In Localtis.info un service Caisse des dépôts – le 16 mai 2013 :
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Le projet de loi pour la refondation de l’école, qui sera discuté au Sénat à partir du 21 mai, a été largement amendé en commission. Pour les modifications touchant de près les collectivités locales, on retiendra principalement celles concernant la carte scolaire. Mais une dizaine d’autres étaient également au menu.
Après la commission des finances (voir notre article ci-contre du 30 avril), c’était au tour de la commission de la culture, de l’éducation et de la communication du Sénat d’adopter, mardi 14 mai 2013, le projet de loi d’orientation et de programmation pour la refondation de l’école de la République, en préalable à l’examen du texte en séance publique qui se tiendra du mardi 21 mai au vendredi 24. Parmi les 118 amendements adoptés (sur les 425 déposés) une petite dizaine concerne de près les collectivités locales. La plupart l’ont été à l’initiative de la rapporteure Françoise Cartron.
Carte scolaire – Rapporteure de la mission d’information sénatoriale sur l’assouplissement de la carte scolaire, présentée en juin dernier (voir notre article ci-contre du 28 juin 2012), Françoise Cartron a repris une des recommandations dans un amendement qui précise les pouvoirs du conseil général en matière de délimitation de la carte scolaire. Les départements pourraient "construire des secteurs communs à plusieurs collèges", si tant est que ces collèges soient "situés à l’intérieur d’un même périmètre de transports urbains". L’idée est d’"élargir les zones géographiques de recrutement des collèges et ainsi faciliter le brassage social des publics scolarisés".
"Cette mesure n’a d’intérêt qu’en zone urbaine dans la mesure où l’implantation des collèges en zone rurale est très dispersée. C’est pourquoi il est précisé que les nouveaux secteurs seront dessinés dans un même périmètre de transports urbains", estime la sénatrice, par ailleurs vice-présidente de la communauté urbaine de Bordeaux.
Il y aurait alors deux possibilités : "soit une affectation selon un algorithme aléatoire des élèves dans l’un des deux ou trois collèges du secteur, en préservant les fratries, soit la mise en place d’une procédure de voeux comme pour les lycées où d’autres algorithmes permettent de prioriser les demandes des familles en favorisant les boursiers par exemple", propose l’exposé des motifs.
Conseil d’administration des collèges et lycées – Dans les collèges et les lycées, "l’un des représentants au plus de la collectivité de rattachement peut être une personnalité qualifiée désignée par le président du conseil général, le président du conseil régional ou le président du conseil exécutif de Corse", proposait un amendement de la rapporteure, adoptée par la commission qui a "écouté les associations d’élus pointant la difficulté de nommer deux élus dans tous les conseils d’administration de tous les collèges et de tous les lycées" car "le nombre limité des élus freine leur participation effective dans tous les établissements".
Conseil d’administration de l’Espe – A été voté un amendement de la rapporteure qui garantit la présence, au sein du conseil chargé d’administrer l’Espe (école supérieure du professorat et de l’éducation), "d’au moins un représentant des collectivités territoriales".
Réussite éducative et coéducation avec les parents – L’adoption d’un amendement à l’article 25, de la rapporteure Françoise Cartron, permet de maintenir le principe d’une mise en place conjointe entre l’équipe éducative et les parents (coéducation) dans le cadre de dispositifs d’aide aux élèves en difficulté, notamment les programmes personnalisés de réussite éducative (PPRE). Il réintroduit les parents dans la décision et la mise en oeuvre du dispositif alors que le projet de loi les en écartait au bénéfice d’une simple information.
Dans la ligne de la doctrine sur la réussite éducative qui est en train de se formaliser, Françoise Cartron estime que "la prise en charge de la difficulté scolaire ne peut être que globale parce que ces causes et ces effets sont multiformes. Il ne convient donc pas de marquer une rupture entre la sphère familiale et la sphère scolaire. Les parents doivent être directement impliqués dans l’aide apportée à leurs enfants". Il ne faudrait surtout pas "corroborer l’idée fausse que les parents sont indifférents au déroulé de la scolarité de leurs enfants ou qu’ils sont impuissants à agir".
Plus loin dans le projet de loi, après l’article 45, "il est prévu dans tous les établissements un espace à l’usage des parents d’élèves et de leurs délégués", depuis que l’amendement de la rapporteure allant dans ce sens a été adopté.
Enfin, pas moins de huit amendements ont été adoptés en commission pour supprimer l’article 4 ter introduit à l’Assemblée nationale qui permettait à l’équipe enseignante de saisir, sans passer par les parents, la maison départementale des personnes handicapées (MDPH) pour proposer "toute révision de l’orientation d’un enfant ou d’un adolescent et des notifications concernant son accompagnement qu’elle jugerait utile, y compris en cours d’année scolaire". La commission coupe ainsi l’herbe sous le pied de Vincent Peillon qui s’était engagé à retirer l’article polémique (voir notre article ci-contre du 15 avril).
