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Martine Boudet, professeure agrégée de Lettres modernes, docteure en littérature française
"Il s’agit dans cette contribution de faire le point des principes aptes à adapter la politique éducative à un contexte socio-culturel en mutation. Compétences, savoirs, cultures: quelle juste place attribuer à ces paramètres du système scolaire et universitaire, actuellement promus ou émergents? Et comment les articuler?
I- L’éducation aux compétences: au service de la démocratisation de l’Ecole et de l’individualisation des apprentissages
Pour la démocratisation du système éducatif, il s’avère nécessaire, dès les premiers enseignements, de promouvoir les stratégies d’ordre psycho-pédagogique: l’objectif est d’apprendre à apprendre et de privilégier la méthodologie et l’individualisation des apprentissages. Une notion-clé dans cet ordre d’idées est celle de compétences, deuxième pilier du socle commun des apprentissages, aux côtés des savoirs. Au conservatisme élitiste et fondé sur l’exercice rigide du métier d’enseignant dans des filières cloisonnées, doit succéder une démarche valorisant entre autres l’acquisition de fondamentaux transversaux et interdisciplinaires, au service de tous les publics. La libéralisation du système éducatif depuis mai 68 ainsi que la création des IUFM en 1990 se sont traduits par la légitimation des sciences de l’éducation et par une mise en œuvre de certains de leurs objectifs: citons entre autres, à l’actif du courant représenté par Philippe Meirieu, la création des parcours diversifiés en collège et des TPE (Travaux personnels encadrés ) en lycée…Depuis une décennie, la volonté néo-libérale de transformation de l’Ecole et de l’Université en entreprises1 a changé les règles du jeu: l’instrumentalisation du concept de compétences, parfois au détriment des savoirs à enseigner, est à mettre au compte d’un pragmatisme et d’un minimalisme douteux. Autre exemple d’ambivalence, la recherche affichée des innovations au service de la compétitivité, la finalité de la création n’apparaissant quasiment plus dans les discours institutionnels ou des contre-pouvoirs comme alternative émancipatrice. En France, cette dérive gestionnaire s’inscrit dans un champ idéologique traversé par une controverse ancienne, alimentée entre les courants des disciplinaires (auparavant appelés instructeurs) et des pédagogues ou éducateurs. Ce clivage a souvent conduit les différents protagonistes à adopter une posture unilatérale, valorisant respectivement les objets d’enseignement ou les méthodes d’apprentissage à adopter.
Ce duo conflictuel, qui a été au centre des débats internes aux mobilisations enseignantes, apparaît en fait comme un paradigme daté et réduit à la problématique des relations entre classes et à la finalité de l’individualisation citoyenne. L’actualisation des données reste à établir, à partir d’une mise en situation géo-historique, celle-ci étant caractérisée par l’accès concomitant à la société de l’information et à la mondialisation."