GENERATION
Le vocable est un terme plein de sens (généalogique, en usage ethnologie par exemple, historique, démographique, et sociologie) complexe, révélateur de liens et de conflits, un mot qui soulève des enjeux politiques majeurs. Un mot dangereux où le savoir des sciences sociales côtoie la politique et le pouvoir. Il révèle beaucoup des changements et des rapports sociaux et politiques, souvent violents, parfois feutrés, mais dont les conséquences sont alors plus graves encore. Il révèle des processus de changements, des inégalités invisibles, des problèmes actuels d’intégration et de socialisation, mais aussi des déficiences de régulation politique. Génération fait parties de ces notions infiniment complexes dont il est impossible d’épuiser les facettes. Mannheim est un de ceux qui ont pensé ce rapport générationnel. La génération existe véritablement lorsqu’elle partage des traits spécifiques pérennes au long de sa vie : évènement cristallisateur, valeurs et modes de vie partagés, figures fonctionnelles types (ancêtres, maîtres/disciples…).
D’un point de vue anthropologique, le refus d la confusion des générations est le fondement de l’humanisation. Sur le plan éducatif, c’est la limite posée par l’adulte, qui permet à l’enfant de conquérir son autonomie.
La cohorte est l’ensemble des individus nés la même année. De l’année de naissance résultent de nombreuses contraintes structurantes. Les premières cohortes du baby-boom ont eu vingt ans en 1968 : cela forme l’esprit et ouvre des possibilités. Les cohortes nées en 1955 ont connu au même âge les débuts du chômage de masse. La notion de « générations sociales », qualifie des cohortes partageant des traits communs. Lorsqu’elles ont la conscience d’une communauté de destin, d’une « appartenance », on parle de « générations historiques ». Ceux qui eurent vingt ans en 1914, les survivants des tranchées, de la grippe et de la tuberculose ont subi la stagnation de l’entre-deux-guerres et une vieillesse misérable ; c’est la génération sacrifiée. Les générations suivantes, devenues adultes après la Deuxième Guerre mondiale, ont été marquées par la progression de l’Etat-providence et bénéficié d’un enrichissement partagé, plus égalitaire. L. Chauvel, 1998.
Généralement les puînés héritent d’un monde plus favorable que leurs aînés. Cette loi du progrès générationnel de long terme semble remise en cause pour la première fois en période de paix, lorsqu’on constate que la situation des enfants paraît plus défavorable que celle de leurs parents, C. Baudelot et alii, 1999. Si la « fracture générationnelle » est consubstantielle des sociétés à changement rapide, le report massif sur les derniers arrivés des difficultés du temps présent est presque inédit. « La question des générations s’inscrit bien dans la confrontation, pas forcément conflictuelle, des aînés aux cadets : de cette confrontation faite à la fois de transmission, de conflits et d’apprentissage mutuel, naît le cours changeant de l’histoire sociale et culturelle ; point important trop souvent négligé, le moment critique de formation de la conscience générationnelle est le temps de l’enfance et surtout de l’adolescence », O. Galland, 1991.
La progression de l’espérance de vie voit cohabiter quatre voire cinq générations, là où un passé récent n’y maintenait que trois.