In Les Cahiers Pédagogiques – le 11 janvier 2014 :
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Philippe Meirieu, professeur à l’université Lumière-Lyon 2 a ouvert l’après-midi par une conférence pleine de dynamisme. Lui ont ensuite répondu Pierre Delion, chef du service de pédopsychiatrie du CHRU de Lille, Eric Favey, secrétaire du CAPE national et membre du Conseil Supérieur des Programmes et Pierre Frackowiak, membre du CAPE Nord – Pas de Calais.
- Eric Favey, Pierre Frackowiak, Pierre Delion, Philippe Meirieu, Sylvain Hannebique et Jean-Pierre Mollière
« Coopérer, oui mais comment ? » C’est la question à laquelle Philippe Meirieu s’est proposé de répondre. Avec humour, l’orateur n’a pas manqué de faire rire la salle en brocardant la logorrhée des projets et les risques de « la copulation technocratique de superstructures » ou le verbiage de la « coconstruction » qui n’assure nullement la qualité des décisions et de l’action. Il a vivement rappelé également le risque des méthodes naturelles de travail en commun qui laissent au leader son rôle de leader et au timide son rôle en retrait. « Que chacun s’implique et progresse ; voilà ce à quoi il faut parvenir. »
D’où l’importance de travailler sur et avec la polyfactorialité, puisque travailler ensemble signifie rapprocher des dissemblances et prendre en compte un système complexe : « Réintroduisons la capacité de travailler ensemble pour identifier tout ce qui interagit avec l’enfant et crée un écosystème… »
Il y a un danger d’externalisation de la difficulté. L’individualisation ne doit pas aboutir à une classe centrifuge qui amène hors d’elle un certain nombre d’élèves « à traiter en externe ». Mais les deux, suivi à l’intérieur et suivi à l’extérieur, doivent vivre en dialectique.
- Les associations du CAPE
Comment donc coopérer ? « Un des problèmes du travail en équipe c’est que l’on ne sait pas ce que l’on attend de ce travail et le type de coopération : la connaissance réciproque, jusqu’à entrer dans la logique de l’autre, le modèle mutuel de l’entraide ; mutualisation. » Travailler, apprendre ensemble demande du travail individuel auparavant, que l’ensemble ne soit pas pris en otage par quelques-uns, que des objectifs soient posés. Les finalités, nous les faisons avancer au fur et à mesure, à condition de ne pas les perdre, pris par les actions. Trois finalités selon Philippe Meirieu : surseoir, symboliser et coopérer. Surseoir à ses désirs pulsionnels en créant des espaces de décélération où penser ; symboliser parce que nous ne pouvons pas penser sans symbole, nommer et mettre de l’ordre, parier que le plaisir de comprendre prendra le pas sur le goût de dominer ; et coopérer.
En écho à cette intervention, Pierre Delion rebondit sur l’opérateur de la coopération qu’est la réunion, où chacun va avoir, doit avoir, la liberté de dire ce qu’il a à dire. Pierre Frakowiak insiste, lui, sur la nécessité de jouer sur trois fronts : se battre pour les projets éducatifs de territoires, la formation dans les ESPÉ et de pousser le système à prendre en compte ce que l’enfant a appris hors de l’école. Enfin, Eric Favey rappelle fort simplement la raison pour laquelle il est nécessaire de prolonger le débat et de rendre effective la coopération des associations du CAPE : « Coopérer entre éducateurs, c’est faire alliance contre toutes les fatalités. »
Ne restait plus à Sylvain Hannebique qu’à conclure cette journée avec une phrase d’Albert Jacquart : « Je suis les liens que je tisse. » Que le CAPE suive et soit donc les liens qu’il s’emploie à tisser…
Christine Vallin