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PRÉSENTÉ
au nom de M. Jean-Marc AYRAULT,
Premier ministre,
par M. Vincent PEILLON,
ministre de l’éducation nationale.
EXPOSÉ DES MOTIFS
Mesdames, Messieurs,
L’avenir de la jeunesse, le redressement de notre pays, son développement culturel, social et économique dépendent largement de notre capacité collective à refonder l’école de la République.
Cette refondation porte non seulement un projet éducatif, mais également un projet de société. La France, avec la refondation de son école, se donne les moyens de répondre aux grands défis auxquels elle est confrontée : élever le niveau de connaissances, de compétence et de culture de tous les enfants, accroître son niveau de croissance avec des jeunes mieux formés et dotés de hautes compétences, lutter contre le chômage des jeunes, réduire les inégalités sociales et territoriales, promouvoir l’égalité entre les femmes et les hommes, recréer une cohésion nationale et un lien civique autour de la promesse républicaine de la réussite éducative pour tous.
Cette refondation appelle la mobilisation de tous pour l’accomplissement au quotidien de cette ambition, dans un esprit d’unité, de confiance et d’action, dans l’intérêt des élèves et dans celui du pays.
Ce projet de loi d’orientation et de programmation constitue une étape majeure de la refondation de l’école. Il est formé d’un ensemble de dispositions législatives et d’un rapport annexé qui présente la vision d’ensemble et notamment la programmation des moyens, les objectifs et les orientations de la refondation de l’école. Cet ensemble de dispositions ainsi que leurs mesures d’application seront mises en œuvre au cours de la législature pour accomplir ce grand dessein éducatif.
Ces choix ont été préparés par les travaux conduits dans le cadre de la grande concertation sur la refondation de l’école qui a permis d’établir un diagnostic partagé sur l’état du système éducatif, dégageant ainsi des priorités sur un certain nombre de thèmes.
L’approbation du rapport annexé fait l’objet de l’article 1er.
Le dessein de la refondation consiste à rebâtir une école à la fois juste pour tous et exigeante pour chacun.
La refondation de l’école doit en priorité permettre une élévation générale du niveau de tous les élèves. Les objectifs fixés dans le rapport traduisent cette ambition :
– faire en sorte que tous les élèves maîtrisent les compétences de base en français (lecture, écriture, compréhension et vocabulaire) et les compétences en mathématiques (nombre, calcul et géométrie) en fin de CE1, et que tous les élèves maîtrisent les instruments fondamentaux de la connaissance en fin d’école élémentaire ;
– réduire à moins de 10 % l’écart de maîtrise des compétences en fin de CM2 entre les élèves de l’éducation prioritaire et les élèves hors éducation prioritaire ;
– réduire par deux la proportion des élèves qui sortent du système scolaire sans qualification et amener tous nos élèves à maîtriser le socle commun de connaissances, de compétences et de culture à l’issue de la scolarité obligatoire ;
– réaffirmer les objectifs de conduire plus de 80 % d’une classe d’âge au baccalauréat et 50 % d’une classe d’âge à un diplôme de l’enseignement supérieur.
Ces objectifs s’inscrivent dans le cadre de nos engagements européens et justifient la priorité accordée à l’école primaire pour réduire la difficulté scolaire.
Le niveau global des compétences des élèves doit être amélioré pour parvenir à davantage de justice dans la réussite scolaire et pour inscrire le pays sur une trajectoire de croissance structurelle forte dans une économie de la connaissance internationale.
Depuis une dizaine d’années, le pourcentage d’élèves en difficulté face à l’écrit a augmenté de manière significative : près de 20 % des élèves de quinze ans connaissent de grandes difficultés de maîtrise de la langue écrite. Le nombre de sorties sans qualification, qui concernent 12 % des jeunes français d’aujourd’hui, doit être limité pour réduire le chômage qui touche en priorité ces populations. Enfin, le système éducatif français ne parvient pas à lutter suffisamment contre les déterminismes sociaux et territoriaux qui engendrent des inégalités sociales et géographiques et entraînent déclassement et crise de confiance pour une partie de la population.
S’agissant des moyens humains, le rapport annexé présente la programmation de la création de 60 000 emplois dans l’enseignement sur la durée de la législature. Cet investissement très important est nécessaire pour mener à bien la refondation.
