L’établissement voisin de Pontarlier a reçu un prix national pour un projet pédagogique insolite, qui, depuis la rentrée, responsabilise les élèves. Ce vendredi, le recteur a salué l’initiative.
L’idée a germé dans l’esprit d’Aurélien Berthaut, professeur de maths, alors qu’il enseignait en Nouvelle-Zélande. Là-bas, le dispositif en question se nomme « peer support ». Traduction française : l’aide entre les pairs.
« Cela engendre un vrai climat de sérénité. À mon retour en France, je me suis demandé comment on pouvait adapter ce fonctionnement au collège Lucie-Aubrac », rapporte Aurélien Berthaut. La réflexion – collective – durera trois ans. Le collège de la commune de Doubs, voisine de Pontarlier, s’est finalement lancé dans l’inconnu en septembre dernier…
Le principe est simple. Responsabiliser les élèves. Une trentaine de « tuteurs » volontaires de 4e ou 3e accueillent les petits nouveaux de 6e dès le jour de la rentrée, puis les accompagnent, à raison d’une séance toutes les deux semaines, au fil de leur année scolaire.
Élèves aujourd’hui, citoyens éclairés demain
« On leur apprend de nouvelles méthodes et on essaie de les empêcher de bavarder », détaille Charline. « Il faut faire attention à ne pas créer trop de lien affectif, car les plus turbulents essaient d’en profiter », remarque pour sa part Élie. L’enrichissement est réciproque. « On apprend à gérer un groupe, à s’exprimer à haute voix. Ça nous donne confiance en nous », ajoute Hélène.
Les résultats sont probants. « Il y a moins d’appréhension le premier jour pour les 6e, et moins de passage^s dans le bureau du CPE », note Aurélien Berthault.
Outre cet axe de tutorat, un « conseil de vie collégienne », composé de différentes commissions, encourage les élèves à participer activement à la vie scolaire de l’établissement. Qui, plus que jamais, devient « leur » établissement. « Quand on se sent bien au collège, on travaille mieux », rappelle le principal adjoint, Franck Lucea.
L’initiative de Lucie-Aubrac a été récemment distinguée par les pontes de l’Éducation Nationale, avec un « Prix du Vivre Ensemble ». Ce vendredi, le recteur de l’académie s’est déplacé en personne pour saluer ce projet complexe et collectif, « qui gagnerait à essaimer dans d’autres établissements ». Alors que la réforme des collèges fait débat, son message n’est pas anodin : « Il y a une relation forte entre éducation et instruction. Ce lien est, ici, une continuité naturelle. La chaîne de confiance instaurée entre enseignants et élèves d’une part, et entre les élèves eux-mêmes d’autre part, est un ressort de bons résultats. C’est d’autant plus intéressant, que le collège est notre maillon faible. C’est à ce niveau que les écarts se creusent, et que certains élèves décrochent. » Fort de ses vertus de cohésion et d’entraide, le système inventé par Lucie-Aubrac porte en lui un début d’antidote.
Alors ? Les jeunes au pouvoir, les vieux au placard ? Aurélien Berthault nuance : « Ce qui est paradoxal, c’est que la construction de l’autonomie des élèves nécessite beaucoup d’adultes ». De l’agent d’entretien au cuisinier, tout le personnel est impliqué dans la danse.
L’intérêt pédagogique est réel, comme le prouvent ces coups de fil de plusieurs autres collèges du pays. Certains veulent des renseignements, d’autres demandent même à visiter l’établissement du Haut-Doubs. « Cette reconnaissance nous fait plaisir, mais on réfléchit déjà à la suite », conclut Aurélien Berthaut. Car le fonctionnement initié depuis peu à Lucie-Aubrac reste évolutif. Comme tout bon fonctionnement.
Willy GRAFF
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