In Universités et Territoires – n°93 du 11 juin 2013 :
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Patrick Rimbert est Maire de Nantes depuis un an. Il a succédé à Jean-Marc Ayrault, alors devenu Premier Ministre. Patrick Rimbert fait partie des grands élus locaux qui connaissent bien l’enseignement supérieur. Il est maître de conférences d’économie et a enseigné à l’IUT de Nantes. A l’occasion du Colloque de l’AVUF à Nantes, Patrick Rimbert nous a accordé un entretien.
Depuis longtemps, la ville de Nantes intègre la population étudiante comme une population cible de ses politiques publiques : d’où vient cette approche que nous ne retrouvons pas dans toutes les métropoles ?
Parce que nous considérons, qu’ils soient d’ici ou d’ailleurs, que les étudiants sont une richesse pour notre ville qui est l’une des plus jeunes de France : 36% de sa population a moins de 25 ans.
Nous sommes convaincus que, plus les étudiants investissent leur ville, plus la ville y gagne, innove et s’adapte aux évolutions. Nantes veut donc être le partenaire de la construction d’une vie d’adulte harmonieuse et épanouie.
Pour cela nous voulons agir collectivement dans tous les domaines, logement, transport, santé, accès aux loisirs, à la culture, au travail, à l’emploi… Nous avons conscience que le temps de vie d’un étudiant est sensiblement différent et c’est pour cette raison que nous avons mis en place des politiques spécifiques.
Au delà des dispositifs ou équipements spécifiquement destinés aux étudiants, Nantes donne l’impression d’avoir intégré de façon transversale les usages étudiants pour le transport, le logement,
Toutes les jeunesses de notre territoire ont besoin de vraies perspectives, d’investissements dans la formation, l’enseignement supérieur, la recherche, la vie associative, le sport, l’Éducation. Car, au-delà des usages, nous avons le devoir de libérer les potentiels en menant une politique solidaire à destination de tous les jeunes, une politique qui conjugue accès à l’autonomie et à l’émancipation afin de les accompagner dans leur insertion sociale, professionnelle et leur réussite.
C’est notre volonté qui n’est pas différenciée : Toujours mieux répondre aux attentes et aux besoins spécifiques des jeunes, de leurs familles, en particulier des plus modestes, dans un esprit d’amélioration et de progression dans l’action publique.
Enfin, le développement ESR sur le territoire et le développement métropolitain sont interdépendants et constitutifs l’un de l’autre.
L’enseignement supérieur est le levier majeur qui permet au territoire de former un capital humain de qualité et c’est au niveau métropolitain que se considère cette problématique. C’est pour cette raison que la mise en place d’un schéma de développement universitaire partagé, de long terme, mis en valeur par une démarche collective, est porteuse de sens.
Elle permet de placer Nantes Métropole, comme acteur dans la durée d’une démarche ambitieuse affirmant l’évolution du pôle universitaire comme un axe structurant de projet de territoire. Notre objectif étant de se doter d’un projet urbain universitaire à l’échelle du territoire mais aussi d’assumer un projet de développement de l’attractivité et enfin d’avoir une réflexion sur le devenir des axes d’enseignement et de recherche qui feront de Nantes un campus du 21 siècle.
Nantes garde cette image de ville étudiante, conforté par les différents classements – taux d’étudiants, choix des étudiants,… Et pourtant elle ne figure pas dans la carte des Plan Campus. Comment analysez vous cet état de fait ?
Nantes a une grande université. A travers ses combats politiques et sociaux, ses évolutions pédagogiques et scientifiques, ses réussites dans le monde des savoirs français, mais aussi européens, avec ses générations d’étudiants, en cinquante ans d’existence elle est devenue un poumon de la ville et un acteur de son présent et de son avenir. Mais nous connaissons la réalité, celle d’exister et d’atteindre une masse critique, et nous n’avions pas, à l’époque, de stratégie partagée, de gouvernance aboutie, de visibilité réelle ce qui nous a effectivement mis à l’écart des plan Campus… Pour un temps… Nous sommes désormais campus prometteur, parce que nous avons fais le choix de « voir plus loin », parce que nous faisons ce pari d’encourager des collaborations multi-niveaux : métropolitain, régional et inter-régional autour d’une ambition commune et partagée.
