même principe de présidence tournante), le préfet pouvant jouer le rôle de commissaire du gouvernement tel que prévu par l’avant-projet de loi.
Sa composition doit permettre une représentation équilibrée de l’ensemble des territoires et notamment du bloc communal : tous les maires des communes de 50.000 habitants et plus et des chefs-lieux de département, ainsi que les présidents de communauté d’agglomération (quelle que soit la taille de l’agglomération) et des communautés de communes de 50.000 habitants et plus doivent être membres de droit. L’AMF demande que les associations départementales (AD) représentatives désignent les maires et les présidents de communauté non membres de droit.

B – Modalités d’exercice des compétences des collectivités territoriales

La reconnaissance de collectivités chefs de file chargées par la loi d’organiser l’exercice de compétences entre plusieurs échelons suppose une démarche claire de co-élaboration des politiques publiques. Dans quelle mesure le pacte de gouvernance territoriale pourra-t-il engager les autres collectivités ou EPCI dans la mise en oeuvre des compétences confiées à une collectivité chef de file ? La mise en oeuvre de schémas régionaux ou départementaux pour des compétences partagées devra s’appuyer sur un cadre contractuel avec l’ensemble des collectivités concernées.

C – Maîtrise de l’inflation normative : réforme de la CCEN

L’AMF souhaite le maintien du statut de la CCEN comme formation restreinte du Comité des finances locales. S’il était cependant décidé que certains de ses membres puissent être désignés au-delà du CFL, cette décision devrait bien évidemment s’appliquer à tous les collèges de la CCEN. La CCEN doit être compétente pour évaluer les normes existantes ainsi que les propositions de loi et, à titre obligatoire, les projets de loi ayant un impact sur les collectivités. S’agissant des règlements des fédérations sportives, l’AMF préconise plutôt que la CCEN puisse les examiner lorsqu’ils posent problème au niveau de la CERFRES1 (comme une instance de recours).
L’avis conforme de la CCEN doit être requis pour les nouvelles normes réglementaires issues des textes réglementaires.

D – Approfondissement de la décentralisation / transfert de compétences

A ce stade de l’élaboration du projet de loi, l’AMF est en attente d’éclaircissements sur la nature et les modalités des compétences qui seraient transférées. Elle s’interroge sur le degré d’opposabilité des schémas régionaux introduits par le texte. En matière de transports, elle s’interroge aussi sur la création envisagée d’un syndicat régional de transports et sur la répartition des compétences entre les différentes AOT et ses incidences financières. Elle souhaite également avoir confirmation de la suppression du transfert envisagé de la planification de la gestion des déchets au niveau régional.

Fonds structurels

L’AMF demande que la participation des collectivités infrarégionales à la gouvernance des fonds structurels soit sécurisée : leur représentation doit être garantie par la loi tant dans les instances nationales que régionales. Par ailleurs, si les collectivités sont prêtes à assumer leur responsabilité pour les activités dont elles ont la charge, elles souhaitent que cette responsabilité soit circonscrite à leur champ d’intervention (uniquement sur les fonds ou partie de fonds qu’elles auront à gérer de plein droit) et qu’elle soit proportionnée à leur marge de manoeuvre.
1 CERFRES : Commission d’examen des règlements fédéraux relatifs aux équipements sportifs

PLU Intercommunal

L’AMF demande que la compétence PLU soit examinée dans le cadre du projet de loi à venir sur l’urbanisme et le logement. En effet, ses conséquences non négligeables en matière de droit de l’urbanisme et de l’aménagement (droit de préemption, taxe d’aménagement, instruction des permis de construire…) nécessitent une appréhension globale de la réforme et non une simple approche institutionnelle. Ce transfert de compétence de plein droit concernerait toutes les communautés, quelle que soit leur taille. Si l’échelle intercommunale constitue, la plupart du temps, l’échelle pertinente pour élaborer un PLU, l’AMF considère cependant que la décision d’élaborer un PLUi doit relever des élus concernés. Il est nécessaire en tout état de cause de prévoir les modalités précises de co-élaboration du PLU permettant d’intégrer toutes les communes parties prenantes. Cette co-construction du PLUi par la communauté et les communes membres ou l’approbation du PLUi à une majorité qualifiée (déjà prévue dans un cas précis par la loi Grenelle 2), devrait relever d’une modification du code de l’urbanisme, à insérer dans la future loi annoncée pour 2013 sur l’urbanisme et le logement.
L’AMF est favorable à la généralisation des SCOT prévue à l’horizon 2017. Document de planification stratégique à l’échelle intercommunale ou inter-communautaire, le SCOT a vocation à assurer le maintien des grands équilibres entre les espaces urbains ou à urbaniser et les espaces naturels, agricoles et forestiers. C’est pourquoi il est aussi l’outil de préservation et de gestion du foncier, renforcé par l’obligation introduite dans la loi d’analyser la consommation des espaces naturels, agricoles et forestiers des dernières années et de justifier les objectifs chiffrés de limitation de cette consommation. Le SCOT est donc le document pertinent pour appréhender et anticiper les grands enjeux d’aménagement et de préservation des espaces, qui s’impose aux PLU dans un rapport de compatibilité, voire de conformité sur certains points.

