PRomotion des Initiatives Sociales en Milieux Educatifs

Mise en oeuvre du Processus de Bologne: un rapport de l’EUA souligne la nécessité d’une plus grande autonomie des universités

Alors que le précédent rapport (European university association) sur l’implantation du processus de Bologne dans les institutions d’enseignement supérieur des pays membres du processus, Trends III, mettait en évidence une faible mise en place du processus dans les établissements, la version provisoire de Trends IV révèle des progrès considérables, malgré des obstacles dûs le plus souvent à un manque d’autonomie des universités. Dans une large majorité des 62 établissements sondés dans 28 états, les réformes de Bologne ont été intégrées à tous les niveaux, constatent les experts de l’EUA. « Encore plus remarquable », ajoutent les experts de l’EUA, « ces réformes, qui avaient été accueillies avec beaucoup de scepticisme par les universitaires, ont été finalement mises en oeuvre avec non seulement un véritable investissement mais aussi la volonté « d’y apporter du sens ». À ce stade de la mise en oeuvre, les établissements sont principalement concernés par l’introduction des nouveaux diplômes et des ECTS. Beaucoup d’institutions réfléchissent également à leur système d’assurance qualité et à leur politique de formation à la recherche au niveau doctoral mais n’assimilent pas nécessairement ces réflexions au processus de Bologne. Celui-ci est souvent réduit au système d’enseignement reposant sur deux cycles. Voici les points principaux du rapport dont la version définitive sera présentée à Bergen les 18 et 19 mai prochains.

RéALITé. « Les universités européennes ont fait mieux que de rejoindre le processus de Bologne. Elles l’ont adopté », indique Trends IV. Pour créer un espace commun de l’enseignement supérieur en Europe, il revient désormais aux gouvernements « d’en créer les bonnes conditions » et aux institutions d’enseignement supérieur « de transformer le possible en réel ». Trends IV montre que cet espace commun est en passe de devenir une réalité, selon l’EUA.

CONTEXTE NATIONAL. Différentes visites menées dans un même pays ont démontré qu’un même contexte national pouvait engendrer des situations différentes. Certaines universités ont en effet choisi de saisir l’opportunité du processus de Bologne et d’en optimiser les effets sur leur organisation alors que d’autres attendent le dernier moment pour mettre en oeuvre les inévitables changements induits par ce processus. Toutefois, les experts de l’EUA constatent que le contexte national a un réel impact sur l’appropriation par les établissements du processus.

RéFORME. Les experts de l’EUA constatent que les réformes mises en oeuvre dans le cadre du processus de Bologne s’intègrent dans la majorité des pays visités dans un contexte plus large de remaniements des systèmes d’enseignement supérieur. La Hongrie et l’Espagne venaient en effet de passer à un nouveau système législatif au moment des enquêtes de Trends IV. Au Portugal, une réforme vient de passer en février dernier. Il n’y a qu’en Angleterre et en Turquie que les réformes découlant du processus de Bologne sont considérées comme n’étant que partiellement en phase avec la situation nationale. Dans un tiers des 28 pays sondés, les conférences de recteurs assurent que la mise en place des réformes de Bologne fait partie intégrante d’un mouvement plus large de remaniements des systèmes d’enseignement supérieur.

EFFET LEVIER. L’EUA indique par ailleurs que les deux tiers des 60 institutions visitées ont décidé d’adopter les réformes de Bologne qui leur étaient imposées par les autorités nationales et de se les approprier afin de les intégrer dans leur propre stratégie de développement. Autrement dit, ces établissements ont transformé un processus dit « top down » (du haut vers le bas) en un processus « bottom up » (du bas vers le haut). Même si certains aspects du processus ou de sa mise en oeuvre suscitent des critiques (beaucoup déplorent par exemple qu’on s’achemine vers un niveau « Licence » ne représentant que trois années d’études), seule une institution interrogée déclare que les réformes de Bologne n’ont aucune valeur ajoutée et rejette le processus en bloc. Une des raisons de l’adhésion des universités au processus réside notamment dans le fait que ces établissements ont pris conscience de la nécessité de réviser leurs cursus. Bologne a donc eu « un effet levier ». Parfois, le fait qu’il y ait eu une pression extérieure pour initier les changements a permis une mise en oeuvre beaucoup rapide que si l’initiative n’avait été prise qu’en interne.

