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La concurrence mondiale et la crise financière internationale accentuent les pressions pesant sur les programmes éducatifs de nombreux pays. Des approches radicalement nouvelles de l’apprentissage sont désormais nécessaires.
Nous assistons à une nouvelle vague de mondialisation dans laquelle ce ne sont plus seulement les emplois non qualifiés et l’industrie manufacturière qui sont touchés par l’externalisation et les délocalisations, mais aussi les emplois qualifiés et le secteur des services. Cette évolution fait peser de nouvelles exigences sur les systèmes d’éducation et de formation dans le monde entier car, dans ce contexte, l’éducation et les compétences sont fondamentales – en particulier celles qui valorisent la flexibilité et l’adaptabilité au changement.
Malheureusement, nombre des systèmes éducatifs existants ne sont pas équipés pour relever ces défis. Actuellement, le modèle standard d’apprentissage n’est adapté ni à la diversité des talents et des comportements, ni aux exigences des employeurs. Malgré de récentes réformes, les écoles et universités de nombreux pays privilégient encore le développement des compétences cognitives traditionnelles, l’enseignement d’éléments précis et la résolution de problèmes courants à l’aide de solutions fondées sur des règles. Les politiques publiques mettent trop fortement l’accent sur l’enseignement secondaire et supérieur, et pas assez sur l’éducation des jeunes enfants ni sur le contexte familial et social.
Comment réformer les approches traditionnelles ? Cette question est cruciale et suscite maints débats, mais le Global Economic Symposium (GES), forum annuel réunissant des responsables politiques et des personnalités issues des universités, des entreprises et de la société civile, a identifié trois approches fondamentales.
Premièrement, rendre les systèmes éducatifs plus flexibles : il s’agit de repenser le déroulement de la formation tout au long de la vie et de privilégier « l’apprentissage de l’apprentissage » et la recherche de solutions à des problèmes parfois inédits.
Les systèmes éducatifs actuels doivent être réformés pour permettre aux individus de s’investir davantage dans leur formation et leur développement, et dans ceux de leurs enfants. Cela pourrait impliquer davantage de flexibilité dans le calendrier de la formation et un déploiement des dépenses d’éducation tout au long de la carrière. Cela supposerait aussi d’accroître les sommes consacrées à l’apprentissage tout au long de la vie pour qu’elles correspondent au moins au surcroît de recettes fiscales attendu d’un tel apprentissage. Le développement des compétences ne devrait pas être cantonné aux écoles et aux universités, mais s’étendre de la petite enfance à la vieillesse, du cadre familial à l’école et à l’université, mais aussi au monde du travail, aux organismes publics et à la société en général.
Il faudrait valoriser un processus d’apprentissage plus participatif fondé sur l’idée d’« apprendre à apprendre » et d’« apprendre par la pratique ». Un apprentissage actif privilégiant la participation des élèves et la prise d’initiatives a davantage d’impact sur la réalisation du potentiel des élèves qu’un apprentissage passif. Les enseignants, en particulier dans le primaire et dans le secondaire, devraient davantage s’attacher à développer l’imagination, la créativité, l’inventivité, la spontanéité, l’interaction, les aptitudes sociales et de communication des élèves, car ces compétences seront toujoursplus importantes pour assurer la compétitivité des individus dans une économie de services mondialisée.
Les écoles doivent stimuler la capacité à résoudre des problèmes inédits, à combiner différents ensembles de connaissances et à interagir de manière productive avec les autres. En sciences, les élèves devraient être encouragés à tenter des expériences plutôt qu’à suivre à la lettre les manuels. Cela exigerait de modifier les programmes scolaires et de revoir la façon d’évaluer et de noter les élèves, par exemple en introduisant davantage de questions ouvertes, et en leur soumettant des problèmes complexes n’appelant pas une réponse univoque. Cela pourrait passer par plus d’activités en groupe, et par un système de notation des résultats du groupe plutôt qu’une notation de l’individu. Au Royaume-Uni, on a pu constater que l’initiative SPRinG (Social Pedagogic Research into Group-work), qui vise à développer les aptitudes au travail en groupe dans le primaire, a eu des effets positifs sur les progrès scolaires des enfants, car on les encourage aussi à apprendre à penser par eux-mêmes, à avoir confiance en eux et à être capables d’autocritique face à différents défis.
