In Lagazette des communes – le 18 avril 2013 :
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Au nom d’une plus grande équité, la circulaire de rentrée publiée le 11 avril 2013 modifie les critères d’attribution des dérogations à la carte scolaire. Inutile pour ses détracteurs, insuffisant pour les autres.
Publiée le 11 avril 2013, la circulaire de rentrée modifie les critères d’attribution des dérogations à la carte scolaire dans le secondaire. Largement utilisé par les familles désireuses d’éviter l’établissement scolaire du quartier, le motif « parcours scolaire particulier » est rétrogradé en queue de liste.
Viennent désormais en premier le handicap, la prise en charge médicale lourde et le fait d’être boursier.
Si l’association de parents d’élèves FCPE se félicite de la démarche, la mesure irrite la PEEP : « C’est une mauvaise solution à un vrai problème. Cela change les règles du jeu et le sens du recrutement pour les options et cela va accentuer la défiance entre les parents et l’institution. Par définition, le recrutement pour ces options particulières s’adresse à des secteurs plus larges que leur quartier d’implantation », souligne Valérie Marty, sa présidente.
Question de moyens – Elle s’insurge : « C’est prendre le problème à l’envers ! Il vaudrait mieux mettre les moyens et faire en sorte que les parents aient envie d’inscrire leurs enfants dans les établissements évités, il vaudrait mieux leur donner les moyens d’avoir un bon niveau. »
Tout comme Henriette Zoughebi, vice-présidente en charge des lycées et des politiques éducatives en Ile-de-France, le sociologue Pierre Merle partage ce dernier point: « La solution la plus logique serait de rapprocher l’offre pédagogique des écoles publiques aisées de celle des établissements populaires. »
Le privé au même régime – Pour le scientifique, la mesure devrait certes limiter l’ampleur des dérogations. Mais elle présente un inconvénient non négligeable : « Les parents qui veulent vraiment éviter ces établissements se tourneront vers le privé. Or, les écoles privées ne sont pas soumises aux mêmes règles d’acceptation que les écoles publiques. On assiste à un phénomène d’embourgeoisement des écoles privées et de paupérisation des écoles publiques populaires. Il faudrait des règles d’affectation communes. »
L’Ile-de-France vise la mixité sociale et scolaire. Henriette Zoughebi rappelle combien cette région est affectée par ces stratégies d’évitement. N’attribuant pas les dérogations, la collectivité a entrepris d’évaluer le phénomène et ses conséquences au travers des chercheurs de l’Observatoire de la réussite éducative et de la mixité sociale qu’elle a mis sur pied en 2011.
Inscrire la polyvalence dans le programme d’investissement – En attendant, que pourrait faire une région ? Henriette Zoughebi énumère les pistes suivies par sa collectivité.
Tout d’abord : « Il faut doter les lycées des quartiers des mêmes moyens que les lycées du centre de Paris : même options, même qualité d’encadrement. L’Ile-de-France a inscrit la polyvalence dans son programme d’investissement. »
Pour la vice-présidente en charge des lycées et des politiques éducatives, la seule chose qu’aient démontré les internats d’excellence (3 en Ile-de-France), c’est « qu’on obtient des résultats quand on met les moyens ».
Malheureusement, pointe l’élue, la démarche privait aussi les lycées populaires de leurs éléments moteurs : pour elle, il faut inverser la tendance.
Charte d’affectation des places d’internat – Pour ce faire, « l’Ile-de-France construit 3 000 places d’internat et l’Etat, au travers de l’Agence nationale de rénovation, en finance 2 000 autres. Nous élaborons, avec les rectorats, une charte d’affectation de ces places d’internat, pour mélanger les jeunes qui sont à la recherche d’une certaine option et viennent de loin et des jeunes du quartier, qui ne jouiraient pas des conditions adaptées pour étudier dans leur famille. C’est une façon d’encourager la mixité scolaire et sociale », espère Henriette Zoughebi.