Gestion des milieux aquatiques

Le projet de texte pose une question de fond : faut-il créer une compétence obligatoire en matière de gestion des cours d’eau non domaniaux et privés ? Cela entraînerait une certaine rigidité, peu adaptée aux réalités de terrain, dans l’exercice de la compétence (il ne s’agirait plus d’une habilitation à intervenir mais d’une obligation).
Ce projet écarte de la gestion des cours d’eau les syndicats de rivières pilotés par des élus locaux. Ces structures permettent pourtant une mise en oeuvre opérationnelle des travaux de gestion des cours d’eau au plus près des territoires quand l’établissement de bassin couvre un périmètre conséquent. Enfin les nouvelles impositions prévues par ce texte pour financer la gestion des rivières pèseraient uniquement sur les riverains des cours d’eau alors qu’ils ne seront pas les seuls bénéficiaires de leur entretien et des investissements d’amélioration.

E- Intercommunalité et coopération entre collectivités territoriales

L’AMF n’est pas opposée au transfert de nouvelles compétences aux intercommunalités, comme l’aménagement d’aires d’accueil des gens du voyage ou la prévention de la délinquance.
Elle est réservée sur le transfert obligatoire de la gestion des milieux aquatiques ou de l’assainissement aux communautés. Il y aurait peu d’intérêt à transférer des compétences déjà confiées à des structures intercommunales plus larges (syndicat mixte d’assainissement ou de gestion des cours d’eau). Le transfert de la promotion du tourisme, quant à lui, entraînera celui de la taxe de séjour. Un tel transfert peut également poser des difficultés au regard du statut particulier des stations classées.
Elle prend acte du transfert automatique du pouvoir de police des maires en matière de stationnement et de circulation au président de communauté (compétente en matière de voirie), sous réserve que les maires (et/ou le président) puissent individuellement s’y opposer. Cependant le lien entre le transfert de police et la compétence voirie peut créer des incohérences dans l’exercice de ce pouvoir (en cas de transfert partiel de la voirie par exemple). Il pourrait être proposé d’instituer un mode de coordination entre le président de communauté et les maires (possibilité de définir un règlement de voirie commun).
L’AMF a antérieurement exprimé son avis favorable à la création d’un statut spécifique pour les grandes métropoles de dimension européenne. La création des eurométropoles et des communautés métropolitaines pose toutefois la question du devenir des communautés urbaines. L’AMF demande à avoir des éclaircissements sur ce qui serait prévu par décret (et non par la loi) quant à leur périmètre et à leur fonctionnement (composition de l’assemblée), notamment la place des communes.
Elle rappelle son attachement au principe de gestion de proximité de certains équipements et services communaux, et s’interroge sur les raisons qui pourraient justifier un transfert obligatoire de l’ensemble des équipements communaux de proximité (culturels, sportifs et socio-éducatifs….) aux eurométropoles et aux communautés métropolitaines.
L’AMF est attachée à la libre définition de l’intérêt communautaire par les élus et considère comme un recul la suppression de cette notion d’intérêt communautaire, qui disparaît totalement dans les eurométropoles, les communautés métropolitaines, ainsi que pour les compétences développement économique, politique de la ville, voirie et parcs de stationnement des communautés d’agglomération. Cela s’oppose au principe de subsidiarité et à la nécessité de distinguer ce qui relève d’une gestion intercommunale et ce qui doit rester dans le giron communal : ceci est indispensable pour l’exercice de compétences transversales et partenariales (comme la politique de la ville) mais aussi pour la gestion du réseau routier communal dont certains éléments sont par nature communaux.
L’AMF demande un assouplissement et une sécurisation des relations entre communes et communautés afin que certaines compétences communautaires (ou métropolitaines) puissent faire l’objet d’un exercice conjoint avec les communes membres dans le cadre d’un accord-cadre, et non d’un transfert de compétences en « bloc » et exclusif de toutes actions communales : de nombreuses compétences, comme le logement social, la politique de la ville, mais aussi l’environnement (les plans climat énergie territoriaux devront nécessairement être coélaborés car ils concernent les équipements communaux et intercommunaux), la culture, le sport, la voirie, montrent que les communautés agissent souvent en coopération avec leurs communes membres pour réaliser certaines actions ou opérations de proximité ou pour inscrire leurs propres actions ou opérations dans un projet communal. Ce besoin de souplesse dans les relations entre communes et communauté doit être inscrit dans la loi par la reconnaissance d’accords-cadres qui pourraient prévoir les conditions de co-élaboration et surtout de co-mise en oeuvre de certaines actions ou opérations communautaires.
La suppression des mutualisations ascendantes2 n’est pas sans poser problème, même si celles-ci sont rares, car la reprise des services par l’intercommunalité peut être facteur d’augmentation de coûts selon l’organisation des territoires. L’AMF souhaite que les modalités de la mutualisation restent souples. Il convient de rappeler que les conditions de maintien de ces services ont été sécurisées au regard des exigences de la Commission européenne et que les modalités de remboursement des frais de fonctionnement sont définies par décret.
L’indispensable mutualisation des services doit être adaptée au contexte local (culture intercommunale, fonctionnement administratif, organisation du territoire…) et au projet porté par les élus. Elle ne peut avoir ni modèle, ni standard.
Plus généralement, l’AMF tient à rappeler que le transfert de nombreuses compétences et services aux intercommunalités n’est pas systématiquement gage d’économie d’échelle. La concentration de la gestion d’équipements ou de services à l’échelle intercommunale peut, dans certains cas, générer des surcoûts d’administration, de procédures et d’encadrement.