Deuxièmement, investir dans l’éducation des jeunes enfants. Toute réforme du système éducatif doit prêter une attention particulière à l’éducation préscolaire et primaire. Certains pays sont en retard pour garantir l’accès à l’éducation préscolaire de tous les enfants, qui est pourtant la clé de l’égalité des chances et d’une réussite ultérieure. Investir dans l’éducation préscolaire a des impacts positifs sur la suite de la scolarité (environ 7 à 10 % d’amélioration des résultats par an selon certaines études), mais cela augmente les niveaux de réussite des enfants issus de familles défavorisées. L’éducation préscolaire doit être indissociable du soutien aux familles. L’exemple de la Finlande, en tête du classement du Programme international pour le suivi des acquis des élèves (PISA) de l’OCDE, en témoigne : la scolarité formelle y commence plus tard que dans la plupart des pays, mais l’apprentissage bénéficie d’un important soutien aux familles.
Les difficultés cognitives et émotionnelles apparaissent souvent très tôt, généralement avant la scolarisation, et sont difficiles à corriger plus tard. Des facteurs familiaux et sociaux peuvent être en jeu. Il faudrait donc compléter les politiques éducatives par des politiques familiales et sociales qui aident les familles défavorisées, facilitent l’intégration des immigrés et aident à la transformation des quartiers urbains et à la réduction de la pauvreté en milieu rural. On en a un exemple en Nouvelle-Zélande avec le dispositif Early Childhood Education (ECE) Participation Program, spécialement axé sur les enfants maoris, sur les enfants des autres minorités du Pacifique et sur les enfants des communautés défavorisées. Celui-ci comprend des allocations, des projets associatifs, des groupes de jeu, et une éducation des jeunes enfants à domicile flexible et réactive. L’aide financière doit être correctement ciblée et soumise à conditions pour garantir son utilisation adéquate.
Troisièmement, réinventer l’éducation en exploitant les nouvelles technologies et les outils d’apprentissage en ligne. Les technologies de l’information et de la communication (TIC) sont le principal moteur de la croissance de la productivité et du changement social. Pourtant, on constate un retard mondial dans la formation des professionnels à ces « compétences électroniques ». Les programmes d’enseignement traditionnels devraient être modifiés pour mieux intégrer les outils d’apprentissage en ligne. Il faudrait apprendre aux élèves non seulement à utiliser les TIC, mais aussi à en tirer parti pour apprendre et penser par eux-mêmes. On devrait les laisser s’écarter de l’apprentissage classique, suivre leurs propres intérêts, chercher des informations sur Internet ou grâce à des logiciels intégrés d’apprentissage en ligne, tout en les accompagnant sur la voie de l’apprentissage.
Des plateformes de ressources en libre accès et des forums ouverts – comme la Fundação Getulio Vargas (FGV) au Brésil, le centre de ressources pédagogiques de l’Université virtuelle africaine (UVA), ouvert au monde entier, et le Centre de l’Université de l’Utah pour un apprentissage ouvert et durable – devraientêtre créés afin de multiplier les ressources éducatives à la portée de tous les apprenants. Les forums ouverts offrent aux utilisateurs davantage de possibilités d’agir à titre individuel, ainsi que d’interagir et de discuter avec des utilisateurs intéressés par les mêmes sujets, et ainsi d’approfondir leur apprentissage. Cela efface partiellement la frontière entre enseignants et apprenants, et augmente l’efficacité du transfert et de la diffusion des connaissances. Les forums ouverts peuvent aussi bénéficier aux pays pauvres où, utilisés de façon combinée, les médias comme les radios communautaires et les téléphones mobiles constituent clairement une source d’éducation et de formation. Les responsables politiques pourraient s’inspirer du programme « Text2Teach », partenariat entre des compagnies téléphoniques, des fournisseurs de contenu, des sociétés commerciales et les ministères de l’éducation, qui a permis d’améliorer l’enseignement dans les écoles élémentaires aux Philippines, en Indonésie et dans certains pays africains.
