L’inter-réseaux des professionnels du développement social urbain (IRDSU) devait, lors d’un séminaire organisé le 31 mars à Angers, présenter son projet « En associant leurs parents, tous les enfants peuvent réussir ». Cette vaste action-recherche devrait mobiliser dix sites et une quinzaine de réseaux associatifs.
Laurent Dauty, copilote du chantier « projet éducatif territorial » Ã l’IRDSU, en explique les fondements.
Comment ce projet est-il né?
Le chantier sur l’éducation et les territoires de la politiques de la ville lancé en 2006 par l’IRDSU a fait apparaitre que l’implication des familles en situation d’exclusion dans les projets éducatifs locaux était limitée. Est est peu prise en compte, en contradiction avec les principes affichés sur la participation. Cette question s’est imposée comme un axe central du chantier et nous a amenés à nous rapprocher d’ATD Quart Monde, incontournable pour son expérience de croisement des savoirs et des pratiques.
La démarche a cheminé avec les responsables du groupe « familles, écoles, grande pauvreté d’ATD et d’ATD-Rennes, qui a mis en place, dans le quartier de Maurepas, un projet d’implication des familles dans le cadre de la réussite éducative. En mai 2007, un colloque organisé Ã Lyon avec le sociologue Pierre Périer a débouché sur l’idée de l’action-recherche.
De quel constat partez-vous?
On attribue à tort aux pus pauvres un désintérêt pour les questions éducatives, alors que c’est davantage la façon dont ils sont associés qui pose problème. Les familles ont tendance à se focaliser sur la réussite scolaire et à investir l’école comme seul lieu de promotion sociale. Mais la nature de cette relation peut entraîner des désillusions, d’où des incompréhensions.
Parallèlement,; les professionnels établissent souvent un lien systématique entre difficultés financières et difficultés éducatives, ce qui implique une déresponsabilisation des familles pauvres et accroît leur sentiment de relégation. La technicisation de l’action éducative, l’utilisation à outrance d’un jargon technique et institutionnel, contribuent en outre à les tenir à distance.
Chacun doit réinterroger ses représentations et les professionnel doivent accepter de ne plus être les seuls experts, de partager un domaine aujourd’hui réservé.
Y a-t-il une prise de conscience sur le terrain?
Oui, car les acteurs réagissent d’une part au contexte ambiant de stigmatisation, de « pénalisation », de « psychiatrisation » des familles, comme le formule le spécialiste des sciences de l’éducation Philippe Meirieu. Ils prennent, d’autre part, conscience qu’on ne peut pas travailler sans les familles.
Les dispositifs de réussite éducative, qui s’appuient sur des parcours personnalisés et la rencontre entre deux mondes – l’éducatif et le travail social – , ont certainement favorisé cette réflexion.
Quel est votre objectif?
Dix sites expérimentaux seront retenus dans le cadre d’un appel à projets visant à favoriser l’implication des familles pauvres dans les projets éducatifs. La finalité? Faire évoluer les pratiques, en créant des référentiels d’intervention partagés par les bénévoles et les professionnels. In s’agit pour cela de mettre en place une méthodologie de recueil des données dans une logique de coopération entre sites, de créer de la connaissance pour essaimer dans d’autres territoires.
Aujourd’hui, 15 réseaux associatifs et institutionnels nous ont rejoints. Ils pourront se mobiliser à l’échelon local et national ou encore enrichir la réflexion par leurs travaux. La Fédération nationale des centres sociaux, par exemple, va mener une expérimentation dans son réseau. Les Francas vont relancer un groupe de réflexion sur le sujet. Le projet va être conduit pendant quatre ans, une durée volontairement longue pour accorder du temps à l’expérimentation et valoriser la mobilisation des politiques sur ce sujet.