F- Responsabilité et gestion locale

Sanctions financières

L’engagement de la responsabilité de l’ordonnateur « en cas de manquements graves et répétés dans l’exécution d’une procédure de redressement »3 appelle deux questions : doit-on prévoir une responsabilité personnelle du maire pour « mauvaise gestion », ou peut-on considérer que le droit de la responsabilité civile des élus, limité actuellement à la gestion de fait, est suffisant ? Si cette hypothèse était retenue, ne faudrait-il pas disposer d’un texte plus précis, au risque sinon de s’exposer à une diversité d’interprétation ? Notamment, comment le « manquement grave et répété » est-il caractérisé (vote pendant plusieurs années d’un budget en déséquilibre ? Un maire en minorité dans son conseil municipal peut être mis en difficulté de manière répétée lors du vote du budget et faire l’objet de saisines répétées de la CRC sans que cela témoigne systématiquement d’une « mauvaise gestion »). Ou encore, comment caractériser « l’altération durable » des finances locales ?
Elle pose enfin une question de coût (nécessité d’une assurance…)

2 Mutualisation ascendante : des services communaux sont mis à disposition d’un EPCI auquel la commune adhère pour l’exercice des compétences de celui-ci.
3 Note du 10 décembre 2012.

G- Dispositions financières et fiscales

Le projet de texte prévoit de déterminer les modalités et conditions d’expérimentation de la révision des valeurs locatives des locaux d’habitation par l’introduction du revenu dans l’assiette de la taxe d’habitation. Sur la forme, la rédaction retenue laisse penser que les deux sujets abordés dans cet article – révision des valeurs locatives et introduction du revenu dans l’assiette de taxe d’habitation – sont liés et seraient traités dans une même loi de finances. Il convient d’indiquer qu’il s’agit bien de deux chantiers distincts, le premier ayant pour objet de répondre à l’obsolescence des bases fiscales et aux iniquités qui en découlent, et le second visant à prendre davantage en compte, dans l’assiette de taxe d’habitation, des capacités contributives des contribuables.
Sur le fond, l’engagement de la révision des valeurs locatives d’habitation correspond à une demande forte de l’AMF. Lors de la concertation conduite en 2010 sur ce chantier, il avait été décidé de procéder en deux temps, sur la base d’expérimentations préalables : révision pour les locaux professionnels d’abord, puis extension aux  locaux d’habitation. La disposition s’inscrit donc dans ce schéma et l’AMF ne peut qu’être favorable au principe ainsi posé. La question en suspens est celle du calendrier qu’il conviendra de retenir pour articuler au mieux les deux étapes de la révision.

Print Friendly

Répondre