Que le fait d’améliorer l’utilisation des TIC dans l’éducation signifie investir dans du matériel et des logiciels de dernière génération ou tout simplement tirer le meilleur parti d’équipements plus anciens et abordables, la conclusion est la même : la nouvelle vague de mondialisation transforme le monde, et l’éducation doit elle aussi évoluer. Des politiques davantage centrées sur l’individualisation de l’apprentissage, l’éducation préscolaire et la technologie électronique constitueraient un pas dans la bonne direction.
Références
Baines, Ed, P. Blatchford et A.Chowne (2007), « Improving the effectiveness of collaborative group work in primary schools: effects on science attainment », British Educational Research Journal, Vol 33, N°5, p. 663-680, Londres.
Heckman, J., S. H. Moon, R.Pinto, P. A. Savelyev et A. Yavitz (2010), « The rate of return to the High/Scope Perry Preschool Program », Journal of Public Economics, Elsevier, N°94, p. 114-128, New York.
Hwang, D-J., H-K. Yang et H. Kim (2010), « E-Learning in the Republic of Korea », Institut de l’UNESCO pour l’application des technologies de l’information à l’éducation, Moscou.
« Global Economic Solutions: Proposals from the Global Economic Symposium (GES) (2008, 2009, 2010, 2011) », Kiel Institute for the World Economy.
Voir aussi skills.oecd.org et la Stratégie de l’OCDE sur les compétences
– See more at: http://www.observateurocde.org/news/fullstory.php/aid/3154/D_E9veloppement_des_comp_E9tences_:_repenser_l_92avenir.html#sthash.4MjFX3kX.dpuf
La concurrence mondiale et la crise financière internationale accentuent les pressions pesant sur les programmes éducatifs de nombreux pays. Des approches radicalement nouvelles de l’apprentissage sont désormais nécessaires.
Nous assistons à une nouvelle vague de mondialisation dans laquelle ce ne sont plus seulement les emplois non qualifiés et l’industrie manufacturière qui sont touchés par l’externalisation et les délocalisations, mais aussi les emplois qualifiés et le secteur des services. Cette évolution fait peser de nouvelles exigences sur les systèmes d’éducation et de formation dans le monde entier car, dans ce contexte, l’éducation et les compétences sont fondamentales – en particulier celles qui valorisent la flexibilité et l’adaptabilité au changement.
Malheureusement, nombre des systèmes éducatifs existants ne sont pas équipés pour relever ces défis. Actuellement, le modèle standard d’apprentissage n’est adapté ni à la diversité des talents et des comportements, ni aux exigences des employeurs. Malgré de récentes réformes, les écoles et universités de nombreux pays privilégient encore le développement des compétences cognitives traditionnelles, l’enseignement d’éléments précis et la résolution de problèmes courants à l’aide de solutions fondées sur des règles. Les politiques publiques mettent trop fortement l’accent sur l’enseignement secondaire et supérieur, et pas assez sur l’éducation des jeunes enfants ni sur le contexte familial et social.
Comment réformer les approches traditionnelles ? Cette question est cruciale et suscite maints débats, mais le Global Economic Symposium (GES), forum annuel réunissant des responsables politiques et des personnalités issues des universités, des entreprises et de la société civile, a identifié trois approches fondamentales.
Premièrement, rendre les systèmes éducatifs plus flexibles : il s’agit de repenser le déroulement de la formation tout au long de la vie et de privilégier « l’apprentissage de l’apprentissage » et la recherche de solutions à des problèmes parfois inédits.
Les systèmes éducatifs actuels doivent être réformés pour permettre aux individus de s’investir davantage dans leur formation et leur développement, et dans ceux de leurs enfants. Cela pourrait impliquer davantage de flexibilité dans le calendrier de la formation et un déploiement des dépenses d’éducation tout au long de la carrière. Cela supposerait aussi d’accroître les sommes consacrées à l’apprentissage tout au long de la vie pour qu’elles correspondent au moins au surcroît de recettes fiscales attendu d’un tel apprentissage. Le développement des compétences ne devrait pas être cantonné aux écoles et aux universités, mais s’étendre de la petite enfance à la vieillesse, du cadre familial à l’école et à l’université, mais aussi au monde du travail, aux organismes publics et à la société en général.
