« Les maires ont le sentiment qu’on agit sur leur terrain, alors qu’ils n’ont rien demandé. » Ce propos de Claudine Paillart, présidente de l’Association nationale des directeurs de l’éducation des villes de France (Andev), résume l’état d’esprit des élus locaux face au tourbillon de mesures nouvelles dans l’éducation: accompagnement éducatif, aide personnalisée, service minimum d’accueil (SMA), semaine de 4 jours, carte scolaire. Autant de sujets qui « fâchent », lâche un adjoint à l’éducation, sous couvert d’anonymat. « C’est un sentiment très répandu, quelle que soit la tendance politique, analyse Claudine Paillart. Plus la commune est structurée sur ces questions, plus il lui est difficile d’absorber des mesures nationales en contradiction avec sa politique éducative locale.
Les contraintes comme celles découlant du SMA posent des problèmes d’organisation: « Les décisions sont prises en urgence, regrette Véronique Simon-Chambaud, adjointe à l’enfance et à l’animation de l’espace éducatif de Kingersheim (68). Il faut assurer l’organisation avec les impacts parfois insoupçonnés, des horaires chamboulés pour les femmes de ménage, des familles qu’on ne voit plus le samedi matin. » Pour d’autres élus, c’est la relation aux administrés qui est atteinte: « C’est l’Education nationale qui prend les décisions. Le maire doit souvent justifier auprès des parents des positions qui ne sont pas les siennes », constate Jean-Marc Devôge, adjoint à l’éducation de Saint-Germain-lès-Corbeil (91).
De droite comme de gauche, élus de petites communes ou de grandes villes font un constat similaire et dénoncent des décisions unilatérales. UN sentiment dont Yves Fournel, adjoint à l’éducation de Lyon, se fait l’écho: « Globalement les décisions sont prises à l’emporte-pièce et à grand renfort médiatique. Elles suscitent incompréhension et craintes. Or ce sont les élus locaux qui doivent gérer. »
Président du Réseau français des villes éducatrices (RFVE), il veut cependant être constructif: « La réforme de la semaine de 4 jours a reposé la question des rythmes de l’enfant et de l’articulation des temps scolaires et non scolaires. La menace sur la scolarisation des moins de 3 ans remet sur la table la réflexion sur les contenus éducatifs, ainsi que sur la réussite éducative. Qu’en sera-t-il des internats de réussite éducative qu’en sera-t-il des budgets? »
Les élus tentent de faire face, « Notre première tâche consiste à limiter la baisse des effectifs des encadrants, explique Jean-Marc Devôge. Nous nous efforçons de scolariser au mieux les enfants dans le cadre des moyens fournis par l’Etat, en agissant sur les bâtiments comme sur l’accueil. » Amélioration des équipements, renforcement des horaires sur le périscolaire, soutient à l’accompagnement extrascolaire, amélioration de la restauration scolaire, développement des technologies de l’information et de la communication pour l’enseignement (TICE), « l’accent est mis sur les domaines traditionnels d’intervention des communes », relève Claudine Paillart. Avec une attention particulière portée au service rendu aux familles, dont les horaires atypiques se multiplient et qui comptent toujours plus sur les communes pour faire l’interface avec l’école.