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A l’occasion d’un colloque national organisé par SOS Amitié le 13 novembre dernier, le chercheur Georges Fotinos a détaillé le système « performant » qui produit l’exclusion scolaire en France, et alimente ainsi les inégalités sociales.
Pour Georges Fotinos, « l’école française se singularise par deux caractéristiques (…) : une inégalité scolaire entre les élèves qui bat (presque) tous les records (…), et des rangs de classements dans la compréhension par les élèves de la lecture, des mathématiques et des sciences qui ne cessent de descendre depuis 10 ans. (…) A ces faits, il faut ajouter que près de 150.000 élèves sortent chaque année de notre système éducatif sans qualification ni diplôme. »
L’ancien IGEN, aujourd’hui chercheur associé à l’Observatoire International de la Violence à l’Ecole et administrateur d’UNICEF France, s’est notamment appuyé sur les chiffres du bilan Innocenti de l’Unicef de 2010, qui place la France en 23ème position pour les inégalités scolaires, sur 24 pays classés.
Les élèves défavorisés 2 à 3 fois plus souvent exclus que les favorisés
Le système scolaire français, « discriminant et élitiste », creuse les inégalités sociales tout au long de la scolarité et favorise l’exclusion des élèves des milieux les moins favorisés. Selon les chiffres du ministère de l’Education nationale, les enfants de cadres sont 2 fois plus diplômés de l’enseignement supérieur que les enfants d’ouvriers/employés; et ces derniers sont presque 3 fois plus nombreux à terminer leur scolarité avec le brevet ou aucun diplôme.
A ce tableau déjà bien noir, le chercheur ajoute les données d’une étude personnelle, qui souligne que les exclusions temporaires frappent 2 fois plus les élèves issus de milieux défavorisés, et jusqu’à 3 fois plus pour les exclusions définitives et les conseils de discipline :
Plus de sanctions sont par ailleurs appliquées chaque année dans les lycées professionnels (qui concentrent les élèves défavorisés) que dans les lycées d’enseignement général et technologiques, alors que les LEGT accueillent deux fois plus d’élèves :
Le rapport sur la refondation de l’Ecole va dans le bon sens
Pour Georges Fotinos, la conclusion est claire : « L’école ne joue plus son rôle d’ascenseur social, si ce n’est à la marge ». Il propose, pour y remédier, de mettre en place des incitations financières pour retenir les enseignants compétents dans certains établissements à faible statut socioéconomique, et de fonder l’admission des élèves « sur des groupes de compétences, sans tenir compte de l’origine socio-économique ».
Pour ceux qui craindraient que l’admission d’élèves défavorisés ne dégrade les résultats d’ensemble d’un établissement, il cite un rapport de l’UNESCO de 2006 selon lequel « les écoles couronnées de succès tendent à être celles qui soutiennent le rendement des élèves provenant de milieux moins favorisés ».
Il se félicite enfin que les orientations du rapport sur la refondation de l’Ecole de la République aillent dans le bon sens, avec la priorité donnée au primaire, le refus de l’exclusion sous toutes ses formes, et le retour d’une « véritable formation professionnelle des enseignants pour mener tous les élèves à réussir leurs parcours scolaires et social ».
Quentin Duverger