Le mot vient des travaux de R. Clausse, 1963, ce concept clé chez Maffesoli, apparaît au cours des années soixante-dix et mobilise des enjeux théoriques, pratiques et éthiques. M. Bolle de Bal et alii, 1996, ont souligné la spécificité du sens englobant ce « concept charnière" et sa transversalité dans les sciences humaines (économie, psychologie, psychanalyse, sociologie, anthropologie, sciences de l’éducation, travail social, ergonomie). La reliance est une notion médiatrice, échappant à un seul champ disciplinaire en se situant à la jonction du mental et du social, de l’individuel et du collectif.
G.B. Vico, 1708, en définissant l’Ingénium évoquait « la faculté mentale qui permet de relier de manière rapide, appropriée et heureuse des choses séparées. Faculté synthétique, opposée à l’analyse stérile, elle permet l’invention et la création; elle est indispensable à la poésie, à l’invention technique des ingénieurs et à la découverte scientifique et philosophique".
Le premier théoricien de ce concept le définit comme suit: « L’acte -ou le résultat de cet acte- de créer ou de recréer des liens, d’établir ou rétablir une liaison entre des acteurs sociaux séparés, dont l’un au moins est une personne; de réunir, mettre ou remettre en rapport ou en communication des acteurs distincts, ou disjoints ou isolés », M.Bolle de Bal, 1985.
On distingue plusieurs niveaux de reliance: la reliance à soi (reliance psychologique), la reliance aux autres (reliance sociale) ; la reliance au monde (reliance culturelle, écologique ou cosmique); la reliance à l’espèce humaine (reliance ontologique); la reliance des idées (reliance scientifique, intellectuelle, voire spirituelle); la reliance entre les choses (reliance physique dans le monde des molécules).
Chaque nouveau système de reliance naît dans un système de reliance existant. Il n’y a pas de reliance sans déliance. La reliance est un processus de longue durée qui se réalise par étapes et de façon non linéaire. La reliance est un système. Chacun d’entre nous ne dispose pas d’une seule reliance, mai est partagé entre diverses reliances. Sans reliance, rien ne peut se construire de façon durable, nécessaire, solidaire. Ce lien inter humain est aussi indéniablement présent, quoique en partie invisible et difficile à nommer. Le «besoin de reliance" conduit à des aventures anthropologiques.
La reliance donne une identité à l’individu. « La reliance sociale est la création de liens entre des acteurs sociaux séparés) M. Balle de Bal, 1997.
La reliance permet d’avancer l’idée dialogique « qui accepte que deux instances non réductibles l’une à l’autre d contradictoires soient liées ensemble", E. Morin, 1999, La dialogique est un raisonnement qui associe deux (dia) logiques, sans que l’une ne l’emporte, ni qu’une synthèse n’amalgame le tout.
La reliance est sociale, mais aussi culturelle. À l’image de la raison scientifique, les hommes modernes sont déliés déconnectés, disjoints: ils ne sont reliés aux autres que" des machines; d’autre part, le carriérisme, l’esprit de consommation et la surabondance d’informations ne laisse plus aux individus la possibilité de s’interroger sur le sens de leur vie. Une « nouvelle alliance" est à rechercher entre l’homme et la nature, entre l’homme et les science, Y.Prigogine et I.Stengers, 1979.
Le chômage peut engendrer une « déliance’, sorte de souffrance sociale, quand « il s’agit d’un manque de liens humains (psychologiques, sociaux et culturels), d’une carence des structures sociales incapables d’assurer ces relations directes [ … ] chargées d’affectivité qui font la joie et la difficulté de vivre ensemble", M. Balle de Bal, 1985. Les situations de rupture peuvent provoquer en réaction des aspirations de « reliance", c’est-à-dire de recréation des liens (à soi, aux autres, au monde) détruits. « … Dans la reliance, il s’agit avant tout de re-lier ce qui est dé-lié: l’action vise à réunir des personnes dont les liens sont déconstruit, Pourtois et Desmet, 2002. La reliance consiste en définitive à « établir des ponts» entre les hommes, M. Serres, 2006.
Paradigme éthique de l’hypermodernité, le concept de reliance donne lieu à une utilisation opérationnelle dans l’organisation des entreprises et plus généralement dans le secteur « quaternaire » Liance, déliance, et reliance sont trois notions-clefs pour les histoires de vie et une socio existentielle utiles à une meilleure compréhension de l’orientation au cours de la vie.