PRomotion des Initiatives Sociales en Milieux Educatifs

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Au collège Joliot-Curie d’Argenteuil, situé dans une zone urbaine sensible, «étiqueté» établissement «violence», la mixité sociale est prédominante. Souvent stigmatisés dans les médias par l’actualité lourde de faits divers qui leur collent à la peau, les banlieues n’attirent pas. Pourtant, à l’écho de la phrase de Dany Boon dans le film culte « Bienvenue chez les Ch’tis » : « un étranger qui vient dans le Nord pleure deux fois : quand il arrive et quand il repart », le collège Joliot-Curie a quelque chose d’attachant.

Cette envie d’y aller et d’y rester, c’est Susanna Deutsch et son équipe, par leur dynamisme et leur motivation, qui l’ont créée. Devenu collège numérique grâce aux investissements du Conseil Général du Val d’Oise, toute l’équipe utilise ces nouveaux outils de manière positive et convaincante pour proposer aux élèves et aux familles un environnement moderne et accueillant.

Au bord d’une cité sensible mais aussi d’une zone pavillonnaire, le collège accueille des enfants de milieux sociaux très différents. Afin de ne pas marginaliser les familles les plus en difficultés, Susanna et son équipe ont eu l’idée d’organiser, à l’occasion de l’inauguration du collège numérique, une soirée porte ouverte à destination des parents.

Intéresser les familles à la vie de l’établissement

Cette opération « collège numérique » a été entièrement financée par le Conseil Général du Val d’Oise et inclut notamment un TNI dans chaque classe et la mise à disposition de l’ENT Netcollège d’Itop éducation.

L’objectif de cette soirée : intéresser les familles à la vie de l’établissement et leur expliquer les apports du numérique dans un contexte de classe mais aussi pour la maison. Cet événement a remporté un vif succès ; les parents ont pu voir fonctionner les TNI fraîchement installés et la démonstration de l’ENT dans une salle dédiée où du personnel ressources de l’établissement et de l’académie leur expliquait comment se connecter et comment s’en servir.

De même, à chaque rentrée en 6ème, les parents sont invités à se réunir en soirée autour du professeur principal de leur enfant pour découvrir le TNI et les usages de l’ENT.

Enfin, en début d’année scolaire, les familles sont invitées à compléter un formulaire où elles indiquent si elles possèdent un ordinateur à  la maison avec accès internet ; « majoritairement, les familles ont un ordinateur ; par contre, les connexions internet sont plus aléatoires car souvent liées aux situations économiques des familles », souligne la chef d’établissement.

Une fois ces étapes passées, la réflexion se poursuit au sein de l’établissement pour maintenir la communication avec les familles, notamment via l’ENT.

Le numérique, vecteur d’intégration sociale ?

Au-delà du clivage « est-ce que les familles ont un ordinateur ou internet à la maison ? », d’autres paramètres sont à prendre en compte, notamment celle de la langue, comme nous l’explique Naïma :  « on ne parle pas assez de la barrière de la langue qui est réelle et très présente dans beaucoup de familles et qui est souvent perçue comme un désintéressement, mais c’est en fait une incapacité à utiliser l’outil ». Cette représentante de parents d’élèves nous parle de pudeur et même parfois de honte que certains parents peuvent ressentir à avouer qu’ils n’utilisent pas l’ordinateur et donc l’ENT, tout simplement parce qu’ils ne savent pas le faire.

Pour tenter de ne pas laisser se creuser les écarts, l’établissement a mis en place des formations à destination des familles ; et encore une fois, tout a été pensé de manière à faire tomber les barrières : la formation est, dans un premier temps, dispensée à des représentants de parents, comme Naïma, qui deviennent des parents « ressources » qui seront en mesure d’accompagner, au travers d’un langage simple et accessible, les familles qui en éprouvent le besoin.

En effet, une formation directement dispensée par des enseignants aux parents aurait été mal perçue et aurait certainement dissuadé certains d’entre eux, comme l’explique, Sandrine Chedouteaud, référent numérique de l’établissement.  « Je vais peut-être un peu loin en disant cela, mais les parents formés par des enseignants auraient l’impression d’être jugés ; c’est pourquoi une formation dispensée par des parents à des parents nous a paru plus appropriée au vu du contexte social ».

Elle ajoute que les parents ont bien conscience de l’importance du numérique pour la réussite de leurs enfants mais ont, malgré cela, du mal à s’investir personnellement dans l’utilisation du numérique. « Pourtant, ils n’imaginent pas leur foyer sans outil informatique ». Dans cet investissement il pense uniquement à leurs enfants ; le manque de matériel à la maison serait perçu comme un décrochage social de la société actuelle. Leur implication personnelle est, à l’heure actuelle, très limitée. C’est pourquoi, au travers de ces formations, l’équipe du Collège Joliot-Curie espère leur faire comprendre que leur usage personnel et leur implication sont tout aussi importants pour le futur de leurs enfants.

Des actions menées conjointement entre établissements et collectivités locales

Ces efforts d’intégration sociale sont conjointement menés avec la collectivité ; la commune propose également des formations et groupes d’accompagnement au numérique, notamment au « cybercafé » de la maison de quartier. Il existe même un groupe spécifique de femmes, car, comme nous le précise Christophe Rousseau, Coordonnateur du Réseau de Réussite Scolaire (RRS)Joliot Curie « nous nous sommes aperçus que sur le quartier, ce sont les femmes qui pouvaient être porteuses de l’amélioration de l’investissement des parents au suivi de la scolarité en général comme aux usages du numérique ».

Face à la problématique soulevée par Naïma dans son discours sur la barrière de la langue, Christophe Rousseau évoque les cours d’alphabétisation et d’apprentissage de la langue française, en complément des formations aux usages du numérique. Il précise :
« Nous constatons, ici comme ailleurs, que dans l’accompagnement des familles non francophones, les actions doivent intégrer le renforcement des compétences langagières dans leur langue d’origine et dans le respect de l’échange interculturel. Ce travail de fond modifie le rapport aux institutions et à l’apprentissage de la langue écrite et/ou française.  Vecteur d’intégration, cela peut permettre d’aborder alors aussi l’outil numérique et ses usages ».

Finalement, c’est grâce au numérique et à la volonté de le faire adopter par tous les parents, notamment au travers de l’ENT, que la communication s’est établie entre le collège et les familles. Il a permis, en outre, de s’attaquer de plus près aux problématiques linguistiques, dans une zone géographique socialement complexe.

Un bel exemple encourageant sur ce que peut engendrer l’arrivée du numérique dans les établissements, et assez inhabituel des "classiques" écrits ou filmés sur ce sujet. On sort du champ des TICE dans l’enseignement et cet exemple, qui n’est peut-être pas le seul, démontre aussi tout l’intérêt d’une collectivité à investir dans le numérique à l’Ecole, qui n’a pas que des retombées dans les salles de classe.

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