PRomotion des Initiatives Sociales en Milieux Educatifs

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ARGUMENTAIRE

1.    La fabrication familiale de la réussite scolaire.

Bien que le rôle du milieu familial dans les trajectoires et la réussite scolaires soit un thème très classique depuis les travaux fondateurs de Boudieu et Passeron (1964, 1970) ou Bernstein (1971), les recherches sur  les pratiques familiales dans ce domaine laissent inexplorés certains aspects, tandis que d’autres ont été particulièrement documentés. Les stratégies parentales de construction de la réussite scolaire restent ainsi essentiellement envisagées sous l’angle du choix des établissements ou de la classe (Van Zanten et Broccolichi, 1997 ; Felouzis et al., 2007 ; Poupeau 2009). Cet intérêt se justifie totalement car ces stratégies ont des effets sur les conditions d’apprentissage largement montrés. Par ailleurs, de nombreuses recherches ont également montré comment, au sein même des établissements, les modalités d’organisation internes pouvaient avoir des effets déterminants sur la réussite (Duru-Bellat et Mingat 1997).

Cependant, ces données, tout comme celles qui confortent les acquis de la sociologie de l’éducation des années 1970 sur l’importance du capital culturel hérité dans la réussite scolaire, laissent relativement de côté la question de la construction par les familles du bon élève. Si les stratégies des parents d’élèves avisés qui cherchent à placer leurs enfants sur le chemin de la réussite scolaire ont été très documentées, l’accent est moins souvent mis sur la fabrication précoce, en amont, du bon élève. Les enquêtes réalisées sur l’encadrement des enfants qui ont connu une trajectoire scolaire d’excellence sont pourtant instructives (Marry et Ferrand, 1999 ; Daverne et Yves Dutercq 2009). Elles mériteraient cependant d’être étendues à l’ensemble des pratiques familiales.

En effet, est-il encore possible, dans un contexte où la concurrence s’est vivement accrue dans l’accès aux biens scolaires les plus valorisés de faire comme si l’héritage culturel se transmettait uniquement par osmose, comme l’écrivaient Bourdieu et Passeron dans les années 70 ? On peut en douter lorsque l’on considère les écarts de compétences manifestés très tôt par les élèves, avant même certains apprentissages officiels. Ne sous-estime-t-on pas aujourd’hui l’activité des parents dans la construction du bon élève qui fera par comparaison apparaître les autres comme moins «performants »? De même, toutes les formes d’implication des parents sont-elles efficientes en termes d’acquisitions ? L’exemple de la lecture est à ce titre particulièrement révélateur puisque des évaluations réalisées à l’entrée du CP révèlent qu’avant tout apprentissage officiel, des écarts de performance en lecture sont déjà installés.

Sont ici sollicitées les présentations portant sur les pratiques d’enseignement précoce au sein de la famille, le recours à des cours particuliers ou à des formes de coaching scolaire, le choix des jeux à visée cognitive, la construction des dispositions (régularité, discipline, rapport aux objets scolaires). Les pratiques consistant à « doubler » l’enseignement de l’école par un apprentissage directement scolaire s’avèrent également intéressantes pour la comparaison (achat de manuels scolaires syllabiques contre les méthodes des enseignants par exemple).

Les pratiques familiales ne sont pas forcément pensées ni vécues comme des stratégies et peuvent n’avoir aucun caractère coercitif : à ce titre, les motivations des parents, telles qu’elles s’expriment, peuvent être interrogées et mises en relation avec l’intensification de la concurrence scolaire. Il pourra sembler également intéressant d’interroger les fondements pédagogiques de telles pratiques : quelles idées les familles se font-elles des pratiques pédagogiques « efficaces » ? Sur quelles théories s’appuient-elles, issues de quels domaines ? Quel type de littérature est mobilisé ?

2.    Les processus scolaires d’ajustement aux publics.

Une fois identifiées les pratiques familiales d’accompagnement scolaire, se pose la question de la gestion institutionnelle de l’hétérogénéité des élèves. Face à des publics qui présentent des dispositions différenciées liées à cette socialisation familiale, comment l’institution scolaire et notamment les enseignants vont adapter ou non leurs pratiques pédagogiques, leurs représentations, et plus généralement leurs attitudes vis-à-vis des élèves ? Sont ils ou non enclins à percevoir comme inaptitudes inégales des « dons » préalablement construits ? Comment ces représentations affectent elles leurs pratiques quotidiennes dans la classe à travers les interactions, l’organisation des séances, la gestion du temps, le type d’activité proposée ?

Les pistes lancées par le sociologue Britannique Basil Bernstein (1971) sur la manière dont les pédagogies scolairement mises en œuvre favorisent ou défavorisent l’acculturation des élèves issus de classes populaires ne restent-elles pas largement inexplorées, de même que les processus d’adaptation des enseignants aux difficultés ou aux facilités supposées des élèves ? On sait déjà que sans préjuger du pouvoir de la pédagogie à déjouer les déterminismes sociaux, les pratiques sont influencées par les représentations qu’ont les enseignants des « capacités » des élèves et qu’en retour, elles ont des effets sur les apprentissages. Dans quelle mesure certaines « certitudes » pédagogiques issues du sens commun ou importées d’autres disciplines ont elles intégré le champ scolaire en se cristallisant dans des dispositifs pédagogiques précis ? Ces certitudes peuvent être relatives à une essentialisation de l’enfant en tant qu’apprenant (il apprend mieux par le jeu, il faut d’abord développer le langage, et…) sans que soit proposée une validation empirique de ces certitudes.

Certaines recherches ont montré comment l’inertie des programmes et leur éloignement trop grand des intérêts et dispositions d’un public désormais plus hétérogène pouvait avoir des effets dissuasifs sur certaines pratiques des élèves, par exemple l’enseignement de la littérature au lycée (Baudelot et Cartier, 1998). D’autres ont montré que les enseignants qui avaient à faire à des publics populaires tendaient à s’ajuster en revoyant à la baisse leurs exigences (Charlot, Bautier et Rochex, 1992). Bruno Suchaut a montré par ailleurs en s’appuyant sur les usages du temps à l’école primaire et maternelle comment ceux-ci pouvaient varier en fonction des seuls choix effectués par les enseignants et comment ces usages pouvaient déterminer des différences d’acquis (Suchaut, 1996).

Corrélativement, dans un contexte d’individualisation croissante de l’action publique, sur quels principes pédagogiques s’appuient les dispositifs scolaires « alternatifs » et de « réussite éducative » que l’on peut identifier (écoles de la seconde chance, filières spécialisées, méthodes « différentes » accompagnement à la scolarité au sein des écoles tous publics) et quels sont les résultats scolaires qu’ils peuvent faire valoir ?

Ces recherches montrent que la piste des ajustements pédagogiques aux publics scolaires ou étudiants (que ces ajustements soient à la hausse, à la baisse ou décalés) mérite d’être creusée indépendamment de la conformité des pratiques aux consignes officielles. Comment ces différents dispositifs sont-ils accueillis par les enseignants ? Comment les investissent-ils ? Comment s’accommodent-ils des contraintes institutionnelles ?

Sont attendues des contributions permettant d’interroger de déconstruire ces idées reçues dans le champ de l’éducation primaire et maternelle, de manière non exclusive.

Conditions : voir sur le site  CALENDA

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