Une vision commune voudrait que l’éducation scolaire contribue à créer des sociétés meilleures. Mais comment l’école aurait-elle la capacité quasi miraculeuse de transformer la société ? Plutôt que de croire ou non à ses vertus, les sociologues François Dubet, Marie Duru-Bellat et Antoine Vérétout ont cherché à comprendre, en comparant les sociétés et les systèmes éducatifs d’une trentaine de pays, par quels mécanismes et sous quelles conditions l’école affecte positivement la société. Ni le déterminisme fataliste de la simple reproduction sociale, ni le volontarisme héroïque d’une école capable de changer le monde ne résistent aux faits.
Comment les sociétés utilisent-elles les qualifications scolaires ? Quelle est l’ emprise du diplôme sur l’emploi et sur la position sociale ? C’est de ce choix politique que dépend le rôle de l’école dans la société. Quand un pays considère que le diplôme doit déterminer strictement la position sociale, la lutte pour son obtention pèse lourdement sur le système scolaire, au détriment de sa dimension éducative et culturelle. Trop d’école tue l’école. À l’opposé, quand un pays croit moins à l’école, il développe d’autres systèmes d’accès à l’emploi, le jeu scolaire y est plus détendu, mais la société crée d’autres inégalités. C’est dans le jeu de ces deux mécanismes que se tiennent les différences entre les sociétés et c’est en agissant sur cette charnière que les politiques peuvent corriger les inégalités.
François Dubet est professeur à l’université de Bordeaux 2 et à l’EHESS. Dernier ouvrage paru : Les Places et les Chances (Seuil/La République des idées, 2010).
Marie Duru-Bellat est professeur à Sciences Po et chercheur à l’Observatoire sociologique du changement. Dernier ouvrage paru : Le Mérite contre la justice (Presses de Sciences Po. 2009)
Antoine Vérétout est ingénieur d’études au LAPSAC-université de Bordeaux 2. Ses travaux portent sur les questions de travail et d’emploi.