PRomotion des Initiatives Sociales en Milieux Educatifs

IDENTITé.

Les sciences sociales sont passées dans les années soixante du concept d’image sociale, illustré notamment par le laboratoire de Chombart de Lauwe, à celui de représentation sociale, à la suite de la thèse de Moscovici, pour travailler dans les années quatre-vingt-quinze à une exploration du concept d’identité.

L’homme est un processus et, précisément, c’est le processus de ses actes », A. Gramsci, 1975. L’identité n’est jamais un processus terminé car il continue jusqu’à la mort, en ce sens c’est la quête de tous et de toujours. L’identité personnelle, selon C. Lévi-Strauss, 1977, est un « foyer virtuel » qui n’existe pas (comme « objet » réalisé) mais auquel on croit et qu’on a besoin de dire (comme « sujet ») pour vivre et agir avec les autres.

Les stratégies identitaires constituent « une mosaïque personnelle et sociale », au sens où les deux dimensions sont imbriquées : l’une « personnelle », l’autre « sociale et personnelle ». La famille est le premier lieu d’apprentissage des identifications et de l’appropriation des identités multiples. D.-W. Winnicott et R.-A. Spitz ont mis l’accent sur l’importance des interactions précoces dans la formation du sentiment d’identité. La construction identitaire est un processus dynamique qui peut être traversé par des ruptures et des crises entraînant des modifications sensibles de la conscience de soi.

P. Tap, 1997, repère six composantes impliquées dans la construction et la dynamique de l’identité :
-la continuité (ou sentiment de rester le même au fil du temps) ;
-l’unité, la cohérence du moi (ou représentation plus ou moins structurée, stable que l’on a de soi-même et que les autres se font de la personne)
– l’unicité (ou sentiment de se percevoir comme unique) ; la diversité (ou coexistence de plusieurs personnages en une même personne) ; la réalisation de soi par l’action (c’est le cas dans les démarches de projet et de formation) ;
– la vision positive de soi (ou estime de soi). Dans la construction des identités se joue la dialectique du même et de l’autre, et une double articulation : permanence/changement, intériorité/extériorité.

R. Sainsaulieu, 1977, a été le premier à montrer que l’entreprise est un lieu où se construit l’identité, qui loin de n’être que sexuelle, religieuse ou politique, se construit aussi par le travail.

tudiant les formes élémentaires des identités sociales et professionnelles, C. Dubar, 1996, observe que « les formes identitaires peuvent s’interpréter à partir des modes d’articulation entre transaction objective et transaction subjective, comme des résultats de compromis « intérieurs » entre identité héritée et identité visée mais aussi de négociations « extérieures » entre identité attribuée par autrui et identité incorporée par soi ».

Autrement dit, la « construction identitaire » s’élabore en fonction du temps et de la position du groupe dans l’espace social de référence. Dans la mesure ou les institutions se transforment désormais à des rythmes rapides, en fonction des évolutions technologiques et des rapports de pouvoir qui les structurent, « la dynamique identitaire résulte d’un incessant processus d’ajustement des identités antérieures et intérieures aux nouvelles formes identitaires qui sont offertes ».

Autrefois, l’identité était fixe et assignée une fois pour toute. De nos jours, les individus aussi bien que les groupes sont contraints par les circonstances qui changent, de redéfinir eux-mêmes leur identité. Ce sont les trajectoires et non plus les positions qui désormais définissent les identités. Mais une nouvelle identité est souvent instable, incertaine et peut s’avérer déstabilisante et douloureuse, d’ou la « fatigue d’être de soi », débouchant sur la dépression se substituant à la névrose, A. Ehrenberg, 1998. Un inonde d’identité en flux est un monde où le besoin de reconnaissance des individus devient un enjeu de premier ordre et intéresse la société globale.

On parle désormais de la dynamique des identités, d’identités plurielles, «mosaïques », contextuelles, changeantes dans la mesure où les individus doivent vivre dans des sociétés de plus en plus complexes, d’où le caractère essentiellement instable, multidimensionnel, différentiel et relationnel des processus de construction identitaire.

Selon le concept d’identité élaboré par A. Strauss, dans le cadre de l’école interactionniste, chaque individu appartient simultanément à plusieurs groupes sociaux et dispose donc de plusieurs collectifs de référence. Cette appartenance sociale, culturelle, à des collectifs divers fait que, à un moment donné, des gens différents peuvent avoir une même conduite. Elle permet aussi de comprendre des comportements que ne suffiraient pas à expliquer le profil psychologique, l’histoire individuelle (l’enfance, le rapport à la mère, l’absence de père…) ou l’appartenance à une catégorie sociale unique (la bourgeoisie de province, la classe ouvrière…). L’identité procède d’une logique séparative et classificatoire.

Suffit-il de catégoriser pour rendre compte de la dynamique identitaire ?

P. Bourdieu rappelle que catégorie, vient du grec, katêgoreln qui signifie accuser publiquement.

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