In Futuribles – le 2 septembre 2013 :
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Depuis les premières lois d’assistance de la fin du XIXe siècle, jusqu’à l’ensemble des mécanismes socio-fiscaux contemporains, en passant par la mise en place d’une branche « Famille » de la Sécurité sociale après guerre, le périmètre de la politique familiale n’a fait que s’étendre.
Le plus important virage de la politique familiale n’est pas le plus commenté. On parle très souvent du passage d’une politique familiale vers une politique sociale, avec les mises sous conditions de ressources de certaines prestations ou encore les abaissements du plafond du quotient familial. Ces sujets, à nouveau discutés avec les récentes annonces gouvernementales, masquent une transformation bien plus importante. En raison de l’extension de l’activité féminine et souvent pour l’encourager, les principales nouvelles mesures en faveur des familles ont consisté, depuis les années 1970, en interventions visant la petite enfance.
Les courbes des dépenses sont claires. Avant le milieu des années 1980, la branche Famille ne dépensait rien, ou presque, pour l’accueil du jeune enfant (i.e âgé de moins de trois ans). Depuis lors, les innovations et créations ont très largement porté sur ce dossier. Depuis 2010, la branche Famille dépense plus en matière d’accueil du jeune enfant qu’en allocations familiales. Et les collectivités territoriales s’impliquent considérablement, en lien avec les caisses d’allocations familiales (CAF). L’ensemble, cependant, demeure insatisfaisant. Ne serait-ce que parce qu’il manque un nombre considérable de places.
Dans tous les débats très contemporains sur le quotient familial et les allocations familiales, on oublie, en partie, l’essentiel. Cette réduction d’impôt et cette prestation dite d’« entretien » (car elle vient couvrir ou compenser une partie du coût des enfants) ne correspondent plus à la priorité des politiques familiales. Celles-ci, de plus en plus, visent non pas uniquement à « compenser » la charge d’enfant, mais à permettre aux parents une meilleure conciliation entre vie familiale et vie professionnelle.
Dépenses pour les allocations familiales et pour l’accueil du jeune enfant (en milliards d’euros)
Source : Caisse nationale d’allocations familiales.
Le sujet important pour la politique familiale n’est donc pas de savoir comment rogner et bricoler avec les paramètres du système en place, mais de résolument investir afin que tous les parents et tous les enfants puissent bénéficier de services de qualité. En matière de petite enfance, deux projets, largement convergents, sont ponctuellement évoqués. Il s’agirait d’aller vers un « service public de la petite enfance » ou bien vers un « droit opposable à un mode de garde ». Dans les deux cas, le principe, inspiré des politiques des pays scandinaves, serait de proposer à tous les enfants de moins de trois ans, une solution d’accueil. Pour la France, aller vers une telle réorganisation (service public et / ou droit opposable), suppose une refonte générale de la gouvernance de la politique familiale française. Ce qui n’est pas à l’ordre du jour. On préfère souvent raboter et complexifier (ce qu’incarnent les décisions récentes), plutôt que simplifier et réaffecter (ce qu’incarnerait une visée stratégique claire).