DEPUIS PLUSIEURS ANNÉES, LE SERVICE ANIMATION JEUNESSE DE LA VILLE DE SOISY-SOUS-MONTMORENCY ET SES PARTENAIRES ASSOCIATIFS ET INSTITUTIONNELS CONÇOIVENT ET ANIMENT DES JEUX AVEC DES COLLÉGIENS, PRÉTEXTES POUR PARLER DE PRÉVENTION.
Comment aborder avec des adolescents, de façon adroite, la question des comportements à risques, alors que leur expérimentation est souvent une caractéristique intrinsèque de l’adolescence ? Comment des professionnels en relation avec ces jeunes peuvent-ils, depuis leur place, leurs compétences et savoir-faire, contribuer à la prévention de telles conduites ? Tel fut, en 2009, le point de départ de la réflexion des élus de la Ville de Soisysous-Montmorency. En effet, le service municipal Animation Jeunesse, dans les actions de loisirs qu’il proposait, était régulièrement amené à se positionner sur des situations de conduite à risques (alcool, tabac, cannabis, comportement dangereux…) ou à anticiper de telles attitudes. Une préoccupation partagée par les principales des deux collèges de la commune, qui souhaitaient qu’une action au sein de leur établissement soit réalisée sur ce thème. Pour Amel Ben Salah, responsable du service Animation Jeunesse, « nous n’avions pas, dans nos missions, vocation à développer un axe prévention mais il nous a semblé, en complément d’autres interventions, que le vecteur du loisir et l’expertise que nous portions autour du jeu pouvaient être des supports intéressants de prévention ».
Immédiatement, pour la construction du jeu comme son animation, le service municipal de la Jeunesse a recherché l’adhésion des acteurs locaux intervenant dans ce champ pour faciliter leur repérage comme référents sur le plan local, par les adolescents. Se sont ainsi mobilisés, aux côtés du service Animation Jeunesse et des collèges, les centres sociaux municipaux, l’association de prévention spécialisée ADPJ, le service social départemental, la Police municipale, le service de psychiatrie de l’adolescent de l’hôpital d’Eaubonne-Montmorency…
L’élaboration commune d’un jeu… et d’un discours
L’ensemble de ces professionnels a alors conçu un quizz, sous forme de questions et réponses à choix multiples, complétées d’un petit argumentaire élaboré à partir des ressources internes des partenaires ou de compétences extérieures (CODES, associations et sites internet spécialisés…). Cette étape de travail a été une occasion riche de réfléchir collectivement à un discours cohérent sur les conduites à risques. Le jeu a été testé une première année, sur 8 séances, auprès de l’ensemble des élèves de 4ème (200 adolescents). Durant 2 heures, sous la houlette d’un meneur de jeu, les élèves étaient répartis en tables de 5 à 6, associés à un adulte « Joker » (l’un des partenaires du projet : éducateur spécialisé, assistante sociale, principale, CPE, animateur jeunesse, policier municipal, formatrice en éducation sexuelle et affective, infirmière du collège…). La mission de ces jokers : animer l’échange à partir des réponses des jeunes aux questions, transmettre les informations et argumentaires
préalablement construits. Et les élèves se sont pris au jeu, participant activement, avec une liberté de ton facilitée par l’approche ludique. Au-delà même des informations ou messages clés transmis par les « jokers », la richesse de l’échange entre jeunes et avec les professionnels a été soulignée par tous. Autant de résultats propices à la reconduite les années suivantes de l’action (inscrite dans les comités d’éducation à la santé et à la citoyenneté des collèges) et qui, depuis, évolue en permanence (demi-finales et finales entre les collèges, temps fort : théâtre forum, film…) et associe de nouveaux partenaires telle la Direction départementale de la sécurité publique.
L’action a d’ailleurs essaimé. En 2011, face une problématique de violences scolaires dans un établissement, l’idée du jeu comme outil de prévention a été reprise, dans ses mêmes principes mais sous une forme nouvelle: un jeu de l’oie, intitulé Faut qu’ça cesse ! Sortons de la spirale de la violence. Construit et expérimenté depuis deux ans par les mêmes acteurs et dans les mêmes lieux, ce jeu (avec des questions, des mises en situations, des extraits de film) aide à engager l’échange sur les discriminations, les jeux dangereux, le harcèlement au collège, les agressions, vols et racket, les violences à connotation sexuelle, le malêtre… Là encore, la dimension ludique, la posture d’écoute et d’animation des adultes facilitent le dialogue sur des sujets sensibles, des propos ou comportements souvent banalisés. À l’issue des séances, les équipes rédigent un slogan, repris comme support de travail avec le professeur d’arts plastiques.
Une dynamique à consolider tout au long de l’année
Très positive dans sa capacité à créer les conditions de la prise de parole, cette démarche, pour Aurélie Abba, coordinatrice des activités jeunesse « place les jeunes en situation d’acteur et non seulement de destinataire passif de messages de prévention ». Elle situe aussi les adultes en tant que personnes ressources. D’ailleurs, si l’impact sur les comportements reste difficile à mesurer, quelques signes ténus mais tangibles sont perceptibles : un jeune a poussé la porte de la principale du collège pour parler de sa souffrance face à des remarques homophobes, un éducateur et un animateur de centre social ont été interpellés par un groupe de jeunes filles sur leurs relations avec un groupe de garçons…
Néanmoins, pour que les effets de cette dynamique soient amplifiés dans le futur (un nouveau jeu sur les addictions se profile), plusieurs aspects devront peut-être être approfondis, autour d’une meilleure association des professeurs des collèges, du partage plus fin de l’impact de l’action au regard du travail quotidien des partenaires engagés, de la réappropriation par chacun dans la durée des fils tirés lors des séances, d’un lien plus affirmé avec le CLSPDI (le projet étant soutenu dans le cadre du FIPD)… Les partenaires ont les cartes en main pour réussir ce défi collectif. À eux de jouer !
Contact : amel.bensalah@soisy-sousmontmorency.fr