In Politiques sociales et familiales – n°112 – Juin 2013 :
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Cet article analyse les réformes récentes engagées dans l’éducation préscolaire suédoise. L’educare suédois serait-il tenté par des idées centrées surtout sur la préparation scolaire et l’employabilité future ?
Cet article analyse les changements d’objectifs, d’instruments politiques et de contexte, à partir d’une perspective historique. La conclusion est que la réforme engagée doit être interprétée tant au regard des idéaux nationaux que des idées défendues par les organisations internationales.
L’application des critères de Peter A. Hall (1993) pour le changement de paradigme révèle des changements de premier et de second ordres, plutôt qu’une modification simultanée des objectifs, des instruments politiques et du contexte. Il faudra une nouvelle recherche pour mieux comprendre ce qui est réellement en train de se passer dans le contexte local, car il est rare que les politiques et les pratiques se superposent totalement.
Depuis le milieu des années 1990, plusieurs réformes ont remis en question l’idée d’educare (1), souvent présentée comme la principale caractéristique du système préscolaire suédois (OCDE, 2001 et 2006 ; Moss, 2006). Dans le contexte suédois, l’educare correspond à un dosage équilibré entre des services de garde et un système d’enseignement de qualité.
Contrairement à de nombreux pays européens, il n’y a pas de différences d’organisation entre les structures qui accueillent des enfants âgés de moins de 3 ans et celles qui accueillent des enfants de plus de 3 ans (Knijnet al., 2005 ; Letablier et Jönsson, 2005). Avec les réformes actuelles, le système préscolaire est pensé comme constituant la première étape de l’apprentissage tout au long de la vie. Ces idées se retrouvent dans la stratégie d’investissement social que soutiennent l’Union européenne et des organisations internationales telles que l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) et la Banque mondiale. Selon Linda A. White (2009), cette stratégie repose sur une relation positive entre les programmes de développement et d’enseignement destinés à la petite enfance, d’une part, et la réussite des enfants quand ils seront adultes, d’autre part, conduisant à la réussite économique du pays. Cet article cherche à déterminer si, ou dans quelle mesure, la stratégie d’investissement social influe sur le système préscolaire en Suède et sur les travaux de réforme qui ont été menés ces dernières années. Le secteur préscolaire suédois englobe divers types de structures (crèches traditionnelles, crèches parentales et établissements préscolaires ouverts) qui accueillent les enfants âgés de 1 an à 5 ans, mais on se limitera ici aux établissements préscolaires.
Depuis sa création dans les années 1970, ce système d’educare a donné la priorité aux besoins de l’enfant et aux objectifs liés à la politique familiale, sociale, d’égalité des sexes et du marché du travail. Se dirige-t-on désormais vers des objectifs orientés vers l’avenir et assiste-t-on à l’apparition d’un nouveau paradigme dans le système préscolaire suédois ? Dans cet article, cette question est étudiée par analyse de l’évolution de ce secteur depuis les années 1970, à partir des impératifs d’un nouveau paradigme tels qu’énoncés par Peter A. Hall (1993), à savoir une modification simultanée des objectifs, des instruments de la politique publique et du contexte. En effet, au cours des dix à quinze dernières années, des réformes en profondeur ont été mises en œuvre. Ces évolutions peuvent-elles se définir comme un nouveau paradigme ou ne concernent-elles qu’un ou deux des trois domaines évoqués par P. A. Hall (ibid.) ?