Comment expliquer que les progressistes se divisent autant sur l’école? Ce thème a pourtant pris une importance historique dans les combats de la gauche. Les progressistes ne s’accordent-ils pas à estimer qu’une amélioration notable de l’école est indispensable pour le [*changement profond de la société*] qu’ils appellent de leurs vœux ?
On peut définir des marqueurs d’une position progressiste sur l’école : croire en l’éducabilité de tous les élèves, ne pas se résigner devant les inégalités sociales… Une pensée réellement progressiste ne peut s’accommoder de l’état actuel du système scolaire, qui produit un échec socialement injuste. Les progressistes conséquents se fixent l’objectif d’une[* démocratisation*], laquelle constitue un mouvement à analyser sur trois scènes sociales : la famille, l’école, l’économie. Si la démocratisation progresse d’une manière parallèle dans la relation éducative et familiale, en redéfinissant les rôles d’une manière plus égalitaire, 2 elle se heurte à une difficulté redoutable : ce mouvement est-il viable alors que la démocratisation économique ne suit pas ? L’économie détermine les conditions matérielles d’existence et définit une hiérarchie sociale qui se répercute sur l’école. La crise économique retentit sur la société et participe de la crise de l’école.
Longtemps, les progressistes ont pu éclairer leur combat par le plan Langevin-Wallon, devenu une « référence quasi mythique ». Cinquante ans de luttes leur ont permis [*d’influencer concrètement l’école*]. Les résultats engrangés sont ambivalents, que ce soit parce que leurs idéaux ont été pervertis, dévoyés par les technocrates au service du pouvoir (ainsi la réforme Haby, qui mit en place le collège unique, se heurta à l’opposition résolue de tous les syndicats enseignants et partis de gauche), ou parce qu’ils ont subi l’épreuve que représente une mise en oeuvre concrète dans un monde infiniment complexe et mouvant.
L’urgence de l’actualisation de la pensée progressiste est signifiée par l’arrivée d’une [*nouvelle génération de professeurs plus pragmatiques*], décriée à l’occasion d’un sondage qui montrait leur [*scepticisme*] sur le collège unique. Faut-il s’en scandaliser ? Elle juge le bilan de la précédente génération, plus portée aux idéaux, mais dont certains porte-parole font la promotion du renoncement dans tous les domaines. Ceux qui ne se résignent pas à l’ordre social actuel doivent admettre que dans le domaine éducatif aussi, les bonnes intentions n’ont pas toujours donné les résultats escomptés.
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