In le café pédagogique :
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"Le décret inscriptions était censé mettre tout le monde sur un plan d’égalité. Mais dans la pratique c’est loin d’être le cas", affirme RTL. La chaîne belge est allée enquêter en caméra cachée. Elle montre les techniques utilisées par les chefs d’établissement pour faire le tri dans les inscriptions. Et pose la question de la régulation des inscriptions dans un pays tout acquis à la suppression de la carte scolaire. Peut-on imposer la mixité sociale ?
Dans ce pays où la carte scolaire a été historiquement éradiquée, la régulation de l’offre s’effectue en 6ème par une procédure d’inscription qui vise officiellement la mixité sociale (20% des places pour les élèves venant d’écoles moins favorisées). En fait la suppression de la carte scolaire aboutit à ce que les directions des établissements recherchés fassent le choix des élèves en dissuadant les parents par des frais ou d’autres exigences. La procédure complexe, dont les parents reçoivent les résultats début juin, a du mal à encadrer les stratégies des établissements. La liberté accordée aux parents est en fait en partie détenue par eux.
Dans une étude de 2008, avant le fameux décret, Benoit Galand (UCL) montrait que "concernant les établissements scolaires, le libre choix des familles a pour conséquence de les mettre en concurrence pour capter les élèves…Plus précisément, les recherches en sciences de l’éducation montrent que cette mise en concurrence a généralement pour effet d’inciter les écoles à sélectionner les publics les plus rentables" c’est-à-dire les élèves les mieux adaptés àl’Ecole, c’est-à-dire généralement ceux des milieux favorisés. Le mouvement est renforcé par les démarches des parents de milieu défavorisé. "Schématiquement, les parents peu ou pas scolarisés et/ou vivant dans une certaine précarité économique tendent à privilégier le critère de proximité, l’école du quartier". Sans dispositif compensateur, le libre choix augmente la ségrégation scolaire". Cette étude a poussé le gouvernement à sortir de la liberté totale, pourtant historique, pour mettre en place une commission de régulation. C’est cette nouvelle procédure qui est critiquée par la diffusion des abus constatés par RTL.
Le cas belge s’avère décidément intéressant. Les mauvais résultats du système éducatif français belge , du fait de ses discriminations, avaient amené le gouvernement à rompre avec la liberté totale d’inscriptions pour envisager d’abord une gestion chronologique des inscriptions, puis une gestion régulée de façon complexe. L’exemple belge montrait que la liberté totale de choix d’établissement était un leurre couteux en terme d’efficacité scolaire et de justice sociale. L’émission de RTL montre que la régulation est une tâche complexe dans un pays où la tradition de discrimination est bien installée. Il ne faut pas pour autant revenir à la liberté de la jungle scolaire précédente, mais peut-être simplement se donner les moyens de mieux faire appliquer les règles.