PRomotion des Initiatives Sociales en Milieux Educatifs

In Le Blog de Philippe Liria – le 24 novembre 2013 :

Accéder au site source de notre article.


Table ronde - Rencontre FLE Barcelone 2013 (photo, Garcia Ortega)

Table ronde – Rencontre FLE Barcelone 2013 (photo, Garcia Ortega)

Vendredi dernier, s’est tenue la première table ronde de la Rencontre FLE de Barcelone qu’organisent les Éditions Maison des langues en collaboration avec Difusión et l’Institut Français de Barcelone. C’était l’heure de la sobremesa, moment idéal pour la tertulia, ce moment de discussion autour d’un café sur un sujet qui général fait débat.
Le nôtre, c’était Le numérique et l’enseignement/apprentissage du français dans lequel nous voulions parler de tout ce qui de près ou de loin est en lien avec les TNI, les manuels numériques, les tablettes, les accès à Internet, les Smartphones dans la classe, le web 2.0, les plateformes, les CLOM (Cours Ouvert et Massif en Ligne), ce gallicisme pour MOOC (ces Massiv Open On-line Courses) dont on parle tant, etc. Et un long etcétéra souvent accompagnés de nombreuses et légitimes questions. Des questions autour des supports et surtout de leur utilisation. En effet, tout ça, c’est bien, souvent très beau… mais pour quoi faire finalement ? À quoi bon tous ces outils si nous ne changeons pas les habitudes d’enseignement ? D’autant que celles de l’apprentissage aussi évoluent, parce que nos apprenants aussi. Certes, c’est facile à dire, mais pas forcément facile à mettre en place…
Autour de cette table, virtuelle d’ailleurs, étaient présents Bernard Gillman de l’Institut français de Barcelone, Christelle Combe Célik de l’Université de Franche-Comté, Nathalie Bittoun de l’Universitat Oberta de Catalunya et François Blondel de l’Institut français de Madrid. Toutes et tous nous ont présenté leur point de vue et leur expérience par rapport au numérique.
Et cette table ronde n’a pas été le seul espace pour en parler. Des ateliers, un de échanges d’expérience et la conférence de clôture (prononcée par Christelle Combe Célik et que vous pourrez prochaine retrouver en podcast sur le site de la Rencontre) ont permis d’entrer encore plus dans le vif du sujet.

conférence C. Combe Célik, Rencontre FLE Barcelone 2013 (photo : Garcia Ortega)

conférence C. Combe Célik, Rencontre FLE Barcelone 2013 (photo : Garcia Ortega)

Alors comment mettre en place un enseignement avec des tablettes ? Une plateforme ? Un espace virtuel d’apprentissage où élèves et tuteurs peuvent interagir ? L’interaction, c’est justement un des points qui soulèvent le plus de questions chez les enseignants. Peut-on vraiment la maintenir à distance ? Et surtout, maintenir l’affectif que crée cette interaction dans un espace de classe réel. François Blondel a voulu insister sur ce point : le virtuel aide à développer l’autonomie de l’apprenant, ce qui va l’aider dans la classe en présentiel.
Rien d’incompatible donc. Du moins si on voit ces expériences menées par l’Institut français avec sa plateforme ou la Universitat Oberta de Catalunya (UOC) et son Langblog – cliquer ici pour en savoir plus -, pour reprendre les exemples cités respectivement par Bernard Gillman, directeur de l’Institut français de Barcelone ou de Nathalie Bittoun, la coordinatrice des langues de l’Escola de llengües de la UOC

(Photo : Garcia Ortega)

(Photo : Garcia Ortega)

