SAVOIR : Le substantif, désigne la substance de ce qui est su : « Ce qu’on sait, savoir qu’on le sait; ce qu’on ne sait pas, savoir qu’on ne le sait pas; c’est savoir véritablement »,Confucius.
Si la condition naturelle de l’homme est l’ignorance, «tous les hommes ont, par nature, le désir de connaître », Aristote, Métaphysique, A. 980a. Mais que fait-on des sujets qui « ne veulent pas savoir », qui rencontrent des obstacles à l’apprentissage, des inhibitions, des refus de savoir, etc. Pourquoi est-il si difficile de réaliser l’espérance très moderne de Comenius (J. A Komenski : 1592-1670). qui développa en son temps une conception de l’éducation favorable à l’orientation, considérant que « tous soient instruits en tout» ?
« Savoir, c’est comprendre comment la moindre chose est liée au tout », Émile Chartier (1868-1951) dit Alain.
On peut aborder les savoirs en prenant en compte leur double acceptation étymologique: sapere: savoir et saveur, en vue de développer une approche didactique et anthropologique.
Le savoir peut alors s’objectiver et se détacher des personnes qui l’ont d’abord créé (découvert) et porté, pour devenir un produit, un patrimoine culturel pour une collectivité.
Le verbe, exprime l’action des savoirs. Dans ce sens, savoir s’attache aux personnes. C’est un processus, une activité.
Au sens très général: ensemble des acquis de l’individu. Savoir et savoir-faire s’expriment habituellement à travers les capacités d’une personne en situation. Plus précisément, on distingue parmi les savoirs: les savoirs scolaires ou universitaires, mis en forme pour la transmission en formation; les savoirs scientifiques conçus pour la vérification et l’expérimentation; les savoirs d’expérience, assez souvent peu conscientisés (savoir-faire caché et connaissances tacites) et s’incorporant fortement avec le temps; les savoirs réflexifs, qui s’ajustent en prise directe avec l’action; les savoirs d’expertise des professions savantes qui mobilisent un vaste répertoire de connaissances. Il existe une autre sorte de savoirs qu’on peut appeler métacognitif, savoir sur ses savoirs,sur sa façon d’intégrer, de gérer, de mémoriser, etc. les perspectives récentes, B.M. Barth, 1993, mettent l’accent sur le savoir en construction, comme construction de sens. Le savoir est « à la fois structuré, évolutif, culturel, contextualise et affectif ». L’agir professionnel, DA Schon, 1994, est un ensemble de savoirs théoriques et de « savoirs d’action» (praxéologiques), de savoir-faire (savoir faire faire et savoir que faire) et de savoir-être (savoir devenir et savoir vivre). Ces savoirs cachés (tacites ou insus). savoir faire face, savoir faire avec, etc. mobilisés dans l’agir professionnel méritent une analyse à partir des travaux de psychologues et de sociologues sur leur constitution (par qui, comment?),sur leur mise en oeuvre (dans quelle classe de situations, par qui, pour quels effets attendus ?) et sur leurs enjeux sociaux(qui les défend, les conteste, quelle place occupent-ils ?).
On oppose généralement les savoirs experts, savoirs savants aux savoirs vernaculaires (parfois qualifiés de traditionnels, populaires ou encore écologiques). Les savoirs profanes qu’ils soient «locaux», «autochtones », « indigènes », ont une valeur empirique et sont le fruit d’une construction intellectuelle où les sens, la mémoire, l’émotion, l’affectivité sont mobilisés dans un contexte donné. Savoirs théoriques (savoir comprendre), savoirs d’environnement (savoir s’adapter). savoirs procéduraux (savoir comment procéder), savoir-faire opérationnels (savoir opérer), savoir-faire expérientiel et existentiel (savoir y faire), savoir-faire sociaux (savoir se conduire). savoir-faire cognitifs (savoir traiter l’information) peuvent s’acquérir selon des modalités variées: l’éducation formelle, la formation initiale et continue mais aussi l’expérience sociale et professionnelle analysée, peut se manifester selon un mode déclaratif ou procédural, le BoterfG., 1997.
D. Bertaux, 1980, ,désigne par « le savoir indigène", ces savoirs à l’état implicite, diffus, à peine conscients et non formulés. Les relations entre savoirs savants, savoirs experts, savoirs ordinaires et savoirs locaux mériteraient d’être réexaminés, notamment dans la perspective du management des savoirs, J.c. Tarondeau, 2003. On distingue également les savoirs licites versus illicites; les savoirs intimes (privés) versus publics, et dans le rapport savoir/pouvoir, on oppose le savoir de soumission (faire acte d’allégeance) et le savoir de révolte visant à l’auto-émancipation.
On distingue généralement trois modes d’acquisition des savoirs: l’éducation formelle (l’école); l’éducation non formelle (l’expérience professionnelle) ; l’éducation informelle (l’expérience sociale).
Pour M. Serres, « tous les savoirs sont libres et égaux en dignité et en droits », mais tous ne peuvent être confondus sur le même plan. « le savoir conscient cache souvent, au sujet lui-même, un savoir inarticulé ou sous-jacent qui oriente son action. De manière qu’à une épistémologie du savoir correspond une épistémologie que l’on doit sans cesse construire ou reconstruire, à savoir une épistémologie de l’agir », D. Schiin, 1993.
E. Morin, s’étonne que nulle part ne soit enseignée ce qu’est la condition humaine, comme processus général qui pourrait nous aider à nous comprendre les uns les autres: « Je crois que la spécialisation doit arriver assez tard, afin de pouvoir donner aux élèves une culture très large qui leur permette d’accéder à leur autonomie, de s’orienter dans la vie [ … ] l’enseignement souffre d’une compartimentation, d’une fragmentation. Il importe de rassembler les savoirs ».
En définitive, comme l’affirmait M. Foucault, 1994, « Le savoir n’est pas une somme de connaissances-car de celles-ci on doit toujours pouvoir dire si elles sont vraies ou fausses, exactes ou non, approchées ou définies, contradictoires ou cohérente : aucune de ces distinctions n’est pertinente pour décrire le savoir ». Au plan pédagogique, ce n’est pas le savoir qui émancipe, mais la capacité à apprendre. « Il ne suffit pas, en effet, de transmettre un savoir, il faut aussi se préoccuper de la manière dont chaque individu réussit à recréer ce savoir pour lui-même et à l’intégrer à ses propres acquis de formation, à son univers de significations et à son expérience ». R.legendre, 1993. Dans le domaine de l’orientation scolaire et professionnelle, il ne suffit pas de savoir, encore faut-il savoir d’où l’on vient et où l’on va.
â–º Autonomie; Connaissance; Cycle de vie; Expérience; Professionnalisation; Sagesse; Sciences de l’éducation; …