« Et si on passait des mots aux chantiers de travail ? » La proposition d’Henriette Zoughebi, vice-présidente du Conseil régional en charge des lycées, s’adresse prioritairement à l’Education nationale. Réuni le 30 septembre, le Forum régional de lutte contre le décrochage a fait salle comble. Association, élus, représentants de l’Education nationale ont travaillé ensemble une après-midi à essayer de dépasser les frontières et trouver les bons protocoles pour diminuer le décrochage. Pour H Zoughebi il reste beaucoup à faire.
« Derrière les chiffres du décrochage, une réalité humaine, des jeunes en souffrance qui peinent à trouver leur place dans la société, un gâchis, une terrible injustice car ceux qui quittent l’école sont issus de milieu populaire ». Lors du Forum régional de lutte contre le décrochage, le 30 septembre, Henriette Zoughebi est allée au delà des statistiques pour évoquer le destin des jeunes décrocheurs dans un pays où le diplôme est la clé de l’insertion professionnelle. La région Ile-de-France a fait de la lutte contre le décrochage scolaire sa grande cause en 2012. Depuis 1999, avec le dispositif Réussite pour tous, elles soutient des structures, comme les micro lycées et des projets déposés par les lycées (une centaine par an). Souvent il s’agit de projets pour travailler sur l’estime de soi ou l’accueil des élèves. En 2013 la loi Sapin a donné aux régions la coordination des dispositifs de lutte contre le décrochage. La région vient de signer avec les académies un dispositif de sécurisation des parcours dans 4 zones (nord est parisien, Aubervilliers, Gonesse Sarcelle, Coulommiers). Autant de raisons pour faire se rencontrer les acteurs et réfléchir aux dispositifs mis en place.
Les dispositif régionaux
Le Forum a présenté de nombreux dispositifs de lutte contre le décrochage ou de prévention. Par exemple le Samely, un dispositif d’accompagnement des lycéennes mères ou enceintes. Un autre dispositif accompagne le passage du collège vers le lycée pour des jeunes repérés comme fragiles. Deux micro lycées , celui du Bourget et « le lycée des possibles » de La Celle Saint Cloud ont montré comment on peut remettre les jeunes en formation. La journée s’est terminée avec une intervention de Pierre Léna, président de La main à la pâte qui a notamment expliqué comment la culture ou les arts peuvent remobiliser les décrocheurs.
Benjamin Moignard, Observatoire Universitaire International Éducation et Prévention, Espe de Créteil, était le grand témoin de la journée. Il a insisté sur la nécessité pour les partenaires d’être d’accord sur leurs objectifs : la lutte contre le décrochage vise-t-elle à occuper les décrocheurs pour éviter la délinquance ou à les remobiliser pour une entrée en formation ?
Education nationale : Passer des mots aux actes
« D’un coté il y a les associations et les collectivités locales, de l’autre l’Education nationale. Il est important de voir à quelles conditions des partenariats peuvent se mettre en place », nous a dit H Zoughebi. « Pour cela il faut bien préciser les objectifs poursuivis ». Interrogée sur les laissés pour compte des académies, par exemple les 700 à 800 élèves qui restent sans affectation faite de places dans leur filière chaque année à Créteil, H Zoughebi a à la fois rendu hommage au travail des enseignants et marqué sa volonté de secouer l’institution scolaire.
« On ne cesse de parler de lutte contre les inégalités », nous a-t-elle dit. »Mais il y a un monde entre le déclarations et les mesures. J’attends de l’Education nationale qu’elle organise pour de vrai des chantiers de travail sur l’estime de soi ou l’ennui à l’école. On voit bien, à travers les demandes du dispositif Réussite pour tous, l’importance de la demande de psychologues dans les lycées. En vrai les moyens dans l’éducation nationale sur ce sujet ou sur les pratiques culturelles, nécessaires au travail sur l’estime de soi, diminuent », dit-elle. « On sait ce qu’il faut faire mais on ne le fait pas faute de moyens ». La région a pu évaluer par exemple l’efficacité de l’accompagnement scolaire mis en place au lycée Nobel de Clichy le soir. « La région peut contribuer à mettre en place un réseau d’acteurs. Je suis disponible pour cela ».
La prochaine étape sera l’organisation, début 2015, d’un grand colloque début 2015 sur les politiques de lutte contre le décrochage. Des experts québécois, français, nordiques échangeront sur les pratiques en cours.
François Jarraud