Il faudrait valoriser un processus d’apprentissage plus participatif fondé sur l’idée d’« apprendre à apprendre » et d’« apprendre par la pratique ». Un apprentissage actif privilégiant la participation des élèves et la prise d’initiatives a davantage d’impact sur la réalisation du potentiel des élèves qu’un apprentissage passif. Les enseignants, en particulier dans le primaire et dans le secondaire, devraient davantage s’attacher à développer l’imagination, la créativité, l’inventivité, la spontanéité, l’interaction, les aptitudes sociales et de communication des élèves, car ces compétences seront toujoursplus importantes pour assurer la compétitivité des individus dans une économie de services mondialisée.
Les écoles doivent stimuler la capacité à résoudre des problèmes inédits, à combiner différents ensembles de connaissances et à interagir de manière productive avec les autres. En sciences, les élèves devraient être encouragés à tenter des expériences plutôt qu’à suivre à la lettre les manuels. Cela exigerait de modifier les programmes scolaires et de revoir la façon d’évaluer et de noter les élèves, par exemple en introduisant davantage de questions ouvertes, et en leur soumettant des problèmes complexes n’appelant pas une réponse univoque. Cela pourrait passer par plus d’activités en groupe, et par un système de notation des résultats du groupe plutôt qu’une notation de l’individu. Au Royaume-Uni, on a pu constater que l’initiative SPRinG (Social Pedagogic Research into Group-work), qui vise à développer les aptitudes au travail en groupe dans le primaire, a eu des effets positifs sur les progrès scolaires des enfants, car on les encourage aussi à apprendre à penser par eux-mêmes, à avoir confiance en eux et à être capables d’autocritique face à différents défis.
Deuxièmement, investir dans l’éducation des jeunes enfants. Toute réforme du système éducatif doit prêter une attention particulière à l’éducation préscolaire et primaire. Certains pays sont en retard pour garantir l’accès à l’éducation préscolaire de tous les enfants, qui est pourtant la clé de l’égalité des chances et d’une réussite ultérieure. Investir dans l’éducation préscolaire a des impacts positifs sur la suite de la scolarité (environ 7 à 10 % d’amélioration des résultats par an selon certaines études), mais cela augmente les niveaux de réussite des enfants issus de familles défavorisées. L’éducation préscolaire doit être indissociable du soutien aux familles. L’exemple de la Finlande, en tête du classement du Programme international pour le suivi des acquis des élèves (PISA) de l’OCDE, en témoigne : la scolarité formelle y commence plus tard que dans la plupart des pays, mais l’apprentissage bénéficie d’un important soutien aux familles.
Les difficultés cognitives et émotionnelles apparaissent souvent très tôt, généralement avant la scolarisation, et sont difficiles à corriger plus tard. Des facteurs familiaux et sociaux peuvent être en jeu. Il faudrait donc compléter les politiques éducatives par des politiques familiales et sociales qui aident les familles défavorisées, facilitent l’intégration des immigrés et aident à la transformation des quartiers urbains et à la réduction de la pauvreté en milieu rural. On en a un exemple en Nouvelle-Zélande avec le dispositif Early Childhood Education (ECE) Participation Program, spécialement axé sur les enfants maoris, sur les enfants des autres minorités du Pacifique et sur les enfants des communautés défavorisées. Celui-ci comprend des allocations, des projets associatifs, des groupes de jeu, et une éducation des jeunes enfants à domicile flexible et réactive. L’aide financière doit être correctement ciblée et soumise à conditions pour garantir son utilisation adéquate.
Troisièmement, réinventer l’éducation en exploitant les nouvelles technologies et les outils d’apprentissage en ligne. Les technologies de l’information et de la communication (TIC) sont le principal moteur de la croissance de la productivité et du changement social. Pourtant, on constate un retard mondial dans la formation des professionnels à ces « compétences électroniques ». Les programmes d’enseignement traditionnels devraient être modifiés pour mieux intégrer les outils d’apprentissage en ligne. Il faudrait apprendre aux élèves non seulement à utiliser les TIC, mais aussi à en tirer parti pour apprendre et penser par eux-mêmes. On devrait les laisser s’écarter de l’apprentissage classique, suivre leurs propres intérêts, chercher des informations sur Internet ou grâce à des logiciels intégrés d’apprentissage en ligne, tout en les accompagnant sur la voie de l’apprentissage.