Il sera d’abord consacré au rétablissement d’une véritable formation initiale pour nos enseignants. Ces nouveaux moyens serviront également la priorité donnée au premier degré : hors réforme de la formation initiale, les deux tiers des emplois nouveaux créés seront destinés aux écoles.
Ces moyens permettront notamment un développement de l’accueil des moins de trois ans (en particulier dans les zones d’éducation prioritaire, dans les territoires ruraux isolés les moins bien pourvus et en outre-mer) et une évolution des pratiques pédagogiques. En particulier, l’objectif du « plus de maîtres que de classes » permettra, dans les secteurs les plus fragiles, d’accompagner des organisations pédagogiques innovantes, au service d’une amélioration significative des résultats scolaires.
Dans le second degré, les moyens nouveaux seront en priorité consacrés à la mise en place, dans les collèges, de dispositifs pédagogiques adaptés à l’hétérogénéité des publics et de parcours favorisant la réussite de tous les élèves. Dans les lycées professionnels, ils permettront de garantir à tous les élèves un diplôme au moins de niveau V, d’améliorer la réussite au baccalauréat professionnel, de mieux sécuriser les parcours et de lutter contre le décrochage scolaire.
Enfin, ces moyens sont nécessaires pour répondre aux besoins du système éducatif : l’accueil des élèves en situation de handicap, avec la création d’emplois d’auxiliaires de vie scolaire ; la prévention et la sécurité ; l’accompagnement des élèves ; le suivi médical (en particulier des élèves les plus défavorisés) avec le renforcement de la filière médico-sociale ; l’amélioration du pilotage des établissements et des services académiques.
L’ensemble de ces mesures représente un effort financier et humain considérable, mais cet effort constitue un investissement pour l’avenir de notre pays.
Le rapport annexé présente ensuite les orientations réparties par thématique.
Le projet de loi s’articule autour de cinq grands axes :
– assurer une vraie formation initiale et continue pour les métiers du professorat et de l’éducation avec la mise en place des écoles supérieures du professorat et de l’éducation ;
– faire entrer l’école dans l’ère du numérique afin de prendre véritablement en compte ses enjeux et atouts pour l’école ;
– mettre le contenu des enseignements et la progressivité des apprentissages au cœur de la refondation ;
– rénover le système d’orientation et l’insertion professionnelle ;
– redynamiser le dialogue avec les partenaires de l’école, ainsi que ses instances d’évaluation.
La qualité d’un système éducatif tient d’abord à la qualité de ses enseignants : il s’agit donc en premier lieu d’assurer aux personnels enseignants et d’éducation une formation initiale et continue qui leur permette d’exercer leur métier dans de bonnes conditions. Les technologies numériques sont en train de transformer le système éducatif. Il s’agit d’une transformation radicale des modes de production et de diffusion des savoirs, mais aussi des rapports sociaux. Une nouvelle ambition pour le numérique doit donc être inscrite au cœur de la refondation de l’école : celle-ci doit prendre le tournant et apprendre à former ses élèves par et pour le numérique. La refondation de l’école passe par une réflexion sur le socle commun de connaissances, de compétences et de culture et sur le contenu des enseignements. Il s’agit de préciser ce que l’école doit apprendre à ses élèves, et la façon dont elle peut permettre à tous cette acquisition. La définition précise des éléments du socle, et leur articulation avec les programmes d’enseignement et l’évaluation des élèves, doivent être repensés. La définition des programmes sera confiée à un conseil supérieur des programmes. Le projet met cependant d’ores et déjà un accent fort sur la formation de l’enfant comme personne et comme citoyen – avec le développement de l’enseignement moral et civique, ainsi que de l’éducation artistique et culturelle. Il s’agit ensuite d’organiser une réelle progressivité des apprentissages, en réfléchissant à l’ensemble du parcours des élèves, de la maternelle au collège. L’école a cette vocation de formation commune pour tous, mais elle doit aussi donner aux élèves les outils nécessaires à ce que chacun s’oriente vers une insertion professionnelle choisie et réussie. Il convient à ce titre de réformer le système d’orientation. Le projet prend enfin acte du fait que la refondation ne peut avoir lieu sans un dialogue redynamisé de l’école avec ses partenaires (au premier rang desquels les parents d’élèves et les collectivités territoriales) et sans un système d’évaluation efficace.