Education artistique – Un amendement de la rapporteure a été retenu supprimant la mention de "projets éducatifs territoriaux" de l’article 6 sur l’éducation artistique et culturelle. La raison invoquée est significative de la difficulté à placer (ou non) la frontière entre activités scolaires et périscolaires : "l’éducation artistique et culturelle fait partie des enseignements obligatoires. Distinguer ainsi que le fait la rédaction actuelle les projets éducatifs territoriaux comme lieux spécifiques où elle se déroulera risque d’introduire une ambiguïté et de provoquer un glissement de l’éducation artistique et culturelle vers le temps périscolaire".
La commission a également retenu l’amendement de la rapporteure qui ouvre la possibilité d’intégrer "la culture scientifique et technique" dans l’éducation artistique et culturelle.
Fonds d’amorçage pour les EPCI – Un amendement d’Hervé Maurey (UDI) a été retenu, exigeant que soient éclaircies les modalités de calcul des aides attribuées par le fonds d’amorçage aux EPCI qui ont la compétence scolaire et qui s’engagent dans la réforme des rythmes scolaires. Plus précisément, l’éclaircissement devrait porter sur le mode de calcul de la majoration forfaitaire au titre de la "DSU-cible", de la "DSR-cible" et des communes des départements d’outre-mer.
Numérique – Le vote de l’amendement de Jacques Legendre modifie l’article 10 en précisant que "l’Etat organise, à sa charge, dans le cadre du service public de l’enseignement et afin de contribuer à ses missions, un service public du numérique éducatif et de l’enseignement à distance", le député UMP ayant convaincu ses collègues qu’il était "important de préciser que l’Etat doit supporter le coût de cette organisation".
A également été adopté un amendement de Brigitte Gonthier-Maurin (CRC) qui précise que "ce service public utilise exclusivement des logiciels libres et des formats ouverts de documents".
Mise à disposition des locaux – Deux amendements de la rapporteure Françoise Cartron apportent des précisions sur les activités organisées dans les collèges (amendement à l’article 14 bis) et les lycées (amendement à l’article 15) dans le cadre de la possibilité de mettre à disposition d’associations certains de leurs locaux "pour les besoins de la vie citoyenne" tel que le propose le projet de loi. Ces activités, qui seraient sous la responsabilité du président du conseil général, non seulement devraient être compatibles avec la nature des installations et le fonctionnement normal du service, mais devraient également "respecter les principes de neutralité et de laïcité du service public". Neutralité politique, au sens où il faudrait "éviter" l’organisation de réunions d’un parti politique. "Neutralité religieuse", au sens de "laïcité", "afin que les locaux ne soient pas mis à disposition d’associations cultuelles (sic)", est-il expliqué dans l’exposé des motifs de l’amendement.
Langues régionales – "Les enseignants du premier et du second degré sont autorisés à recourir aux langues régionales, dès lorsqu’ils en tirent profit pour leur enseignement", stipule un amendement de la rapporteure adopté en commission. Il s’agissait de "corriger" le dispositif introduit à l’Assemblée nationale sur l’utilisation des langues régionales. Il est ainsi rappelé "le principe que le français est la langue d’enseignement". Il supprime l’accord préalable des parents ou des élèves majeurs ce "qui serait impraticable pour des utilisations ponctuelles des langues régionales". Il dit explicitement que le recours aux langues régionales est possible dans le premier et le second degré. Enfin, il ne restreint pas la possibilité de recourir aux langues régionales à la seule fin d’améliorer l’apprentissage du français, ce qui est "particulièrement important dans les territoires créolophones où l’utilisation du créole peut être aussi nécessaire pour aider les élèves à comprendre une notion de mathématiques ou de géographie".
Apprentissage des langues étrangères – "Dans chaque académie, est favorisé l’apprentissage des langues étrangères parlées dans les pays avec lesquels des accords de coopération régionale sont en vigueur, sous réserve de la réciprocité", proposait un amendement à l’article 27, de la rapporteure, qui a été adopté. Dans la rédaction du projet de loi au sortir de l’Assemblée nationale, cette disposition ne concernait que les académies frontalières et ultramarines, l’amendement l’étend à toutes les académies dès lors qu’un accord de coopération régionale avec un pays étranger existe. "Par exemple, la région de Bretagne a des coopérations avec le Land de Saxe en Allemagne et la province du Shandong en Chine ; il est souhaitable dans ce cadre que l’académie de Rennes favorise l’apprentissage de l’allemand ou du chinois", fait valoir Françoise Cartron.
Valérie Liquet