Des plateformes de ressources en libre accès et des forums ouverts – comme la Fundação Getulio Vargas (FGV) au Brésil, le centre de ressources pédagogiques de l’Université virtuelle africaine (UVA), ouvert au monde entier, et le Centre de l’Université de l’Utah pour un apprentissage ouvert et durable – devraientêtre créés afin de multiplier les ressources éducatives à la portée de tous les apprenants. Les forums ouverts offrent aux utilisateurs davantage de possibilités d’agir à titre individuel, ainsi que d’interagir et de discuter avec des utilisateurs intéressés par les mêmes sujets, et ainsi d’approfondir leur apprentissage. Cela efface partiellement la frontière entre enseignants et apprenants, et augmente l’efficacité du transfert et de la diffusion des connaissances. Les forums ouverts peuvent aussi bénéficier aux pays pauvres où, utilisés de façon combinée, les médias comme les radios communautaires et les téléphones mobiles constituent clairement une source d’éducation et de formation. Les responsables politiques pourraient s’inspirer du programme « Text2Teach », partenariat entre des compagnies téléphoniques, des fournisseurs de contenu, des sociétés commerciales et les ministères de l’éducation, qui a permis d’améliorer l’enseignement dans les écoles élémentaires aux Philippines, en Indonésie et dans certains pays africains.
Que le fait d’améliorer l’utilisation des TIC dans l’éducation signifie investir dans du matériel et des logiciels de dernière génération ou tout simplement tirer le meilleur parti d’équipements plus anciens et abordables, la conclusion est la même : la nouvelle vague de mondialisation transforme le monde, et l’éducation doit elle aussi évoluer. Des politiques davantage centrées sur l’individualisation de l’apprentissage, l’éducation préscolaire et la technologie électronique constitueraient un pas dans la bonne direction.
Références
Baines, Ed, P. Blatchford et A.Chowne (2007), « Improving the effectiveness of collaborative group work in primary schools: effects on science attainment », British Educational Research Journal, Vol 33, N°5, p. 663-680, Londres.
Heckman, J., S. H. Moon, R.Pinto, P. A. Savelyev et A. Yavitz (2010), « The rate of return to the High/Scope Perry Preschool Program », Journal of Public Economics, Elsevier, N°94, p. 114-128, New York.
Hwang, D-J., H-K. Yang et H. Kim (2010), « E-Learning in the Republic of Korea », Institut de l’UNESCO pour l’application des technologies de l’information à l’éducation, Moscou.
« Global Economic Solutions: Proposals from the Global Economic Symposium (GES) (2008, 2009, 2010, 2011) », Kiel Institute for the World Economy.
Voir aussi skills.oecd.org et la Stratégie de l’OCDE sur les compétences
– See more at: http://observateurocde.org/news/fullstory.php/aid/3154/D_E9veloppement_des_comp_E9tences_:_repenser_l_92avenir.html?sthash.1to5hCHi.mjjo#sthash.1to5hCHi.ZK0d2NRV.dpuf
La concurrence mondiale et la crise financière internationale accentuent les pressions pesant sur les programmes éducatifs de nombreux pays. Des approches radicalement nouvelles de l’apprentissage sont désormais nécessaires.
Nous assistons à une nouvelle vague de mondialisation dans laquelle ce ne sont plus seulement les emplois non qualifiés et l’industrie manufacturière qui sont touchés par l’externalisation et les délocalisations, mais aussi les emplois qualifiés et le secteur des services. Cette évolution fait peser de nouvelles exigences sur les systèmes d’éducation et de formation dans le monde entier car, dans ce contexte, l’éducation et les compétences sont fondamentales – en particulier celles qui valorisent la flexibilité et l’adaptabilité au changement.
Malheureusement, nombre des systèmes éducatifs existants ne sont pas équipés pour relever ces défis. Actuellement, le modèle standard d’apprentissage n’est adapté ni à la diversité des talents et des comportements, ni aux exigences des employeurs. Malgré de récentes réformes, les écoles et universités de nombreux pays privilégient encore le développement des compétences cognitives traditionnelles, l’enseignement d’éléments précis et la résolution de problèmes courants à l’aide de solutions fondées sur des règles. Les politiques publiques mettent trop fortement l’accent sur l’enseignement secondaire et supérieur, et pas assez sur l’éducation des jeunes enfants ni sur le contexte familial et social.
