PRomotion des Initiatives Sociales en Milieux Educatifs

In Le blog de Bernard Desclaux :

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Deuxième partie de l’examen de certains obstacles et ambiguïtés du pdmf que j’ai commencé d’explorer dans le post précédent  qui poursuit l’explicitation de mon intervention à Angers.

 

Les obstacles idéologiques

Après avoir présentés les obstacles dus aux rôles professionnels, j’en aborde deux autres.

La coopération

J’ai déjà abordé d’une certaine manière cet obstacle dans le post précédent. Ici, je vais le prendre du côté de l’organisation du travail.

Monica Gather Thurler dans son livre « Innover au cœur de l’établissement scolaire », 2000 ESF éditeur a proposé une métaphore pour décrire le fonctionnement de l’établissement scolaire :

La boîte d’oeufs    boite oeufs

 

Le pdmf étant une activité à mener par tous, elle nécessite une collaboration entre les acteurs. Or, « Le métier d’enseignant fait partie des professions qui favorisent l’isolement : il demeure légitime de travailler seul, dans un espace protégé contre toute ingérence. Selon Ranjard (1998), qui parle à ce sujet d’une « égoïsme collectif », l’individualisme n’est pas seulement une norme implicite, ou un « droit », il est un choix culturel, considéré souvent comme une vertu. Il équivaut à « une invitation à régresser vers la toute-puissance ». » p. 65

La classe, le cours, la discipline, isolent et protègent. Dans un tel univers, la coopération qui suppose de sortir de ces « creux » est un danger. Tout frottement peut faire éclater la coquille.

 

Robet Ballion dans son livre, « Le Lycée, une cité à construire », Paris, Hachette-Éducation, 1994, utilisait la notion de pyramide plate.

pyramide1

Un établissement scolaire, du point de vue de son organisation est une structure à deux étages : la direction, les enseignants. Il n’existe pas au contraire des organisations habituelles, des niveaux intermédiaires permettant la coordination des actions. Il avait pointé dans ce livre que les lycées qui « s’en sortaient » avaient justement cherché à créer de nouvelles fonctions de coordination. Dans le cas du pdmf ou de l’eao, l’attribution d’heures aux professeurs principaux ne résout pas la question de la coordination des actions. Le professeur principal, alors que c’est là sa fonction officielle, ne coordonne pas l’équipe éducative ! Il exerce des tâches que les autres n’ont pas à faire.

On peut reprendre également l’image que François Dupuy utilise pour parler de l’entreprise : une organisation en silos (Lost un management. La vie quotidienne des entreprises au XXIe siècle. Seuil, 1011). Quelques extraits pour le plaisir…

« Critiquer le travail en silos, en « tuyaux d’orgues », est tout aussi banal que constater à quel point ce mode d’organisation perdure, voire se répand. Et cela pour une raison simple qui sera développée ici : ce mode de fonctionnement dut initialement la réponse à une volonté d’ »organisation scientifique du travail » (Taylor, Fayol) qui permettait de définir des tâches claires, accomplies de façon planifiée par des individus interchangeables. » (p. 63)

« La forme segmentée et séquentielle du travail protège différemment les membres de l’organisation. Aucun d’entre eux, tout d’abord, n’est comptable du résultat final auprès du client qui se trouve « balloté » entre les différentes parties, chacune l’assurant que l’erreur vient d’ailleurs et ne lui laissant aucune chance de débrouiller l’écheveau auquel il est confronté. » (p. 65)

« … cette forme de travail offre une autre protection qui se révèle à l’expérience la plus précieuse, notamment pour les cadres. Protégés par les cloisons bien étanches de leurs silos et par la mécanique de succession des tâches, ils n’ont pas à « coopérer » avec les autres, leurs collègues, les services voisins. Cette notion de coopération est intéressante car elle véhicule, dans notre univers mental, une connotation très positive : celui qui coopère, c’est celui qui est ouvert aux autres, qui n’a rien à cacher et qui accepte bien volontiers de se « découvrir » au bénéfice du résultat obtenu, ici par le client, mais plus globalement par l’intérêt général. » (p. 66)

« La coopération n’est pas un comportement naturel ou spontané, du moins dans les situations quotidiennes de travail. Pour les acteurs concernés, elle remplace l’autonomie par la dépendance, la neutralité de la relation par la confrontation. C’est bien ce que les univers administratifs, pour ne citer qu’eux, ont cherché à éviter à tout prix, et cela permet de comprendre leur farouche résistance à l’idée de passer à un autre mode de travail qui soudain les « déprotègerait », face aux usagers devenus des clients, face à leurs paris devenus des collègues, les amenant ainsi à se confronter à ce que Jean-Paul Sartre appelé l’ »enfer » », c’est-à-dire les autres. » pp. 66-67

Le partenariat

L’éducation à l’orientation comme le pdmf suppose une ouverture au monde extérieur, à l’environnement social, à la vie économique. Cela suppose de rentrer en relation avec des acteurs extérieurs à l’établissement scolaire et d’établir des partenariats. Fondamentalement très difficile de considérer l’autre comme un équivalent dans la relation.

Les parents, les familles, sont-ils des partenaires ? Est-ce possible ? En France l’école a été largement conçue « contre » la famille. C’est une institution qui capte l’enfant pour le protéger des influences familiales et en faire un citoyen. L’école est fermée et mise à distance des adultes, c’est un sanctuaire, expression encore très souvent utilisée pour protéger l’école contre les dangers extérieurs. On peut rappeler également que le lycée est d’abord un internat et pas seulement pour des raisons géographiques. Aujourd’hui un anti-partenariat avec les parents est mal ressenti, du côté des parents, mais du côté établissement scolaire, j’ai le sentiment que la suspicion est encore très vivace.

Pour l’entreprise ou le rapport aux mondes professionnels, les choses sont plus « claires ». Malgré toutes les conventions passées entre le ministère et les organisations professionnelles, et les associations académiques ou départementales, le monde de l’éducation nationale représente l’intérêt général face aux intérêts particuliers du monde économique.

Enfin concernant les collectivités territoriales, les choses sont plus complexes. Dans notre pays centralisé, le local est ressenti comme dangereux, et la centralisation, y compris la création des inspecteurs porteurs de normes « centrales » ont été revendiquées par le monde enseignant comme des protections vis-à-vis de l’ingérence du local dans l’établissement. Mais en même temps il existe un lien financier avec le local qui a toujours été, et qui se trouve maintenant légiféré par les lois de décentralisation. Ce lien impose d’une certaine manière un rapport d’échanges.

L’ambiguïté fondamentale

J’ai déjà abordé ce point.

Deux objectifs de ces dispositifs semblent être poursuivis : l’amélioration du fonctionnement de l’orientation scolaire d’un côté et de l’autre une acquisition des capacités à s’orienter tout au long de la vie. D’un côté on serait dans une démarche type résolution de problème avec recherche de « la » solution, et de l’autre sur une démarche d’apprentissage qui suppose ouverture des possibles et expérience avec essai et erreur. Les deux démarches sont en contradiction. Elles ne peuvent vivre ensemble ni surtout être portées par les mêmes acteurs, et en particulier par le professeur principal comme c’est le plus souvent le cas.

Les procédures d’orientation étant maintenue, il est « normal » que l’éducation à l’orientation ou le pdmf soient interprétés du côté de celle-ci. Les pays où ces dispositifs ce sont développés ces démarches sont des pays sans procédures d’orientation.

C’est une des raisons pour lesquelles je réclame la suppression des procédures d’orientation : Pourquoi faut-il supprimer les procédures d’orientation

 

 Bernard Desclaux

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