In Fenêtres sur cour – SNUIPP – n°399 du 5 mai 2014 :
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Le ministre vient d’annoncer des mesures d’assouplissement de la réforme des rythmes scolaires. Elles sont très réduites et bien en deçà des demandes du SNuipp-FSu. Décryptage.
C’est l’histoire d’une réforme qui n’a pas trouvé le bon rythme. Même le nouveau premier ministre, Manuel VALLS a semblé s’en apercevoir. « Face aux difficultés de cette réforme des rythmes, il faut un assouplissement du cadre réglementaire actuel » a t-il déclaré lors de son discours de politique générale.
Pendant quelques jours, les interprétations ont alors été nombreuses. Au jeu de la politique fiction, chacun y est allé de son scénario. 14 jours plus tard, sur RTL, c’est Benoît HAMON, le tout nouveau ministre de l’éducation nationale qui a traduit les intentions du gouvernement en présentant un nouveau décret complémentaire à celui de janvier 2013. « À titre expérimental, des adaptations à l’organisation de la semaine scolaire dérogeant aux neuf demi-journées seront possibles » à condition de comporter au moins 5 matinées de classe incluant le mercredi ou le samedi. En clair, l’assouplissement, c’est pour les après-midi où l’une d’elle pourrait être désormais totalement libérée une fois par semaine pour le temps d’ activités périscolaires (TAP) et c’est tout !
Les organisations consensuelles comme à Poitiers ou Toulouse, fonctionnant depuis des années avec un mercredi sur trois libéré ne seront plus possibles… mais pour la pratique du ski dans les villes de haute montagne autorisé certains mercredis, c’est oui ! une telle iniquité de traitement n’est pas acceptable. de même, le ministre a fermé la porte aux 4 jours allégés avec rattrapage sur les vacances qui auraient dû être une possibilité offerte à la communauté éducative sous forme d’expérimentation car répondant aussi à des contraintes territoriales.
Une opération de façade ?
Alors, tout ça pour ça ? Certes, la possibilité de libérer un ou deux après-midi par semaine (voir les exemples d’emplois du temps p11) qui a toujours été une demande du SNuipp-FSu depuis 2 ans pourrait être une organisation intéressante.
ce système reviendrait à échanger le mercredi matin contre un après-midi. les enseignants seraient alors totalement libérés.
mais, force est de constater que cette proposition arrive bien tard. Que de temps perdu… d’autant plus que les nouveaux projets possibles doivent être soumis aux dASEN pour le 6 juin 2014 ! Comment imaginer sérieusement que beaucoup d’ équipes vont avoir le temps et l’énergie de reformuler des propositions dans un délai aussi serré ? Tout cela n’est pas très sérieux à moins que ce toilettage réglementaire ne soit en réalité qu’une opération de façade. Ce n’est pas le souhait du SNuipp-FSu qui revendique que les organisations dérogatoires avec après-midi libéré puissent voir le jour dans les écoles partout où les enseignants le demandent. C’est pour cette raison aussi qu’au vu des délais, le syndicat continue de porter l’exigence que l’année 2014 soit une année transitoire, pour que les équipes qui le souhaitent puissent élaborer en toute concertation des projets dérogatoires. L’avis des enseignants doit enfin être pris en compte.
A cause des financements, des manques de locaux, des difficultés à recruter des animateurs, l’emploi du temps du périscolaire a dicté sa loi à celui des temps scolaires. Résultat, c’est la première fois qu’une réforme de l’éducation nationale a autant donné la main aux élus qui ont trop souvent décidé de manière unilatérale des durées de journée de l’école et des horaires de travail des enseignants.
La gestion de l’école primaire étant une compétence partagée, l’Etat ne peut donc s’en désintéresser. pour le SNuipp, il faut un réel rééquilibrage au bénéfice de l’éducation nationale.
Et la réussite des élèves ?
D’autre questions lourdes demeurent qui appellent des réponses. Pour lutter contre les inégalités territoriales et permettre la libération d’un après-midi, il faudra bien prendre en compte les demandes de pérennisation des financements. De plus, il est impossible de laisser se développer des risques de concurrence accentuée avec l’école privée qui n’est pas tenue de mettre en œuvre la réforme.
Enfin, alors que le ministre semble recentrer son discours sur l’école, il serait de bon ton de passer aux travaux pratiques. Chacun sait bien que la lutte contre l’échec scolaire ne passe pas uniquement pas les rythmes. Si tel était le cas, cela se saurait. la réussite des élèves se joue dans la classe dès la maternelle avec des effectifs allégés, des programmes modifiés, des dispositifs pédagogiques comme le « plus de maîtres que de classes » déployés. Tout cela ne se fera pas sans les enseignants et sans formation continue encore aujourd’hui totalement sinistrée. Ce serait avant tout cela une priorité au primaire qui serait dans le bon rythme.