Parmi les métropoles universitaires, Nantes est avec Lille une des villes avec le plus faible taux de couverture de logement CROUS dédié aux étudiants : comment appréhender vous cette situation ?
Une de nos grandes orientations stratégiques dans le cadre de notre politique de vie étudiante est d’améliorer la vie des étudiants dans la cité et, nous le savons, le logement est le principal poste de dépense des étudiants.
Aujourd’hui, sur les 8000 logements CROUS de la région, il y en a 4049 à Nantes.
Pour cela, nous appréhendons la question de trois manières :
1/ Coordonner nos actions avec les autres collectivités locales, la Région et le Département pour la réalisation de nouvelles Cité U mais aussi la rénovation du parc Nantais.
2/ Répondre à la diversité des publics : à travers son Programme Local de l’Habitat 2011-2016, a pour objectif de développer 1000 logements étudiants supplémentaires mais aussi de développer les colocations solidaires et toute nouvelle forme d’habitat solidaire.
3/ Soutenir chaque étudiant pour avoir un accès au logement, dans toute la ville, à un prix abordable.
L’attractivité des villes et des universités est aujourd’hui un enjeu pour le développement territorial. La ville a t elle une approche particulière en direction des étudiants internationaux, et quels sont, à ce propos, vos collaborations avec l’Université ?
L’accueil des chercheurs et étudiants étrangers constitue un des leviers de l’internationalisation de la métropole nantaise. Car ils viennent certes se former à Nantes mais ils apportent également leurs cultures et leurs connaissances, et permettre ainsi le brassage des idées si propice au développement culturel et scientifique. Ce brassage qui fait de la ville une ville cosmopolite et solidaire.
Ouverture au monde, Mutualisation des forces, Coordination des idées et des projets, sont, je crois, les clés d’une politique en direction de chercheurs et des étudiants étrangers. Il faut savoir les accueillir dans de bonnes conditions mais aussi les orienter, les accompagner et les intégrer. C’est ainsi que, sur le même site, les étudiants et les chercheurs trouvent toutes les informations dont ils ont besoins pour se sentir bien à Nantes.. Mais il y a aussi l’association Autour du Monde et beaucoup d’initiatives associatives.. Aujourd’hui, Université, Écoles, organismes de recherche, CHU, sont regroupés autour de ces objectifs, nous travaillons en collaboration étroite avec tous nos partenaires pour mettre au cœur de nos dispositifs ces jeunes étudiants et chercheurs, c’est l’objet de l’association « Chercheurs étrangers à Nantes ». Enfin, nous partageons avec l’Université notre stratégie internationale, nous travaillions en étroite collaboration avec eux dans le cadre de notre Agence à l’Internationale.
La loi sur la décentralisation aborde la vie étudiante par le prisme du logement étudiant. On s’aperçoit que les collectivités avancent de façon éparpillées sur la reprise ou non de certaines compétences. Quelle est la position de la ville de Nantes et de la Métropole ?
Nous pensons que nous avons un rôle à jouer beaucoup plus important que celui du logement étudiant. Dès sa création Nantes Métropole a pris ses responsabilités en accompagnant le développement de l’enseignement supérieur sur son territoire. Ainsi depuis 10 ans les élus ont choisi d’investir plus de 10M€ par an sur les opérations de construction et d’équipements à destination des établissements d’enseignement supérieur.
L’enseignement supérieur contribue à créer une communauté de destin, nous devons donc affirmer l’équilibre naturel entre les acteurs de l’ESR et les collectivités.
Les Métropoles favorisent la dynamique de site, la concertation entre acteurs, la vie universitaire. Les Régions sont les lieux de la cohérence et de la construction de grandes universités fédérales autour des PRES, l’espace Loire-Bretagne et l’axe Nantes-Rennes sont les lieux privilégiés des grands projets de dimension européenne et mondial.