TRANSPARENCE. Parmi les éléments les plus appréciés au sein du processus de Bologne, les établissements citent le fait que les réformes qui en découlent permettent de se concentrer sur les besoins et compétences des étudiants et d’instaurer une plus grande transparence au sein des établissements. Le processus de Bologne implique également l’introduction de programmes interdisciplinaires. Certains établissements en France, en Finlande, au Danemark ou en Suisse rapportent par ailleurs que Bologne leur a permis d’accroître la coopération interuniversitaire au niveau régional. Beaucoup d’universités indiquent que la mise en oeuvre du processus a provoqué une plus grande cohérence institutionnelle, un renforcement de la transparence et une meilleure communication horizontale au sein de l’établissement.

RéGLEMENTATIONS NATIONALES. Les sites visités ont montré que la mise en oeuvre en interne des réformes de Bologne était souvent soit affectée, aidée ou entravée par les conseils, le support ou les réglementations au niveau national. À ce titre, l’EUA relève de nombreuses critiques sur le comportement des ministères, à qui l’on reproche de produire trop de textes réglementaires autour de ce processus après trop peu de consultations des acteurs principaux, à savoir les établissements. Certaines universités affirment qu’alors qu’elles auraient eu besoin de plus de conseils de la part de leur ministère, elles se sont trouvées confrontées à des fonctionnaires moins au fait qu’elles sur les enjeux et implications du processus. Le rapport fait également état de récriminations relatives à une surréglementation administrative, prématurée, voire parfois inutile qui interfère avec l’autonomie des établissements. Ceci est le cas en Belgique en France, en Allemagne, en Grèce, en Hongrie, en Italie et en République slovaque. Au Royaume-Uni, c’est plus le manque d’intérêt du ministère pour le processus de Bologne qui est dénoncé qu’une quelconque interférence.

éTUDIANTS. Beaucoup d’universités déplorent de ne pas pouvoir sélectionner leurs étudiants mais de devoir accepter, au nom de lois nationales, les titulaires des diplômes de l’enseignement secondaire (Abitur, matura, baccalauréat…), sans autres critères de sélection. Les représentants de ces universités estiment que de telles contraintes les empêchent d’établir un profil de qualifications nécessaires pour suivre leurs programmes. Les universités les plus autonomes, telles que celles du Royaume-Uni ou d’Irlande, plaignent d’ailleurs leurs consoeurs européennes de devoir subir autant de contraintes nationales.

AUTONOMIE. Dans la majorité des établissements le manque d’autonomie est ressenti comme un obstacle dans la mise en oeuvre des réformes découlant du processus de Bologne et dans la flexibilité des institutions. Dans certains états toutefois, le rapport note une évolution législative. En Autriche et au Danemark, par exemple, l’autonomie des universités s’est accrue dans le cadre de réformes récentes. Un recteur autrichien a d’ailleurs indiqué aux experts de l’EUA qu’il s’était senti subitement en mesure de réellement piloter son institution suite à la réforme. En règle générale, note l’EUA, on se dirige lentement vers plus d’autonomie pour les universités en Europe. Mais cette tendance n’est attribuée au processus de Bologne dans un seul pays: la Lituanie.

MOYENS FINANCIERS. Dans la majorité des états les établissements déplorent le fossé existant entre les déclarations des ministres à propos du processus lors des sommets officiels et les moyens réellement accordés à sa mise en oeuvre. La plupart des états semblent se contenter de créer le cadre législatif nécessaire à l’application du processus mais ne dégagent pas de fonds supplémentaires. La plupart des coûts induits par les restructurations dues aux processus sont par conséquent supportés par les établissements eux-mêmes. « En ces temps de budgets institutionnels restreints ceci signifie que les réformes de Bologne sont effectuées aux dépens d’autres aspects essentiels de l’enseignement supérieur tels que la recherche », en déduisent les auteurs du rapport.

FRANCE. Les universités françaises sondées pour ce rapport sont Lyon-I et Aix-Marseille-III. La CPU (Conférence des présidents d’univesité) a également répondu au questionnaire de l’EUA.

Rapport en ligne à l’adresse:

[http://www.eua.be/eua/jsp/en/upload/TrendsIV_draft_250305.1111841019410.pdf]

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