Comment réformer les approches traditionnelles ? Cette question est cruciale et suscite maints débats, mais le Global Economic Symposium (GES), forum annuel réunissant des responsables politiques et des personnalités issues des universités, des entreprises et de la société civile, a identifié trois approches fondamentales.
Premièrement, rendre les systèmes éducatifs plus flexibles : il s’agit de repenser le déroulement de la formation tout au long de la vie et de privilégier « l’apprentissage de l’apprentissage » et la recherche de solutions à des problèmes parfois inédits.
Les systèmes éducatifs actuels doivent être réformés pour permettre aux individus de s’investir davantage dans leur formation et leur développement, et dans ceux de leurs enfants. Cela pourrait impliquer davantage de flexibilité dans le calendrier de la formation et un déploiement des dépenses d’éducation tout au long de la carrière. Cela supposerait aussi d’accroître les sommes consacrées à l’apprentissage tout au long de la vie pour qu’elles correspondent au moins au surcroît de recettes fiscales attendu d’un tel apprentissage. Le développement des compétences ne devrait pas être cantonné aux écoles et aux universités, mais s’étendre de la petite enfance à la vieillesse, du cadre familial à l’école et à l’université, mais aussi au monde du travail, aux organismes publics et à la société en général.
Il faudrait valoriser un processus d’apprentissage plus participatif fondé sur l’idée d’« apprendre à apprendre » et d’« apprendre par la pratique ». Un apprentissage actif privilégiant la participation des élèves et la prise d’initiatives a davantage d’impact sur la réalisation du potentiel des élèves qu’un apprentissage passif. Les enseignants, en particulier dans le primaire et dans le secondaire, devraient davantage s’attacher à développer l’imagination, la créativité, l’inventivité, la spontanéité, l’interaction, les aptitudes sociales et de communication des élèves, car ces compétences seront toujoursplus importantes pour assurer la compétitivité des individus dans une économie de services mondialisée.
Les écoles doivent stimuler la capacité à résoudre des problèmes inédits, à combiner différents ensembles de connaissances et à interagir de manière productive avec les autres. En sciences, les élèves devraient être encouragés à tenter des expériences plutôt qu’à suivre à la lettre les manuels. Cela exigerait de modifier les programmes scolaires et de revoir la façon d’évaluer et de noter les élèves, par exemple en introduisant davantage de questions ouvertes, et en leur soumettant des problèmes complexes n’appelant pas une réponse univoque. Cela pourrait passer par plus d’activités en groupe, et par un système de notation des résultats du groupe plutôt qu’une notation de l’individu. Au Royaume-Uni, on a pu constater que l’initiative SPRinG (Social Pedagogic Research into Group-work), qui vise à développer les aptitudes au travail en groupe dans le primaire, a eu des effets positifs sur les progrès scolaires des enfants, car on les encourage aussi à apprendre à penser par eux-mêmes, à avoir confiance en eux et à être capables d’autocritique face à différents défis.
Deuxièmement, investir dans l’éducation des jeunes enfants. Toute réforme du système éducatif doit prêter une attention particulière à l’éducation préscolaire et primaire. Certains pays sont en retard pour garantir l’accès à l’éducation préscolaire de tous les enfants, qui est pourtant la clé de l’égalité des chances et d’une réussite ultérieure. Investir dans l’éducation préscolaire a des impacts positifs sur la suite de la scolarité (environ 7 à 10 % d’amélioration des résultats par an selon certaines études), mais cela augmente les niveaux de réussite des enfants issus de familles défavorisées. L’éducation préscolaire doit être indissociable du soutien aux familles. L’exemple de la Finlande, en tête du classement du Programme international pour le suivi des acquis des élèves (PISA) de l’OCDE, en témoigne : la scolarité formelle y commence plus tard que dans la plupart des pays, mais l’apprentissage bénéficie d’un important soutien aux familles.