Les doutes voire les réticences sont toutefois présents. Un certain scepticisme se fait sentir à en croire les commentaires entendus dans la salle sur la possibilité de mettre en place de façon efficace toutes ces technologies au service d’une nouvelle pédagogie. Dans la salle et sur scène aussi : Christelle Combe Célik est plutôt sceptique quant à l’usage que l’on fait des TNI et s’interroge sur la véritable nécessité d’en étendre l’usage. Il faudrait peut-être plutôt regarder ce qui se passe du côté, par exemple, des tablettes et des leçons en ligne à travers de plateformes comme Moodle, qui permettent le développement d’une pédagogie différente comme celle de la classe inversée (flipped classroom). À ce sujet, laissez-moi illustrer cette classe inversée avec une vidéo (en anglais) que Christelle Combe Célik a partagée avec nous pendant sa conférence et qui nous vient du Flipped Institute.
Nathalie Bittoun la rejoint aussi sur les doutes émis quant à l’objectif réel des MOOC, du moins de certains contrôlés par les grandes universités américaines et qui viseraient surtout à faire de l’argent. Je vous renvoie ici à ce qu’en dit notamment Thierry Karsenti.
Les MOOC ont d’ailleurs été parmi les points qui ont, semble-il, retenu le plus de curiosité, même s’ils sont encore mal connus par beaucoup de professeurs, vu ce qui s’est entendu, non seulement lors de cette table ronde mais plus généralement pendant toute la durée de la Rencontre. Christelle Combe Célik nous signalait que les langues ont l’air d’être les grandes absentes de ces MOOC. C’est aussi ce que nous dit Mathieu Cisel dans un billet d’août dernier dans lequel il semblait s’étonner que « les langues, pourtant l’un des principaux marchés de l’apprentissage en ligne, restent à la marge (…) » mais laissait entrevoir les possibilités qu’offre la ludification, dont nous a parlé Fatiha Chahi dans son échange d’expérience. Cette approche, que certains connaîtront comme « gamerisation » permettrait de combiner l’interaction – et donc la dimension collective, encore mal exploitée par les MOOC – avec l’évaluation.
Pour les lecteurs qui voudraient en savoir plus sur les MOOC, outre les billets que j’ai consacrés au sujet dans ce blog, vous pouvez aussi visionner l’ensemble des vidéos (17) du dossier que lui a consacré TV5 Monde début 2013 pendant Expolangues.
Alors que les doutes existent autour des MOOC ou des TNI, la tablette semble, elle, faire ses preuves comme le montre Laurent Carlier dans ses ateliers (lire : Les tablettes, et si vous vous y mettiez ? et cet article du Cafe du fle : TICE. Tablettes tactiles et sélection d’applications utiles en classe ! Rencontre avec Laurent Carlier) ou encore l’École numérique dont je vous conseille vivement les épisodes de l’expérience de classe immersive menée avec des enfants de primaire. Bien sûr, ça ne concerne pas que les langues (même si le nº16 de l’École numérique était consacré au FLE/FLS/FLSco) mais ça peut nous donner des idées!

Quoi qu’il en soit, ce qui paraît se dégager de toutes ces discussions, c’est qu’il est essentiel de s’interroger sur l’apprentissage de demain qui passe nécessairement par l’intégration de ces outils, outils qui évoluent en permanence d’où la nécessité pour les professeurs, dont ceux de FLE, de mettre en place une veille technologique afin de les connaître et surtout de les intégrer dans leurs cours. La motivation des apprenants d’aujourd’hui et plus encore de ceux de demain devra composer avec ces éléments qui contribuent à ouvrir la classe sur l’extérieur. Célestin Freinet à son époque avait ouvert l’école sur le monde ; aujourd’hui, le numérique contribue à reprendre ce concept d’ouverture, nous rappelait José Segura, professeur des écoles et co-auteur de Zoom (Editions Maison des Langues, 2013). Il n’a pas tort. Aux professeurs d’accompagner les apprenants dans cette découverte. Les enseignants ont un rôle fondamental, différent mais indispensable, celui de guide. Ils doivent absolument mettre de côté leurs craintes du numérique, cesser de le percevoir comme leur ennemi, pour, au contraire, apporter tous leurs savoirs afin qu’au milieu de cette jungle d’outils et d’informations en ligne, ils puissent aider leurs élèves à discerner ce qui est vraiment important et à interpréter ce qu’ils voient et ce qu’ils lisent pour être formés à être autonomes dans la société de demain, dont on ne sait pas grand-chose si ce n’est que le numérique occupera certainement une place centrale.

Print Friendly

Répondre