L’inégalité des chances en matière de santé selon le milieu social d’origine est une chose établie. Mais une étude scientifique internationale « Share » a mis en évidence pour la première fois en France que la santé des seniors dépendait aussi de la profession et de la santé de leurs parents: il y a de meilleurs soins et une éducation à la santé dès l’enfance, puis un meilleur accès à des professions à bonne espérance de vie pour les enfants de cadres que pour ceux d’ouvriers ou d’employés.
Cet éclairage permet peut-être de mesurer de façon plus concrète l’importance de l’éducation à la santé pour les jeunes et du rôle « compensatoire » que peut jouer l’école en lien avec les familles. Une autre série de travaux pilotés par l’OMS depuis 2006 étudie les « conduites de santé des enfants d’âge scolaire » dans 41 pays .
Cette étude montre que la santé des jeunes français est plutôt bonne. Eux-mêmes ont le sentiment à 87 % d’être en bonne, voire excellente santé. Il est vrai qu’ils ont moins de surcharge pondérale, ont une bonne pratique du petit-déjeuner et une consommation satisfaisante de fruits et légumes. Leur consommation de tabac est en baisse, celle de cannabis stable, celle d’alcool paradoxale (de moindres quantités, mais des phénomènes d’ivresse préoccupants).
Ces résultats positifs sont toutefois à modérer car l’étude montre une plus grande difficulté des jeunes à dialoguer avec leurs parents. Or « plus le dialogue est facile, plus la perception de son état de santé par le jeune s’améliore, et plus il se protège des conduites à risque », selon Philippe Lamoureux, directeur de l’Institut national de prévention et d’éducation pour la santé (INPES).
Les conduites ou comportements à risque tendent à apparaître de façon plus précoce. Le rapport des jeunes à l’école se dégrade nettement au moment du passage en 6e, un vrai « stress » qui expose plus aux conduites problématiques.
L’école est logiquement interpellée pour participer à cette éducation, voire la promouvoir: un décret du 11 janvier 2006 sur les programmes de formation à l’éducation à la santé a été suivi d’une circulaire en direction des écoles et collèges (circulaire n°2006-085 du 24 mai 2006) sur l’éducation à la responsabilité en milieu scolaire.
L’INPES,qui avait sorti fin 2006 un guide pour l’éducation à la santé, propose aujourd’hui un nouvel ouvrage sur la base d’un travail commun aux pays francophones.
Deux volets: le premier revient sur les étapes du développement des enfants, la description des comportements dits à risques et leurs déterminants, le second propose des stratégies de prévention et des ressources, issues des différents pays. Les écoles et établissements, un lieu important dans lequel se développent les jeunes et où se génèrent souvent les conduites à risque, doivent intégrer cette éducation dans leurs projets.
Cependant ce travail ne peut se résumer à une série de conseils, il doit se centrer sur le développement d’aptitudes individuelles et sociales (capacité à prendre des décisions et à résoudre des problèmes, raisonnement créatif et réflexion critique… et aussi gérer son stress, nouer des relations…).
L’utilisation des méthodes actives et de l’expérimentation est fortement préconisée. Il y a par ailleurs un fort enjeu du côté de la parentalité en rétablissant l’image des parents, leur rôle d’éducateur et leur rapport à la règle. Tout ceci repose en fait sur une formation de l’ensemble de la communauté éducative. Le guide proposé est une référence et une ressource intéressante pour démarrer ce travail.
Michèle Frémont