Les difficultés cognitives et émotionnelles apparaissent souvent très tôt, généralement avant la scolarisation, et sont difficiles à corriger plus tard. Des facteurs familiaux et sociaux peuvent être en jeu. Il faudrait donc compléter les politiques éducatives par des politiques familiales et sociales qui aident les familles défavorisées, facilitent l’intégration des immigrés et aident à la transformation des quartiers urbains et à la réduction de la pauvreté en milieu rural. On en a un exemple en Nouvelle-Zélande avec le dispositif Early Childhood Education (ECE) Participation Program, spécialement axé sur les enfants maoris, sur les enfants des autres minorités du Pacifique et sur les enfants des communautés défavorisées. Celui-ci comprend des allocations, des projets associatifs, des groupes de jeu, et une éducation des jeunes enfants à domicile flexible et réactive. L’aide financière doit être correctement ciblée et soumise à conditions pour garantir son utilisation adéquate.
Troisièmement, réinventer l’éducation en exploitant les nouvelles technologies et les outils d’apprentissage en ligne. Les technologies de l’information et de la communication (TIC) sont le principal moteur de la croissance de la productivité et du changement social. Pourtant, on constate un retard mondial dans la formation des professionnels à ces « compétences électroniques ». Les programmes d’enseignement traditionnels devraient être modifiés pour mieux intégrer les outils d’apprentissage en ligne. Il faudrait apprendre aux élèves non seulement à utiliser les TIC, mais aussi à en tirer parti pour apprendre et penser par eux-mêmes. On devrait les laisser s’écarter de l’apprentissage classique, suivre leurs propres intérêts, chercher des informations sur Internet ou grâce à des logiciels intégrés d’apprentissage en ligne, tout en les accompagnant sur la voie de l’apprentissage.
Des plateformes de ressources en libre accès et des forums ouverts – comme la Fundação Getulio Vargas (FGV) au Brésil, le centre de ressources pédagogiques de l’Université virtuelle africaine (UVA), ouvert au monde entier, et le Centre de l’Université de l’Utah pour un apprentissage ouvert et durable – devraientêtre créés afin de multiplier les ressources éducatives à la portée de tous les apprenants. Les forums ouverts offrent aux utilisateurs davantage de possibilités d’agir à titre individuel, ainsi que d’interagir et de discuter avec des utilisateurs intéressés par les mêmes sujets, et ainsi d’approfondir leur apprentissage. Cela efface partiellement la frontière entre enseignants et apprenants, et augmente l’efficacité du transfert et de la diffusion des connaissances. Les forums ouverts peuvent aussi bénéficier aux pays pauvres où, utilisés de façon combinée, les médias comme les radios communautaires et les téléphones mobiles constituent clairement une source d’éducation et de formation. Les responsables politiques pourraient s’inspirer du programme « Text2Teach », partenariat entre des compagnies téléphoniques, des fournisseurs de contenu, des sociétés commerciales et les ministères de l’éducation, qui a permis d’améliorer l’enseignement dans les écoles élémentaires aux Philippines, en Indonésie et dans certains pays africains.
Que le fait d’améliorer l’utilisation des TIC dans l’éducation signifie investir dans du matériel et des logiciels de dernière génération ou tout simplement tirer le meilleur parti d’équipements plus anciens et abordables, la conclusion est la même : la nouvelle vague de mondialisation transforme le monde, et l’éducation doit elle aussi évoluer. Des politiques davantage centrées sur l’individualisation de l’apprentissage, l’éducation préscolaire et la technologie électronique constitueraient un pas dans la bonne direction.
Références
Baines, Ed, P. Blatchford et A.Chowne (2007), « Improving the effectiveness of collaborative group work in primary schools: effects on science attainment », British Educational Research Journal, Vol 33, N°5, p. 663-680, Londres.
Heckman, J., S. H. Moon, R.Pinto, P. A. Savelyev et A. Yavitz (2010), « The rate of return to the High/Scope Perry Preschool Program », Journal of Public Economics, Elsevier, N°94, p. 114-128, New York.
Hwang, D-J., H-K. Yang et H. Kim (2010), « E-Learning in the Republic of Korea », Institut de l’UNESCO pour l’application des technologies de l’information à l’éducation, Moscou.
« Global Economic Solutions: Proposals from the Global Economic Symposium (GES) (2008, 2009, 2010, 2011) », Kiel Institute for the World Economy.
Voir aussi skills.oecd.org et la Stratégie de l’OCDE sur les compétences
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