Ce rapport s’inscrit dans la continuité du travail mené les quatre années précédentes2, poursuivant l’analyse des usages des TICE en Angleterre. Il a été réalisé à l’été 2012 à la demande du pôle de compétitivité des contenus numériques, Cap Digital Paris-Région. Il n’engage toutefois que son auteur. Il fait suite à une mission au BETT 2012 financée par le Pôle de compétitivité qui s’intégrait dans un dispositif global organisé conjointement pour la 5ème année consécutive par Cap Digital Paris-Région, PM Conseil, la Chambre de Commerce et d’Industrie de Paris avec le soutien d’Ubifrance et du Ministère de l’Education Nationale et de la Jeunesse, dispositif qui comprenait aussi un pavillon regroupant dix exposants français3.
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Ce rapport marque la fin d’un cycle. Le BETT quittera en effet l’an prochain l’Olympia, lieu d’exposition magique bâti au centre de Londres en 1886 (mais que les premiers Français Libres qui l’occupèrent en juin 1940 jugeaient déjà peu confortable4), pour s’installer à l’est des Docks dans le moderne ExCel qui accueille cet été nombre d’épreuves des jeux Olympiques, nous y reviendrons. Il ne pouvait donc être question, pour clore ce cycle, de rompre avec la tradition de ces rapports consistant à leur donner des titres de morceaux de musique. Le très pessimiste It’s all over now Baby Blue de Bob Dylan a un moment été envisagé mais, Dylan ayant déjà été à l’honneur l’an passé, c’est finalement l’ironique It’s the end of the world as we know it (And I Feel Fine), titre de 1987 du groupe REM5, que nous avons choisi car il nous semblait mieux résumer le contexte de ce BETT.
Un contexte marqué par la crise économique, une réduction drastique de la dépense publique et une Grande-Bretagne alors déjà guettée par la récession6 où « 275 000 emplois de la fonction publique ont été supprimés depuis un an » et où « la hausse de la TVA de 17,5 % à 20 % a provoqué une poussée d’inflation ». Avec un paysage éducatif marqué aussi par des changements majeurs qu’il est nécessaire d’analyser en profondeur (ce que nous ferons dans les chapitres 2 à 4) pour mettre en perspective la nouvelle situation des TICE (dans les chapitres 5 et 6, nous étudierons la nouvelle approche du curriculum puis les données du BESA). Mais aussi un BETT où les acteurs s’efforçaient de faire bonne figure malgré l’accumulation des difficultés.
1- Un BETT qui illustre la résilience britannique : Salon de maturation ? De la stabilité ? De l’attentisme ou de l’incertitude ? Un peu de tout cela pour un BETT qui, dans ce climat général de crise sévère, témoignait avant tout de la légendaire endurance du peuple britannique. Et du savoir faire de ses organisateurs pour masquer intelligemment, via des zones de services appréciées (repos, restauration, WiFi…), les espaces vides liés à la baisse probable du nombre d’exposants (aucun chiffre précis n’a été officiellement annoncé). Ces vides étaient particulièrement visibles dans les galeries du niveau supérieur qui étaient les lieux d’élection traditionnels des représentants de la Cottage Industry des technologies éducatives. Ces derniers, qui formaient les années précédentes la composante la plus originale mais aussi la plus fragile du BETT, sont à n’en pas douter, avec les consultants, les premières victimes de la crise. Mais ils ne sont pas les seuls. On verra plus loin que les entreprises leaders ont aussi été durement affectées par les changements de politique et on analysera au chapitre 6 la très nette baisse des budgets TICE des établissements. Dans ce contexte, la croissance des visiteurs n’apparaît que plus surprenante.
Du 11 au 14 janvier, le BETT 2012 a accueilli 30 372 visiteurs soit une hausse de 3,84 % par rapport à 2011 et un chiffre qui dépasse de très peu le record de 2009.7 Officiellement, le salon occupait 104 % de la surface d’exposition de l’Olympia, ce qui justifierait le déménagement l’an prochain dans la zone Est des Docks de Londres, au moderne ExCel.8 Ce ne sera pas le premier changement. Le premier BETT avait eu lieu en 1985 au Barbican Centre. Il s’agissait alors d’un évènement spécialisé pour les enseignants. Peu à peu, il est devenu une sorte de Foire de Francfort de l’éducation selon Ray Barker, Directeur du BESA9.
L’argument du manque de place n’est pas totalement convaincant pour l’observateur expérimenté qui a noté ces trois dernières années une réduction progressive de l’occupation par des exposants des divers espaces annexes, certes assez vieillots, de l’Olympia.
Si Ray Barker, interrogé lors du BETT, minimise naturellement ce contexte de crise, relativisant l’impact de la fin du programme de rénovation des établissements secondaires BSF10 (seules quatre compagnies bénéficiant vraiment selon lui de ce type de financement) et soulignant que l’argent est toujours là mais différemment, la vraie raison du déménagement semble ailleurs. Face à la crise, le BETT doit diversifier ses sources de financement.